Le dialogue interreligieux, au service de la paix

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59e Session de la Commission des Droits de l’Homme de l’ONU

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CITE DU VATICAN, Vendredi 2 mai 2003 (ZENIT.org) – Le Saint-Siège réaffirme l’importance du dialogue interreligieux, comme un instrument précieux au service de la paix.

Voici la traduction intégrale de l’anglais, publiée par L’Osservatore Romano en langue française, de l’intervention de Mgr Diarmuid Martin lors de la 59e Session de la Commission des Droits de l’Homme des Nations unies

Au cours de la 59 session de la Commission des Droits de l’Homme des Nations unies, qui s’est tenue à Genève du 17 mars au 25 avril 2003, à l’occasion du débat sur « Droits civils et politiques », S.Exc. Mgr Diarmuid Martin, Observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations unies, a prononcé le 8 avril l’intervention suivante:

Madame le Président,

Le Rapporteur spécial sur la liberté de religion et de croyance, M. Abdelfattah Amor, attire l’attention dans son compte-rendu (115-128) sur l’importance du dialogue entre les religions et les civilisations, en tant qu’instrument en vue de promouvoir une plus grande tolérance, respect et compréhension dans le cadre de la liberté de religion et de croyance. En effet, un tel dialogue représente une contribution importante à la paix, aux relations harmonieuses et à la solidarité entre les personnes et les peuples, dans un monde où les divisions et les extrémismes peuvent facilement apparaître ou être exploités au détriment de l’unité de la famille humaine.
L’importance du dialogue entre les religions au service de la paix a été soulignée de façon particulière dans le Décalogue d’Assise pour la Paix, signé au terme de la Journée de Prière pour la Paix, à laquelle le Pape Jean-Paul II a appelé le 24 janvier 2002, sur lequel le Rapporteur spécial attire l’attention dans son compte-rendu (125).

Ce Décalogue établit certains éléments fondamentaux qui devraient composer le dialogue entre les religions en faveur de la paix. Ceux-ci incluent:
– l’affirmation selon laquelle la violence et le terrorisme s’opposent à tout esprit religieux authentique;
– l’éducation au respect et à l’estime réciproque entre les membres de groupes ethniques, cultures et peuples différents;
– la reconnaissance du fait que faire face aux différences peut devenir une occasion de plus grande compréhension réciproque;
– le pardon des erreurs et des préjudices du présent et du passé;
– la promotion d’une culture du dialogue, ouverte à la compréhension et à la confiance.

La responsabilité première de la promotion de ce dialogue revient aux chefs religieux eux-mêmes. Le Pape Jean-Paul II a encouragé cela à plusieurs occasions, tout en recommandant d’éviter tout risque de syncrétisme ou d’irénisme facile et trompeur, car cela nuirait, entre autres, au dialogue interreligieux lui-même (cf. Tertio millennio adveniente). Les chefs religieux ont la responsabilité – tout en abordant les différences de façon ouverte et respectueuse – de garantir que les éléments de leur enseignement qui soulignent la paix et l’unité du genre humain deviennent plus centraux dans leur dialogue. Comme le souligne le Rapporteur spécial, la qualité du dialogue interreligieux dans notre culture contemporaine dépendra de la capacité des chefs religieux à « considérer leur propre diversité comme une partie d’une authentique culture de pluralisme ».

Les chefs religieux ont une responsabilité particulière dans la tâche de réaffirmer profondément – et lorsque cela est possible ensemble – que les tentatives visant à utiliser les sentiments religieux pour engendrer la division, ou à utiliser la religion comme une excuse à la violence et au terrorisme, ne peuvent se concilier avec un authentique esprit religieux. Une condition préalable de cette affirmation consistera à garantir que les croyants évitent toute tentative de stéréotyper ou de présenter de façon erronée les autres religions et leurs croyances. Il faut faire attention à la façon dont les autres religions sont représentées dans les manuels scolaires et éducatifs. Les manuels actuels devraient être réexaminés – avec la collaboration des représentants des religions concernées – et, si nécessaire, remplacés.

Une responsabilité supplémentaire revient également aux personnes ne professant aucune croyance religieuse, en particulier celles qui assument une responsabilité dans la vie publique et les mass-médias, qui doivent traiter les croyances religieuses des autres avec respect et éviter les stéréotypes ou les formes de banalisation de la croyance religieuse. Il n’y a pas de place dans une culture de la tolérance pour des actes et des déclarations – qu’ils proviennent de croyants ou de non-croyants – qui expriment un manque de respect ou qui offensent ce qu’il y a de plus sacré pour la conscience des fidèles et de leurs communautés.

La responsabilité première du dialogue interreligieux revient, comme je l’ai souligné, aux chefs religieux, mais les Etats ont la responsabilité de garantir le cadre, la culture et la législation fondamentaux au sein desquels un tel dialogue peut avoir lieu, et d’assurer que la diversité et le pluralisme soient pleinement respectés, en particulier en ce qui concerne les minorités religieuses. Toutefois, comme l’a souligné le compte-rendu du Rapporteur, il existe encore des exemples dans le monde d’aujourd’hui de peuples persécutés – parfois cruellement – à cause de leur croyance religieuse.

Un principe fondamental en ce qui concerne la législation relative à la liberté religieuse dans les sociétés pluralistes d’aujourd’hui établit que là où, à cause des circonstances ou de l’histoire d’un peuple particulier, une reconnaissance civile particulière est accordée à une communauté religieuse dans la constitution ou dans la législation d’un Etat, le droit de tous les citoyens et de toutes les communautés religieuses à la liberté religieuse doit être également reconnu et respecté (cf. Vatican II, Déclaration sur la Liberté religieuse, n. 5). Personne ne devrait être considéré comme un citoyen de deuxième classe à cause de ses croyances religieuses. Chaque communauté religieuse a droit à sa propre existence et à la reconnaissance légale qui lui permet d’agir pleinement dans n’importe quel pays. La législation devrait être appliquée de façon équitable pour toutes les communautés religieuses. L’interprétation ou l’application arbitraire de la législation est une violation du droit à la liberté religieuse.

Un cadre juridique de la liberté religieuse ne devrait pas viser à encourager un contrôle des organisations religieuses, mais plutôt à permettre aux croyants la pleine et libre pratique de leur religion – soumise uniquement aux limitations fixées par l’article 1.3 de la Déclaration sur l’élimination de toutes formes d’intolérance et de discrimination fondée sur la Religion et la Croyance – ainsi qu’à apporter leur contribution, en tant que croyants, au bien commun de la société à laquelle ils appartiennent et à fonder des institutions caritatives et humanitaires appropriées (cf. ibid., art. 6b).

Face aux tensions croissantes existant entre les divers groupes ethniques, il est de l’intérêt de tous que la liberté religieuse soit encouragée et que le dialogue entre les religions se développe dans l’intérêt de toute la famille humaine.
(c) L’Osservatore Romano

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ZENIT Staff

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