ROME, Jeudi 10 septembre 2009 (ZENIT.org) - En Thaïlande, dans la province de Ranong, l'Eglise catholique lutte pour maintenir ouverts ses centres d'aide aux enfants d'immigrés, rapporte aujourd'hui « Eglises d'Asie » (EDA), l'agence des Missions étrangères de Paris (MEP).
Située dans le sud de la Thaïlande, sur la côte de la mer d'Andaman, la province de Ranong partage avec la Birmanie voisine une frontière de 170 km de long. Connue des Thaïlandais comme « la province birmane » de Thaïlande, elle est dirigée, depuis la fin de l'année 2008, par Wanchat Wongchaichana, gouverneur qui s'est donné pour objectif de rapatrier en Birmanie les très nombreux migrants clandestins présents dans la province. En mai dernier, l'administration locale a annoncé la fermeture prochaine des centres d'accueil des migrants, gérés notamment par l'Eglise catholique, ou leur transfert sous une tutelle publique. Quatre-vingt-seize écoles de la province doivent être contrôlées pour en exclure les enfants d'immigrés clandestins.
Pour les prêtres et les religieuses catholiques engagés dans l'aide aux immigrés birmans et à la scolarisation de leurs enfants, cette politique est inacceptable et inutile. Le P. Wichien Radomkit, religieux thaïlandais de la congrégation des stigmatins (1), dirige le Maria Learning Center, fondé en 2005 à Ranong pour accueillir les enfants de migrants birmans (2). Aujourd'hui, le centre accueille quelque 300 enfants, pour leur dispenser une éducation élémentaire en thaï, en anglais et en birman ainsi que dans les matières scolaires de base ; de plus, le centre finance les études de 34 enfants dans des écoles publiques voisines. Selon le P. Wichien, « la fermeture de nos centres d'accueil et le renvoi des enfants en Birmanie ne résoudront en rien » le problème de l'immigration illégale des Birmans en Thaïlande. « Si nous les renvoyons, ils reviendront de toute manière en Thaïlande car ils souffrent trop en Birmanie de la situation politique et du sort réservé aux minorités », explique le religieux.
Le P. Wichien poursuit en précisant que lui et d'autres responsables d'institutions catholiques ont rencontré à plusieurs reprises des responsables de l'administration provinciale pour leur faire part du point de vue de l'Eglise. La dernière rencontre a eu lieu à la mi-août dernier. « Nous avons parlé du droit à l'éducation dont jouissent tous les enfants, rapporte-t-il. Nous leur avons dit aussi qu'il était mieux pour la société de voir ces enfants éduqués à l'école plutôt que de traîner dans les rues. Nous avons dit enfin que l'administration avait tout à gagner à connaître ces enfants plutôt qu'à les pourchasser. » Pour l'heure, l'administration n'a pas arrêté de date à laquelle le plan de fermeture des institutions d'accueil des enfants d'immigrés serait appliqué.
Pour Sœur Prapatsorn Srivorakul, coordinatrice du Jesuit Refugee Service (JRS) pour la province de Ranong, le rapatriement forcé des immigrés clandestins est lourd de menaces. Selon elle, il est à craindre que les enfants et les adolescents soient enrôlés de force dans l'armée birmane ou vendus à des trafiquants d'êtres humains. Aux autorités thaïlandaises, la religieuse a expliqué que, sans éducation, les enfants d'immigrés sont susceptibles de devenir consommateurs de drogues, ou bien encore de s'engager dans divers trafics criminels, affectant ainsi la tranquillité de la communauté thaïlandaise. Elle a ajouté que le travail des institutions catholiques ne s'inscrivait pas contre la politique de la Thaïlande mais au contraire pouvait venir alléger la tâche des autorités publiques.
Le JRS soutient directement l'éducation de 800 jeunes immigrés dans la province. Agés de 5 à 14 ans, ces enfants sont accueillis dans six structures éducatives où travaillent une trentaine d'enseignants thaïlandais et birmans. Une centaine de bourses sont également allouées aux plus doués de ces enfants afin qu'ils poursuivent leur scolarité dans le système scolaire normal.
Classée parmi les provinces les plus pauvres du pays, Ranong est peu peuplée, avec 160 000 habitants. Selon différentes estimations, les Thaïlandais y seraient au nombre de 100 000 et les immigrés birmans dotés de papiers en règle au nombre de 60 000 ; quant aux clandestins, leur nombre est estimé entre 100 000 et 150 000, la majorité d'entre eux appartenant à la minorité Mon. La province de Ranong est connue pour être l'un des principaux points d'entrée des migrants birmans en Thaïlande.
(1) Stigmatins ou Congrégation des saints stigmates de Notre Seigneur Jésus Christ, congrégation fondée en Italie en 1816. Selon l'intuition de leur fondateur, Gaspard Bertoni, les stigmatins doivent être des moines dans leur couvent et des apôtres au dehors.
(2) Le plus souvent, les migrants birmans de la province de Ranong trouvent à s'embaucher dans l'industrie de la pêche. Fréquemment exploités, ils se trouvent séparés de leurs enfants durant de longues semaines.
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