Eviter aux personnes âgées une solitude comparable à une mort sociale

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Lettre de Jean-Paul II pour la IIe assemblée mondiale sur le vieillissement

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CITE DU VATICAN, Jeudi 11 avril 2002 (ZENIT.org) – Le pape Jean-Paul II plaide pour l´intégration sociale des personnes âgées, dans un message adressé au Premier ministre espagnol, José Maria Aznar, à l´occasion de la IIe Assemblée des Nations Unies sur le Vieillissement qui se termine demain à Madrid (8-12 avril 2002).

Le document est en date du 3 avril. La première assemblée de l´ONU sur le Vieillissement s´était tenue à Vienne en 1982.

« Je me sens proche des personnes âgées, non seulement par sollicitude pastorale, mais aussi par le fait que je partage leur condition », explique Jean-Paul II.

La lettre est ainsi nourrie d´une expérience à la première personne, et transmet un message d´autant plus fort sur la façon d´affronter la vieillesse, c´est pourquoi nous la traduisons entièrement.

Les personnes âgées ne doivent se sentir « comme un poids inutile pour la société », mais être « effectivement intégrées dans le tissu social, en utilisant leur contribution d´expérience, de connaissance et de sagesse ».

Les personnes âgées ne doivent pas être reléguées « dans une solitude comparable à une véritable mort sociale », recommande Jean-Paul II .

Lui-même âgé de 81 ans (82 en mai), et souffrant, le pape fait aussi allusion dans son message aux problèmes de santé que les personnes âgées peuvent endurer. Il encourage le développement des « médecines palliatives ».

Le pape touchait à nouveau cette question de la place des personnes âgées dans la société en recevant ce matin les membres de l´Académie des Sciences sociales, et en insistant sur la nécessaire « solidarité entre les générations » (cf. ci-dessous, « Documents »).

Voici notre traduction rapide – de l´espagnol – du message du pape pour l´Assemblée de Madrid:

Excellence,
Je suis heureux de vous adresser et, par votre intermédiaire, à tous les participants de la IIe Assemblée mondiale sur le Vieillissement une cordiale salutation avec mes meilleurs vœux de succès dans vos travaux.

Vingt ans après la Ie assemblée mondiale, célébrée à Vienne en 1982, la réunion présente est une étape significative et surtout une impulsion pour l´avenir, étant donné que le vieillissement de la population mondiale sera certainement l´un des phénomènes les plus significatifs du XXIe siècle.

Au cours des deux dernières décades, l´Organisation des Nations Unies a promu de nombreuses initiatives dans le but de comprendre et de résoudre les problèmes suscités par l´augmentation croissante du nombre de personnes entrées dans l´étape de la retraite.

L´une des plus louables parmi ces initiatives a été l´année internationale des personnes âgées, célébrée en 1999, une occasion efficace pour attirer l´attention de toute l´humanité sur la nécessité d´affronter de façon responsable les défis de construire « une société pour tous les âges ».

J´ai exprimé ma participation à cet événement par une Lettre adressée aux personnes âgées dont je me sens proche non seulement par sollicitude pastorale, mais aussi parce que je partage personnellement leur condition. D´un autre côté, le Conseil pontifical pour les Laïcs a publié un document intitulé: « La dignité de la personne âgée et sa mission dans l´Eglise et dans le monde » (cf. vatican.va et ZENIT.org, « Documents »). A cette occasion, l´Eglise catholique a renouvelé l´attention qu´elle a toujours manifestée en faveur de cette catégorie de personnes, en promouvant des initiatives propre et en collaborant avec les autorités publiques et la société civile.

Maintenant vous vous êtes réunis, pour une évaluation d´ensemble de l´application du Plan d´action international de 1982 et pour déterminer des stratégies pour l´avenir. En venant de toutes les parties du monde, vous rendez témoignage du fait que la question du vieillissement concerne toute l´humanité et doit être affrontée d´une façon globale, et, plus particulièrement intégrée dans la problématique complexe du développement.

En effet, il se produit partout un changement profond de la structure de la population, qui conduit à revoir les projets de société et à discuter à nouveau non seulement sa structure économique mais aussi la vision du cycle de la vie et les relations entre les générations. On peut dire qu´une société se montre juste dans la mesure où elle répond aux besoins d´assistance de tous ses membres et que son degré de civilisation se mesure à la protection offerte à ses membres les plus faibles du tissu social.

Comment garantir la durée d´une société qui est en train de vieillir, en consolidant la sécurité sociale des personnes âgées et leur qualité de vie? Pour répondre à cette question, il est nécessaire de ne pas se laisser guider par des critères économiques mais bien de s´inspirer de solides principes moraux.

Il convient, en premier lieu de considérer la personne âgée dans sa dignité de personne, dignité qui ne diminue pas avec le cours des années, et la détérioration de la santé physique et psychique. Il est évident que cette considération positive ne peut que rencontrer un terrain fécond dans une culture capable de surmonter les stéréotypes sociaux, qui font consister la valeur de la personne humaine dans la jeunesse, l´efficacité, la vitalité physique et la pleine santé.

L´expérience montre que lorsque manque cette vision positive, il est facile de marginaliser la personne âgée et de la reléguer dans une solitude comparable à une véritable mort sociale. Et l´estime que la personne âgée a d´elle-même ne dépend-elle pas pour une bonne part de l´attention qu´elle reçoit dans sa famille et dans la société?

Pour être crédible, et effective, l´affirmation de la dignité de la personne âgée est appelée à se manifester par des politiques visant une distribution équitable des ressources, de façon à ce que tous les citoyens et les personnes âgées aussi, puissent en bénéficier.

Il s´agit d´une tâche ardue et qui n´est réalisable qu´en appliquant le principe de solidarité, de l´échange entre les générations, d´aide réciproque. Cette solidarité doit jouer non seulement dans le cadre de chaque Nation, mais aussi entre les peuples, grâce à un engagement qui conduit à tenir compte des inégalités économiques et sociales profondes entre le Nord et le Sud de la planète.

En effet, la pression de la pauvreté peut mettre en doute de nombreux principes de solidarité, en causant des victimes dans les secteurs les plus fragiles de la population, entre eux et les personnes âgées.

Une aide pour la solution des problèmes connexes au vieillissement de la population vient certainement de l´insertion effective de la personne âgée dans le tissu social, en utilisant l´apport de l´expérience, des connaissances et de la sagesse qu´elle peut offrir. Les personnes âgées, en effet, ne doivent pas être considérées comme un poids pour la société, mais comme une ressource qui peut contribuer au bien-être. Non seulement elles peuvent témoigner qu´il y a des aspects de la vie, comme les valeurs humaines et culturelles, morales et sociales qui ne se mesurent pas en termes économiques ou fonctionnels mais aussi offrir un apport efficace dans le milieu de travail et de la responsabilité.

Il s´agit, enfin, non seulement de faire quelque chose pour les personnes âgées, mais aussi d´accepter ces personnes en tant que des collaborateurs responsables, avec des modalités qui le rendent vraiment possible, en tant qu´agents de projets partagés, en phase de programmation, de dialogue, ou de mise en œuvre.

Il convient également que de telles politiques soient complétées par des programmes de formation destinés à éd
uquer les personnes à la vieillesse au cours de toute leur existence, en les rendant capables de s´adapter aux changements, toujours plus rapides, dans le mode de vie et de travail. Une formation centrée non seulement sur le faire, mais aussi surtout sur l´être, attentive aux valeurs qui font apprécier la vie en toutes ses phases et dans l´acceptation des possibilités comme des limites que comporte la vie.

Même si l´on doit considérer la vieillesse de façon positive et avec l´intention de développer toutes ses possibilités, il ne faut pas éluder ni occulter les difficultés et la fin inévitable de la vie humaine. S´il est certain que, comme le dit la Bible, les personnes « même dans la vieillesse portent du fruit » (Ps 92, 15), il est cependant vrai que le troisième âge est une époque de la vie où la personne est particulièrement vulnérable, victime de la fragilité humaine. Il est très fréquent que l´apparition de maladies chroniques réduise la personne âgée à l´invalidité et lui rappelle, inévitablement, le moment final de sa vie.

Dans ces moments particuliers de souffrance et de dépendance, les personnes âgées n´ont pas seulement besoin de l´assistance des moyens que donnent la science et la technique, mais aussi d´être accompagnées avec compétence et amour pour ne pas se sentir comme un poids inutile et, ce qui est pire, n´en arrivent à vouloir et à demander la mort.

Notre civilisation doit assurer aux personnes âgées une assistance riche en humanité et imprégnée de valeurs authentiques. A ce sujet, un rôle déterminant peut être joué par le développement de la médecine palliative, la collaboration des bénévoles, l´implication des familles, – qui doivent être pour cela aidées à affronter leurs responsabilités – et l´humanisation des institutions sociales et sanitaires qui accueillent les personnes âgées. Un vaste domaine dans lequel l´Eglise catholique, en particulier, a offert – et continue d´offrir – une contribution notable et permanente.

Réfléchir sur la vieillesse signifie par conséquent prendre en considération la personne humaine qui, dès sa naissance, jusqu´à son décès est un don de Dieu, à son image et ressemblance, et s´efforcer pour que chaque moment de son existence soit vécu avec dignité et plénitude.

Sur vous, M. Le président, et sur tous les participants de la IIe Assemblée mondiale sur le Vieillissement, j´invoque la protection du Dieu de la vie.

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ZENIT Staff

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