CITE DU VATICAN, Mercredi 30 octobre 2002 (ZENIT.org) "Prière à Dieu dans la souffrance": L'Osservatore Romano en français du 29 octobre publie sous ce titre la traduction de l'italien de la catéchèse de Jean-Paul II sur le Psaume 85, lors de l'audience générale du 23 octobre.
- Allocution de Jean-Paul II -
1. Le Psaume 85, qui vient d'être proclamé et qui sera l'objet de notre réflexion, nous offre une définition suggestive de l'orant. Il se présente à Dieu avec ces paroles: je suis "ton serviteur" et le "fils de ta servante" (v. 16). L'expression peut, bien sûr, appartenir au langage du cérémonial de cour, mais elle était également utilisée pour désigner le serviteur adopté comme fils par le chef d'une famille ou d'une tribu. Sous cette lumière, le Psalmiste qui se définit également "ami" du Seigneur (cf. v. 2), sent qu'il est lié à Dieu par un lien non seulement d'obéissance, mais également de familiarité et de communion. C'est pourquoi sa supplique est entièrement imprégnée d'abandon confiant et d'espérance.
Suivons à présent cette prière que la Liturgie des Louanges nous propose au début d'une journée qui, on peut le présumer, comportera non seulement des engagement et des efforts, mais également des incompréhensions et des difficultés.
2. Le Psaume commence par un intense appel, que l'orant adresse au Seigneur, confiant dans son amour (cf. vv. 1-7). A la fin, il exprime à nouveau la certitude que le Seigneur est un "Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, plein d'amour et de vérité" (v. 15; cf. Ex 34, 6).
Ces affirmations de confiance réitérées et convaincues révèlent une foi intacte et pure, qui s'abandonne au "Seigneur [qui est] bonté, plein d'amour pour tous ceux qui t'appellent" (Ps 85, 5).
Au centre du Psaume s'élève un hymne, qui mêle des sentiments d'action de grâce et une profession de foi dans les œuvres de salut que Dieu accomplit devant les peuples (cf. vv. 8-13).
3. Contre toute tentation d'idolâtrie, l'orant proclame l'unicité absolue de Dieu (cf. v. 8). Puis est exprimée l'espérance audacieuse qu'un jour "tous les païens" adoreront le Dieu d'Israël (v. 9). Cette perspective merveilleuse trouve son accomplissement dans l'Eglise du Christ, car il a invité ses apôtres à faire des disciples de "toutes les nations" (Mt 28, 19). Personne ne peut offrir une pleine libération, si ce n'est le Seigneur dont tous dépendent comme créature et à qui on doit s'adresser dans une attitude d'adoration (cf. Ps 85, 9). En effet, Il manifeste dans l'univers et dans l'histoire ses œuvres admirables, qui témoignent de sa seigneurie absolue (cf. v. 10).
A ce point, le Psalmiste se réserve une place afin de se présenter à Dieu avec une requête intense et pure: "Enseigne-moi, Yahvé, tes voies, afin que je marche en ta vérité, rassemble mon cœur pour craindre ton nom" (v. 11). Cette prière de pouvoir connaître la volonté de Dieu est très belle, ainsi que cette invocation pour obtenir le don d'"un cœur simple", semblable à celui d'un enfant qui, sans fausseté ni calculs, se confie pleinement au Père pour marcher sur la route de la vie.
4. C'est alors que naît sur les lèvres du fidèle la louange à Dieu miséricordieux, qui ne le laisse pas sombrer dans le désespoir et dans la mort, dans le mal et dans le péché (cf. vv. 12-13; Ps 15, 10-11).
Le Psaume 85 est un texte cher au judaïsme, qui l'a inséré dans la liturgie de l'une de ses fêtes les plus importantes, le Yôm Kippur ou jour de l'expiation. Le Livre de l'Apocalypse, à son tour, en a tiré un verset (cf. v. 9), le plaçant au sein de la glorieuse liturgie céleste à l'intérieur du "Cantique de Moïse et de l'Agneau": "Tous les païens viendront t'adorer", et l'Apocalypse ajoute: "parce que tu as fait éclater tes vengeances" (Ap 15, 4).
Saint Augustin a consacré à notre Psaume un long commentaire passionné dans ses Commentaires sur les Psaumes, en le transformant en un chant du Christ et du chrétien. La traduction latine, dans le v. 2, conforme à la version grecque des Septante, utilise la version "saint", au lieu de "fidèle": "Garde-moi, car je suis saint". En réalité, seul le Christ est saint. Toutefois, selon le raisonnement de saint Augustin, le chrétien peut lui aussi appliquer ces paroles à sa propre personne: "Je suis saint, parce que tu m'as sanctifié; parce que j'ai reçu la sainteté, non parce que je l'avais: parce que tu me l'as donnée, non parce que je l'ai méritée". Et donc "que tout chrétien, ou plutôt que tout le Corps du Christ, en butte à la tribulation, éprouvé par les secousses et les scandales sans nombre, crie au Seigneur: "Garde mon âme, parce que je suis saint! Sauve, ô mon Dieu, ton serviteur qui espère en toi". C'est là un saint sans orgueil, puisqu'il espère en Dieu" (vol. II, Rome 1970, p. 1251).
5. Le saint chrétien s'ouvre à l'universalité de l'Eglise et prie avec le Psalmiste: "Tous les païens viendront t'adorer, Seigneur, et rendre gloire à ton nom" (Ps 85, 9). Augustin commente: "Toutes les nations ne sont en lui seul qu'une seule nation, c'est là l'unité. De même qu'on dit l'Eglise, on dit les Eglises, et que les Eglises ne forment qu'une Eglise, ainsi cette grande nation sera toutes les nations. Tout à l'heure, c'étaient des nations, des nations nombreuses, comment n'y a-t-il plus qu'une nation? Parce qu'il n'y a qu'une seule foi, qu'une seule espérance, qu'une seule charité, qu'un seul avenir. Et enfin pourquoi n'y aurait-il pas une seule nation, quand il n'y a qu'une seule patrie? Cette patrie, c'est le ciel; cette patrie, c'est Jérusalem. [...] Et cette nation s'étend de l'Orient à l'Occident, du Nord et de l'Océan dans toutes les quatre parties de l'univers entier" (ibid., p. 1269).
Sous cette lumière universelle, notre prière liturgique se transforme en un souffle de louange et en un chant de gloire au Seigneur, au nom de toutes les créatures.
© L'Osservatore Romano
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Oct 30, 2002 00:00