CITE DU VATICAN, Mardi 20 mai 2003 (ZENIT.org) – Plus d’un million de personnes ont participé, dans la matinée du 4 mai 2003, III dimanche de Pâques, à la concélébration eucharistique solennelle présidée par le Pape Jean-Paul II sur la Plaza de Colón, à Madrid, à l’occasion de la canonisation de cinq fils exemplaires de l’Eglise espagnole: Pedro Poveda Castroverde, José María Rubio y Peralta, Genoveva Torres Morales, Angela de la Cruz, María Maravillas de Jesús. Au début de la Messe, le Cardinal Antonio María Rouco Varela, Archevêque de Madrid, a adressé un discours d’hommage au Saint-Père.
Voici l’homélie de Jean-Paul II dont L’Osservatore Romano en langue française publie la traduction ci-dessous:
1. « Ainsi était-il écrit que le Christ… ressusciterait d’entre les morts… De cela vous êtes témoins » (cf. Lc 24, 46-48), dit Jésus à ses Apôtres dans le passage de l’Evangile qui vient d’être proclamé. Mission difficile et exigeante, confiée à des hommes qui n’osent pas encore se montrer en public par peur d’être reconnus comme des disciples du Nazaréen. Mais malgré tout, la première lecture nous a présenté Pierre qui, une fois qu’il a reçu l’Esprit Saint lors de la Pentecôte, a le courage de proclamer devant le peuple la résurrection de Jésus et d’exhorter au repentir et à la conversion.
Depuis lors l’Eglise, par la force de l’Esprit Saint, continue de proclamer cette annonce extraordinaire à tous les hommes de tous les temps. Et le Successeur de Pierre, pèlerin en terre espagnole, vous le répète: Espagne, fidèle à un passé de courageuse évangélisation, sois encore aujourd’hui le témoin de Jésus-Christ ressuscité!
2. Je salue avec affection tout le Peuple de Dieu venu des différentes régions du pays et réuni ici pour participer à cette célébration solennelle. Je présente mes salutations respectueuses et déférentes à Leurs Majestés le roi et la reine d’Espagne et à la Famille royale. Je remercie cordialement pour ses nobles paroles le Cardinal Antonio María Rouco Varela, Archevêque de Madrid. Je salue les Cardinaux et les évêques espagnols, les prêtres et les personnes consacrées; je salue également avec affection les membres des Instituts liés aux nouveaux saints.
Je remercie de manière particulière de leur présence ici, le Président du gouvernement et les Présidents des Communautés autonomes, ainsi que les autorités civiles, qui ont offert une collaboration efficace à la réalisation des différentes étapes de cette visite.
3. Les nouveaux saints se présentent aujourd’hui devant nous comme de vrais disciples du Seigneur et des témoins de sa Résurrection.
Saint Pedro Poveda, comprenant l’importance de la fonction sociale de l’éducation, mena à bien une grande tâche humanitaire et éducative parmi les laissés-pour-compte et les personnes en difficulté. Il fut un maître de prière, un pédagogue de la vie chrétienne et des relations entre la foi et la science, convaincu que les chrétiens devaient proposer des valeurs et s’engager concrètement à la construction d’un monde plus juste et plus solidaire. Il conclut son existence en la couronnant par le martyre.
Saint José María Rubio vécut son sacerdoce tout d’abord comme prêtre diocésain puis comme jésuite, avec un don total de soi à l’apostolat de la Parole et des Sacrements, consacrant de nombreuses heures au confessionnal et dirigeant un très grand nombre de cours d’exercices spirituels, durant lesquels il forma de nombreux chrétiens qui devaient par la suite mourir en martyrs pendant la persécution religieuse en Espagne. « Faire ce que Dieu veut et vouloir ce que Dieu fait », était sa devise.
4. Sainte Genoveva Torres fut un instrument de la tendresse de Dieu à l’égard des personnes seules et à la recherche d’amour, de réconfort et de soin du corps et de l’esprit. Le trait caractéristique qui donnait son élan à sa spiritualité était l’adoration réparatrice de l’Eucharistie, le fondement à partir duquel elle accomplit un apostolat plein d’humilité et de simplicité, d’abnégation et de charité.
Le même amour et la même sensibilité envers les pauvres amena Sainte Angela de la Cruz à fonder sa « Compagnie de la Croix », avec une dimension caritative et sociale en faveur des plus démunis, et qui eut un très fort impact sur l’Eglise et sur la société sévillane de son époque. Elle se distinguait par son naturel et sa simplicité, en recherchant la sainteté avec un esprit de mortification, au service de Dieu à travers ses frères.
Sainte Maravillas de Jesús vécut animée par une foi héroïque, formée à travers une vocation austère, plaçant Dieu au centre de son existence. Une fois surmontées les tristes circonstances de la guerre civile espagnole, elle fut à l’origine de nouvelles fondations dans l’Ordre du Carmel façonnées par l’esprit caractéristique de la réforme thérésienne. Sa vie contemplative et la clôture du monastère ne l’empêchèrent pas de répondre aux besoins des personnes qu’elle fréquentait et de promouvoir des oeuvres sociales et caritatives autour d’elle.
5. Les nouveaux saints ont des visages très concrets et leur histoire est bien connue. Quel est leur message? Leurs oeuvres, que nous admirons et pour lesquelles nous rendons grâce à Dieu, ne sont pas le produit de leurs forces ou de la sagesse humaine, mais sont dues à l’action mystérieuse de l’Esprit Saint, qui a suscité en eux une adhésion indéfectible au Christ crucifié et ressuscité et la volonté de l’imiter. Chers fidèles catholiques d’Espagne: laissez-vous interpeller par ces merveilleux exemples!
En rendant grâce au Seigneur pour les si nombreux dons qu’il a répandus en Espagne, je vous invite à demander avec moi que, sur cette terre, continuent de fleurir de nouveaux saints. D’autres fruits de sainteté naîtront si les communautés ecclésiales conservent leur fidélité à l’Evangile qui, selon une vénérable tradition, fut prêché dès les premiers temps du christianisme et s’est conservé à travers les siècles.
De nouveaux fruits de sainteté naîtront si la famille sait rester unie, en tant qu’authentique sanctuaire de l’amour et de la vie. « Cette foi chrétienne et catholique… constitue l’identité du peuple espagnol » (Messe du Pèlerin, 9 novembre 1982; cf. ORLF n. 48 du 30 novembre 1982). Connaître et approfondir le passé d’un peuple signifie renforcer et enrichir son identité même. N’abandonnez pas vos racines chrétiennes! Il n’y a qu’ainsi que vous serez capables d’apporter au monde et à l’Europe la richesse culturelle de votre histoire.
6. « Alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Ecritures » (Lc 24, 45). Le Christ ressuscité illumine les Apôtres afin que leur annonce puisse être comprise et soit transmise dans son intégralité à toutes les générations; afin que l’homme en entendant, croit, en croyant, espère, et en espérant, aime (cf. saint Augustin, De catechizandis rudibus, 4, 8). En prêchant Jésus-Christ ressuscité, l’Eglise souhaite annoncer à tous les hommes un chemin d’espérance et les accompagner à la rencontre du Christ.
Tout en célébrant cette Eucharistie, j’invoque sur chacun de vous le grand don de la fidélité à vos engagements chrétiens. Que Dieu le Père vous l’accorde par l’intercession de la Très Sainte Vierge, vénérée en Espagne sous de nombreux titres, et par celle des nouveaux saints.
(©L’Osservatore Romano – 13 mai 2003)