La période de « Sede vacante », de la « vacance » du Siège apostolique commencera jeudi prochain, 28 février 2013, à 20 h, et s’achèvera avec l’acceptation de son élection par le pontife romain élu par le conclave avec les deux tiers des suffrages.
Habituellement, cette période commence avec le décès d’un pape, mais pour la première fois à l’époque moderne, elle commencera avec la date fixée par Benoît XVI lui-même pour la fin de son pontificat, une renonciation à sa charge « faite librement » et « dûment manifestée», devant les cardinaux le 11 février dernier, selon les exigences du Droit canon (canon 332, § 2).
Vacance du Siège apostolique
Dès le premier jour de la « vacance », vendredi 1er mars, le cardinal doyen du collège cardinalice, le cardinal Angelo Sodano, convoquera à Rome les cardinaux du monde entier, certes par la poste, mais aussi par les moyens plus rapides, comme le fax, a précisé le porte-parole du Saint-Siège, le P. Federico Lombardi, lors d’une rencontre avec la presse ce mardi 26 février au Vatican. Le 2 et le 3 mars étant un samedi et un dimanche, la convocation pourrait bien être pour le lundi 4 mars.
D’autant que Benoît XVI a annoncé qu’il rencontrerai les cardinaux qui seront à Rome jeudi matin, 28 février : certains seront déjà arrivés.
Pendant cette période – recherchée par les philatélistes ! – le pouvoir est exercé par la « congrégation générale » du collège des cardinaux et pour les affaires ordinaires par la « congrégation particulière » ou « spéciale » composée de quatre cardinaux : le cardinal camerlingue – Tarcisio Bertone, le Secrétaire d’Etat actuel – et trois cardinaux tirés au sort tous les trois jours par la congrégation (assemblée) générale des cardinaux : un représentant pour chaque « ordre » des cardinaux. Le collège des cardinaux est en effet hiérarchisé en cardinaux-évêques, cardinaux-prêtres et cardinaux-diacres, comme un reflet du clergé de Rome qui est à l’origine du collège cardinalice.
Organiser le conclave
Les cardinaux doivent également organiser le conclave, l’assemblée des cardinaux électeurs qui tient son nom du latin médiéval « conclavus » qui indique un endroit fermé à clef, (« cum clave » « à clef »), donc le lieu du rassemblement des cardinaux électeurs et par extension leur assemblée. Elle est réglée par un « ordre » liturgique publié en l’An 2000 sous Jean-Paul II par le Bureau des célébrations liturgiques pontificales (« Ordo rituum conclavis »).
Les cardinaux sont devenus les seuls électeurs du pontife romain au XIe s. (bulle « In nomine Domini » de Nicolas II, le 13 avril 1059). Mais, en 1271, l’assemblée de Viterbe dura quasi trois ans : au bout de 2 ans et 9 mois, les cardinaux ont alors été « emmurés » (enfermés « à clef ») pour hâter la fin de l’élection. Après une telle expérience, le pape Grégoire X institua le conclave comme méthode d’élection des papes, par la bulle « Ubi periculum » du 7 juillet 1274.
Cessation de fonctions à la curie
Dès le début de la « vacance », le secrétaire d’Etat du Saint-Siège, et les chefs de dicastères romains cessent leurs fonctions. Seuls sont maintenus dans leur charge le cardinal camerlingue, Tarcisio Bertone, le Grand pénitencier, le cardinal Manuel Monteiro de Castro, le cardinal vicaire général pour le diocèse de Rome, Agostino Vallini, le cardinal archiprêtre de la basilique Saint-Pierre et vicaire général pour la Cité du Vatican, Angelo Comastri, le Substitut de la Secrétairerie d’Etat, Giovanni Angelo Becciu, le Secrétaire pour les relations avec les Etats, Dominique Mamberti, les représentants pontificaux – nonces – en mission. Deux tribunaux poursuivent leur travail : le tribunal suprême de la Signature apostolique, et le tribunal de la Rote romaine, tribunal d’appel.
Notons que l’assemblée – « congrégation générale » – quotidienne des cardinaux inclut les cardinaux non-électeurs qui ont aussi pour charge de garantir que ce soit une période de prière intense, comme l’a recommandé le cardinal Bertone, au nom du pape, aux monastères contemplatifs du monde.
Le P. Lombardi a souligné l’importance de ce « mouvement spirituel » qui doit accompagner la période de vacance du Siège apostolique en disant qu’il s’agit d’un « principe général », la Constitution de Jean-Paul II dit que « l’Eglise doit prier », invite « les cardinaux âgés » à être des « guides de prière » dans les Eglises de Rome avec le peuple de Dieu . Il s’agit donc d’une « invitation générale qui a toujours été ».
Cette lettre aux contemplatifs démontre en outre, a-t-il souligné, « l’attention du pape pour leur grand service spirituel pour l’Eglise et l’humanité ». Il y voit un geste « absolument naturel » et « très important en ce moment » de la vie de l’Eglise, sans relation à d’autres circonstances « contingentes ».
Rien ne remplace l’autorité du pape
Mais cet « intérim » ne se substitue pas à l’autorité papale : les cardinaux sont seulement chargés de gérer les affaires courantes et ne peuvent prendre des décisions qui auraient des conséquences au-delà de la période de vacance (comme des nominations par exemple). Selon le Code de droit canon de l’Eglise latine: « Quand le siège de Rome devient vacant ou totalement empêché, rien ne doit être innové dans le gouvernement de l’Eglise tout entière; les lois spéciales portées pour ces circonstances seront alors observées » (canon 335). La constitution de Jean-Paul II « Universi dominici gregis » – « Tout le troupeau du Seigneur » -, de 1996, exprime la même idée en ces termes: « Pendant la vacance du Siège apostolique, le Collège des Cardinaux n’a aucun pouvoir ni aucune juridiction sur les questions qui sont du ressort du Souverain Pontife, durant sa vie ou dans l’exercice des fonctions de sa charge ; ces questions devront toutes être réservées exclusivement au futur Pontife » (ch. I, § 1). La constitution a été complétée sur certains points par un motu proprio de Benoît XVI, en 2007.
Parmi les préparatifs de l’élection du nouveau pape, les cardinaux doivent désigner deux d’entre eux pour offrir au collège cardinalice puis aux des électeurs deux méditations pour les préparer à cet acte décisif pour la vie de l’Eglise.
Début du conclave
Le conclave est prévu par la loi 15 jours (au plus 20 jours) après le début de la vacance du siège apostolique. Mais les cardinaux pourraient l’anticiper et le faire commencer avant le 15 mars : c’est à leur assemblée de fixer la date, à partir du moment où tous les électeurs seront arrivés à Rome.
Cependant ils pourraient prendre quelques jours pour se réunir et discuter des priorités de l’Eglise aujourd’hui dans le monde, et profiter de cet échange d’idées pour mieux se connaître. Mais déjà le récent synode d’octobre 2012 a permis les rencontres et les échanges, pendant trois semaines. Cette préparation peut permettre d’entrer en conclave avec des idées plus claires et en hâter le déroulement.
C’est le doyen du collège des cardinaux – élu par ses pairs au début du pontificat – qui dotit présider l’assemblée cardinalice et le conclave. Or ce cardinal est actuellement Angelo Sodano, âgé de 85 ans, et donc, il n’entre pas au conclave (il est né le 23 novembre 1927). Ce doit alors être le vice-doyen qui le remplace. Or, il s’agit du cardinal français Roger Etchegaray, mais il est né le 22 septembre 1922 et il est donc âgé de 90 ans.
Selon « Universi dominici gregis », le rôle de présider le conclave reviendra alors au plus âgé des cardinaux électeurs par ordre
de préséance, et donc le cardinal italien Giovanni Battista Re : né le 30 janvier 1934, âgé de 79 ans depuis un mois, et cardinal-évêque.
L’article 9 de la Constitution dit en effet : « Les congrégations générales […] seront présidées par le Doyen du Collège ou, s’il est absent ou légitimement empêché, par le Vice-Doyen. Si l’un d’entre eux, ou les deux, ne jouissaient plus du droit d’élire le Pontife, selon la norme du n. 33 de la présente Constitution, le Cardinal électeur le plus ancien, suivant l’ordre habituel de préséance, présidera les assemblées des Cardinaux électeurs. »