Le 6 mai, date gravée à jamais dans l’héritage du plus ancien corps militaire du Vatican, fera à nouveau résonner l’écho d’un sacrifice séculaire, mais cette année avec un silence sans précédent au cœur de l’événement.
En 2025, la Garde suisse pontificale commémorera les 147 soldats qui ont péri en défendant le pape Clément VII lors du brutal sac de Rome en 1527. Traditionnellement célébrée par une cérémonie solennelle et par l’éclat coloré des nouvelles recrues jurant fidélité au Saint-Père, la commémoration de cette année se déroulera dans une atmosphère marquée par l’absence : le Vatican reste sans pape.
Le Saint-Siège étant inoccupé, les rituels publics hautement chorégraphiés normalement associés à la cérémonie annuelle de prestation de serment de la Garde ont été suspendus. À la place, une commémoration privée aura lieu dans les murs fortifiés de la caserne de la Garde Suisse, à l’abri des caméras et des foules, en se concentrant uniquement sur l’essence de leur mission indéfectible : fidélité, service et sacrifice.
À 11 heures, un hommage floral sera rendu au monument aux morts de la Garde, témoignage en granit de siècles de loyaux services rendus à la papauté. Le monument lui-même, niché dans la cour intérieure de la caserne, n’est pas seulement un symbole de la mort, mais aussi un symbole de la continuité de l’engagement qui s’étend des champs de bataille de la Renaissance au Vatican moderne.
Après l’hommage, le colonel Christoph Graf, commandant de longue date du corps, devrait prononcer un discours reflétant la gravité de cette journée qui, pour ses troupes, transcende les cérémonies et entre dans le domaine de la mémoire sacrée. Son discours rendra hommage au courage des 147 jeunes soldats suisses qui ont choisi de former un bouclier humain autour du pape il y a près de 500 ans, lui permettant ainsi de se mettre en sécurité alors qu’ils étaient massacrés par les forces impériales.
En temps normal, le 6 mai est aussi le jour où les nouvelles recrues – tous de jeunes hommes catholiques de nationalité suisse – lèvent la main et jurent de protéger le pape, même au prix de leur vie. Ce serment, prononcé devant les dignitaires du Vatican et les autorités suisses, est autant un rite de passage qu’une déclaration de loyauté. Cette année, ce moment fort n’aura pas lieu. L’absence de pape a nécessairement retardé la prestation de serment, une décision qui souligne le vide ecclésial unique laissé par la mort du pape François et le successeur qui n’a pas encore été élu.
La mission de la Garde suisse ne s’arrête pas pour autant pendant l’interrègne papal. Bien que leurs fonctions cérémonielles soient réduites, leur rôle dans la protection de la Cité du Vatican reste actif et vigilant. Pour un corps né à une époque de bouleversements, dont les fondements mêmes ont été forgés dans le creuset de la guerre et de la vulnérabilité papale, l’absence d’un pontife n’est pas une rupture mais un appel à la continuité.