CITE DU VATICAN, Lundi 4 mars 2002 (ZENIT.org) – Diverses associations musulmanes du Kerala ont décidé de rejoindre un mouvement animé par les chrétiens dans sa lutte pour les droits des paysans locaux, indique la revue des Missions étrangères de Paris dans son édition du 1er mars (EDA, cf. eglasie.org).
La Muslim Jamait Federation (MJF) et le Conseil des Imams de l’Etat (SIC), une des plus importantes associations musulmanes, ont, en effet décidé, le 5 février dernier, de se joindre à la lutte du Mouvement des paysans indiens (INFAM), une organisation d’inspiration chrétienne. Le président de la SIC, Mohammed Nadir, a déclaré au représentant de l’agence Ucanews que son association s’était inquiétée de voir les paysans qui jusqu’alors jouissaient d’un équilibre financier sombrer soudainement dans la pauvreté. C’est ce retournement de situation qui a poussé les musulmans à s’impliquer plus activement dans la lutte en cours.
Les problèmes économiques des paysans, explique EDA, affectent très sérieusement la communauté musulmane dont les membres sont, pour leur majorité, engagés dans le commerce et les affaires. La baisse des prix des produits agricoles a eu des répercussions graves sur le chiffre d’affaire des commerçants musulmans. Grâce à leurs deux associations, les dirigeants musulmans espèrent élargir la lutte menée jusqu’ici et la transformer en mouvement de masse.
Cependant l’annonce de l’alliance des chrétiens et des musulmans pour la protection des paysans pauvres a été fort mal accueillie par le Parti communiste de l’Inde, explique EDA. Son dirigeant K. P. Sadasivan, a déclaré, le 7 février, qu’il ne s’agissait là que d’un coup de publicité sans impact sérieux sur les vrais problèmes paysans. Il a affirmé que l’INFAM avait été lancée par les Eglises chrétiennes par anti-communisme, dans l’intention d’usurper le rôle joué par le parti communiste depuis des décennies en faveur des droits de la classe travailleuse. Cette interprétation des faits a été mise en cause par les dirigeants musulmans eux-mêmes. Le président du MJF a affirmé ne voir dans le mouvement des paysans indiens qu’un mouvement social sans ambition politique. Leur décision de s’associer à la lutte des chrétiens n’avait été motivée que par le désir d’aider des paysans éprouvés par une brusque pauvreté. Il a ajouté que le devoir religieux des musulmans leur imposait de faire en sorte que la société ne souffre pas de la chute des prix des produits agricoles et de la montée des prix des marchandises de consommation usuelle.
La plupart des six millions de chrétiens du Kerala sont des paysans et tirent leur subsistance de produits comme la gomme de caoutchouc, la noix de coco, le poivre noir, le thé et la cardamome, autant de produits dont les prix varient en fonction de la conjoncture internationale, continue EDA. L’INFAM a été créée en 2001 à l’initiative de l’Eglise syro-malabare et d’autres dénominations chrétiennes, alertées par le nombre anormal de suicides chez les paysans de la région, après une sévère baisse des prix des produits agricoles.
Placé sous le patronage de l’archevêque de Tellichery, Mgr George Valiamattam, l’association a pour aumônier, le P. Mathew Vadakkemuri, nommé en novembre dernier. Celui-ci a expliqué que, depuis l’ouverture du marché à la concurrence internationale en 1991, les prix des produits agricoles n’avaient cessé de chuter. Selon des statistiques tenues par la police, 34 paysans se seraient donné la mort en 2001 à la suite d’une mauvaise récolte ou parce qu’ils ne pouvaient rembourser leur dette. Nombre de prêtres de paroisse et de coopératives de village ont suggéré à l’INFAM de demander au gouvernement d’effacer purement et simplement les dettes contractées par les paysans pauvres du Kerala, toujours selon EDA.