Au cœur de Montparnasse, là où le murmure des cafés se mêle au grondement lointain du métro, le calme pieux de l’église Notre-Dame-des-Champs a été brutalement brisé. En l’espace de seulement 24 heures, l’édifice, témoignage vivant de la tradition catholique dans le Paris moderne, a été frappé par deux incendies successifs. L’un, probablement accidentel. L’autre, bien plus préoccupant.
Un premier feu déclenché par un court-circuit
Dans la matinée du 23 juillet, un dysfonctionnement du circuit électrique de l’église a déclenché un incendie dans la tribune du chœur. Le feu a détruit l’orgue et réduit au silence la sonorisation de l’édifice, causant une perte à la fois matérielle et symbolique.
Le lendemain, un incendie criminel dans la chapelle Saint-Joseph
À peine un jour plus tard, le feu est revenu. Cette fois, dans une chapelle latérale dédiée à Saint Joseph. Des panneaux en bois ont été volontairement incendiés. Les flammes ont rapidement atteint une peinture récemment restaurée, qui a été gravement endommagée. La statue de Saint Joseph, patron des pères et des travailleurs, a été renversée et brisée pendant l’intervention des pompiers.
Une blessure profonde pour la communauté paroissiale
Si aucun blessé n’est à déplorer, la blessure morale est profonde. « Ce second incendie a causé encore plus de dégâts », a écrit le père Camille Millour, curé de la paroisse, dans un message adressé aux fidèles le 25 juillet. Son ton, mesuré mais empreint de tristesse, souligne l’impact émotionnel sur la communauté. Il a confirmé qu’une enquête est en cours, remercié les services de secours pour leur rapidité, et indiqué avoir déposé plainte, conjointement avec la Ville de Paris.
L’église fermée jusqu’à nouvel ordre
Le lieu de culte, refuge spirituel pour les habitants comme pour les touristes, est désormais fermé pour une durée indéterminée. Les portes qui ont accueilli des générations de croyants resteront closes : plus de messes, plus de confessions. Un autre silence, plus pesant, s’installe.
La mairie et l’archevêché réagissent
Jean-Pierre Lecoq, maire du 6ᵉ arrondissement, a exprimé son inquiétude sur les réseaux sociaux :
« Un second incendie en moins de 24 heures à Notre-Dame-des-Champs ! L’enquête éclaircira les causes, mais la proximité des événements soulève de sérieuses questions. »
Il a également exigé un audit technique urgent du système électrique de l’église, soulignant que l’alarme incendie ne s’était pas déclenchée lors du premier incident.
Une rénovation devenue urgente
Ce dysfonctionnement pourrait s’avérer crucial. Le père Millour avait déjà prévu de moderniser l’éclairage et le réseau électrique de l’église à l’approche de son 150ᵉ anniversaire, prévu l’an prochain. Ce qui n’était qu’un projet symbolique devient désormais une urgence – pour la beauté, certes, mais surtout pour la sécurité.
Une tendance inquiétante : les églises ciblées
Si cet incident a peu fait parler hors des frontières françaises, il s’inscrit dans une tendance alarmante. Selon The Tablet, la France a déjà enregistré 50 incendies criminels ou tentatives d’incendie visant des églises en 2025 – contre 38 en 2023. Les motivations varient : idéologiques, politiques, voire nihilistes. Mais le bilan pour les communautés croyantes est lourd. Des lieux qui ont traversé les siècles deviennent des cibles plutôt que des sanctuaires.
Notre-Dame-des-Champs : un symbole blessé
Notre-Dame-des-Champs est bien plus qu’une simple église de quartier. Construite sur l’emplacement d’un ancien temple romain dédié à Mercure, elle incarne une superposition de strates spirituelles. Ses murs du XIXᵉ siècle, conçus par l’architecte Léon Ginain, allient sobriété néo-romane et modernité discrète. Mais même la pierre peut être blessée – et ces blessures laissent des traces.
Une réponse spirituelle et concrète
L’avenir de la paroisse ne dépendra pas seulement des ingénieurs ou des assureurs, mais de la résilience de ses fidèles. Le père Millour a déjà indiqué que la campagne pour remplacer l’éclairage de l’église doit désormais s’accélérer. Il ne s’agit plus d’un simple projet esthétique, mais d’un acte de foi : les églises doivent non seulement survivre, mais briller à nouveau.