Le 16 octobre 1943, durant l’occupation nazie de Rome, plus de mille juifs romains furent arrêtés et déportés au camp d’extermination d’Auschwitz. Seules16 personnes, dont une seule femme, en sont revenues.
La Communauté de Sant’Egidio et la Communauté juive de Rome, comme chaque année depuis 1994, font mémoire de ce moment tragique de la vie de la ville, en organisant un « pèlerinage de la mémoire », afin que personne, surtout les jeunes générations, n’oublie la déportation durant l’occupation nazie.
Le pape François a adressé ce message à la communauté juive de Rome à la veille de ces commémorations.
Anita Bourdin
Message du pape François
Illustre Grand Rabbin,
Estimés membres de la Communauté juive de Rome,
Je désire m’unir, par l’approche spirituelle et la prière, à la commémoration du 70e anniversaire de la déportation des juifs de Rome. Alors que nous nous remémorons ces heures tragiques d’octobre 1943, il est de notre devoir de se rappeler le destin de ces déportés, percevoir leur peur, leur douleur, leur désespoir pour ne pas les oublier, pour les maintenir en vie dans notre souvenir et dans notre prière avec leurs familles, leurs parents et amis qui ont pleuré leur perte et qui sont restés consternés devant les barbaries que peut commettre l’être humain.
Pourtant, avoir la mémoire d’un évènement ne signifie pas simplement en avoir le souvenir ; cela signifie aussi et surtout de s’efforcer à comprendre quel est le message qu’il représente aujourd’hui pour que la mémoire du passé puisse enseigner au présent et devenir lumière qui illumine le chemin du futur. Jean-Paul II écrivait que la mémoire est appelée à jouer un rôle nécessaire « dans le processus de construction d’un futur dans lequel l’iniquité indicible de la Shoah ne soit plus jamais possible » (Introduction au document de la Commission pour les Rapports Religieux avec le judaïsme : « Nous nous souvenons. Une réflexion sur la Shoah », 16 mars 1998). Et Benoît XVI, dans le Camp de concentration de Auschwitz, affirmait que « le passé n’est pas seulement du passé. Il nous concerne aussi et nous indique les voies à prendre et à ne pas prendre » (Discours, 28 mai 2006).
La commémoration d’aujourd’hui pourrait donc être définie comme une mémoire future, un appel aux nouvelles générations à ne pas aplatir notre propre existence, à ne pas nous laisser entraîner par des idéologies, à ne jamais justifier le mal que nous rencontrons, à ne pas baisser la garde contre l’antisémitisme et contre le racisme, quel que soit leurs provenances. J’espère que, grâce à cette initiative, pourront s’entrelacer et s’alimenter des réseaux d’amitié et de fraternité entre Juifs et Catholiques dans notre ville bien-aimée de Rome.
Le Seigneur dit par la bouche du prophète Jérémie : « je connais les projets que j’ai fait en ce qui vous concerne, les projets de paix et pas de condamnation pour vous concéder un futur plein d’espérance » (Jer 29,11). Que le souvenir des tragédies du passé devienne pour tous un engagement de toutes nos forces pour un futur que Dieu veut préparer et construire pour nous et avec nous.
Shalom!
Du Vatican, 11 octobre 2013
François
Traduction en français de Radio Vatican