Aujourd’hui commence la longue traversée du Carême. Temps de pénitence, de conversion, d’ascèse, le Carême a un petit goût de cendres peu tentant. Est-ce vraiment la saveur qui s’offre à ceux qui goûtent à la liturgie de ce temps ?
De la cendre
Les cendres témoignent que quelque chose était là qui a brûlé, que quelque chose s’est défait dans les flammes, que quelque chose a disparu. Et cela est heureux, car ce que le feu a fait disparaître ce n’est rien moins que notre péché. Voilà le premier signe dont notre front est couvert, le signe de notre volonté de faire brûler et disparaître le péché qui est en nous.
Le mercredi des Cendres est un point de départ où nous entendons l’appel de Dieu : « Revenez à moi de tout votre cœur » (Jl 2, 12). C’est comme s’il nous disait : « Revenez à moi, car je suis le feu qui brûle, moi seul peut faire ce miracle, il vous suffit de vous tourner vers moi. » C’est pourquoi saint Paul nous supplie : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu », il sait d’expérience ce que fait le feu divin qui transforme une vie en un instant.
Ainsi la cendre n’alourdit pas notre mise en route, elle nous montre quelle sera notre légèreté si nous allons d’un pas ferme vers le Père qui nous cherche.
La parole de Dieu
« Heureux l’homme qui met sa foi dans le Seigneur » (Ps 1, jeudi après les Cendres) : telle est la promesse du Carême. Le cœur de ce bonheur est la foi dans le Seigneur. Chacun des quarante jours du Carême va nous apprendre quel est le Seigneur en qui nous devons mettre notre foi, quel est le Seigneur vers qui nous pouvons aller pour être réconcilié avec le Père.
À nous d’écouter la parole de Dieu pour le découvrir et le reconnaître, non selon nos pieux critères, mais selon ce qu’il est en vérité et qui nous déroute toujours. Car notre Seigneur est un Dieu humble et humilié, un Dieu qui s’abaisse toujours pour rejoindre le plus petits, un Dieu ne condamne personne pas même celui qui le livre, un Dieu qui nous veut semblable à lui non à la force du poignet – « pour les hommes, s’est impossible » – mais à la force de l’amour reçu et donné – avec « Dieu tout est possible » (Mt 19, 26).
Le jeûne, la prière, l’aumône
Trois moyens nous sont donnés pour « écouter » la parole de Dieu sous toutes ses formes.
Le jeûne, qui nous apprend que nous ne sommes rien sans ce Dieu qui pourvoit à notre vie ;
la prière, qui nous met en relation avec Dieu pour l’écouter et lui répondre dans le souffle de l’Esprit ;
l’aumône, qui nous donne de reconnaître et de servir le Christ en ses frères les pauvres.
Le jeûne, la prière et l’aumône ne sont pas spécifiques au Carême, ils sont le mode d’être de l’homme nouveau transformé par la puissance du Christ. Le Carême vient seulement réveiller en nous cet homme nouveau trop souvent endormi.
Les sacrements
La parole de Dieu nous rejoint dans les sacrements, car en eux, le Verbe, nous rejoint, nous parle, nous guérit, nous console, nous appelle, nous reconstruit. C’est la raison pour laquelle les sacrements sont si importants dans la vie chrétienne et particulièrement au moment du Carême où nous reprenons conscience de l’appel de Dieu sur nous. Dans le sacrement de la pénitence et de la réconciliation, le Christ vient nous guérir au cœur de la démarche d’humilité que nous faisons. Nous renaissons à la vie nouvelle comme au jour de notre baptême. Dans le sacrement de l’eucharistie, il se donne lui-même pour qu’à son exemple nous nous donnions aux autres en devenant pour eux d’autres christs.
Regardons les cendres légères qui ornent notre front et ceux de nos frères et désirons être consumer au feu de l’amour pour jubiler tous ensemble dans la nuit de Pâques, mémoire de notre salut, anticipation du banquet éternel où le Christ nous recevra : « Heureux l’homme qui met sa foi dans le Seigneur ! »