A Rio, lors de sa rencontre – improvisée – avec 30 000 jeunes Argentins rassemblés dans la cathédrale et autour, le 25 juillet, le pape François avait avoué qu’il se sentait parfois « en cage » au Vatican. Ce qui a suscité une question de la presse dans l’avion (28-29 juillet).
Pauis, à la question de Philip Pullela (Reuteurs) dans l’avion du retour à Rome, le pape a complété ces propos, livrant quelques confidences sur sa vie quotidienne dans le petit Etat de 44 hectares: il a fait l’éloge de l’austérité, avec toutes ses « nuances ».
Hada Messia (États-Unis, CNN) : le pape se sent en cage ?
Vous savez combien de fois j’ai eu envie d’aller dans les rues de Rome, parce que, à Buenos Aires, j’aimais aller dans la rue, j’aimais tellement ! En ce sens, je me sens un peu en cage. Mais, ça, je dois le dire, parce qu’ils sont tellement bons, ceux de la Gendarmerie vaticane, ils sont bons, bons, bons, et je leur en suis reconnaissant.
Maintenant, ils me laissent faire un peu plus de choses. Je crois… leur devoir est de maintenir la sécurité. En cage, dans ce sens-là. Moi, j’aimerais aller dans la rue, mais je comprends que ce n’est pas possible, je le comprends. C’est dans ce sens que j’ai dit cela. Parce que j’avais l’habitude, comme on dit à Buenos Aires, j’étais un prêtre callejero [des rues]…
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat
L’austérité, la curie, les saints
Les changements … les changements viennent de deux versants : celui que nous cardinaux nous avons demandé et celui qui vient de ma personnalité. Vous parliez du fait que je suis resté à Sainte-Marthe: mais je ne pourrais pas vivre seul dans le Palais, et ce n’est pas luxueux. L’appartement pontifical n’est pas si luxueux! Il est large, grand, mais ce n’est pas luxueux. Mais je ne peux pas vivre tout seul ou avec un petit groupe! J’ai besoin de gens, de trouver des gens, de parler avec les gens … c’est pourquoi quand les enfants des écoles jésuites m’ont demandé : « Pourquoi vivez-vous à Sainte-Marthe? Par austérité, par pauvreté? » . Non, non: pour raisons psychiatriques, tout simplement, car psychologiquement je ne peux pas. Chacun doit mener sa vie avec sa manière de vivre, d’être. Les cardinaux qui travaillent à la curie ne vivent pas en riches ou plein de fastes : ils vivent dans un petit appartement, sont austères: ceux que je connais, ces appartements que l’APSA donne aux cardinaux.
Et puis, je voulais vous dire une autre chose. Mais l’austérité – une austérité générale – je crois que nous tous qui travaillons au service de l’Eglise nous en avons besoin. Il y a tant de nuances dans l’austérité … chacun doit chercher sa voie.
Quant à la question des saints [à la curie] , c’est vrai, il y en a beaucoup : cardinaux, prêtres, évêques, religieuses, laïques; des gens qui prient, des gens qui travaillent beaucoup, mais qui vont aussi voir les pauvres, en cachette. Je sais qu’il y en a certains qui se préoccupent de donner à manger aux pauvres et qui, dans leurs heures de liberté, vont exercer leur ministère dans une église ou dans une autre … ils sont prêtres. Il y a des saints à la curie.
Et certains qui ne le sont pas, et ceux-là sont ceux qui font le plus de bruit. Vous le savez, un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse. Et je souffre quand il y a ces choses. Il y en a certains qui font scandale, certains. Nous avons ce monseigneur en prison, je crois qu’il est encore en prison; il n’y est pas allé parce qu’il ressemble à la bienheureuse Imelda, ce n’était pas un bienheureux. Ce sont des scandales qui font mal. Une chose – ça je ne l’ai jamais dit, mais je m’en suis aperçu – je crois que la curie a un peu baissé de niveau par rapport à autrefois, à l’époque des vieux curiaux … le profil du vieux curial, fidèle, qui faisait son travail. Nous avons besoin de ces personnes. Je crois … il y en a, mais pas autant qu’avant. Le profil du vieux curial: je dirais comme ça. Nous devons en avoir davantage.
Si je trouve de la résistance? Mah! S’il y a de la résistance, je ne l’ai pas encore vue. Il est vrai que je n’ai pas fait tant de choses, mais on peut dire que, oui, j’ai trouvé de l’aide, et j’ai trouvé aussi des personnes loyales. Par exemple, j’aime bien quand une personne me dit: « Je ne suis pas d’accord », et ça je l’ai trouvé. « – Mais cela je ne le vois pas, je ne suis pas d’accord. – Je vous le dis, faites-le ». Celui-là, c’est un vrai collaborateur. Et je l’ai trouvé à la curie. C’est bien. Mais quand il y a ceux qui disent: « Ah, tout est beau, tout est beau, tout est beau », et puis disent le contraire de l’autre côté … je ne sais pas, peut-être qu’il y en a quelques uns mais je ne m’en suis pas encore aperçu. De la résistance, en quatre mois, il ne peut pas y en avoir beaucoup …
© Traduction de Zenit, Océane Le Gall, avec Anita Bourdin