L’Eglise suédoise est très petite mais elle est un signe pour l’œcuménisme et pour la société européenne sécularisée. C’est ce que souligne Mgr Anders Arborelius, évêque de Stockholm, le seul diocèse catholique en Suède, qui sera créé cardinal par le pape François le 28 juin 2017.
Dans un entretien à Zenit, le premier cardinal scandinave de l’histoire évoque la situation des catholiques dans son pays et sa futur mission auprès du pape.
ZENIT – Quelle a été votre première réaction lorsque vous avez appris votre nomination ? Est-ce important pour l’Eglise en Suède ?
Mgr Anders Arborelius – Ça a été un certain choc, je ne m’y attendais pas… Pour notre petite Eglise en Suède, cela compte beaucoup, car nous nous sentons plus unis au pape et à l’Eglise universelle. C’est historique, pour nous tous. Mais nous nous sentons aussi très humbles et petits parce que nous ne savons pas ce qu’est être cardinal, ce qu’il faut faire.
Beaucoup pensaient que tous les cardinaux devaient vivre à Rome. Mais je leur ai dit que le pape a nommé des cardinaux des périphéries : Mali, Laos, et maintenant, Suède… Dans l’Eglise catholique, nous sommes très petits et sans importance mais c’est sa façon de faire les choses.
Pourquoi le pape François a-t-il pensé à la Suède en particulier pour ce consistoire ?
Il était avec nous pour ce grand événement œcuménique [pour les 500 ans de la Réforme luthérienne, à Lund à l’automne 2016, ndlr], et nous avons eu des contacts avant. Il savait donc que nous existions.
Quels ont été les fruits de la visite du pape dans les villes suédoises de Mälmo et de Lund ?
Cela a encouragé la décision des catholiques et des luthériens à un niveau mondial de travailler ensemble plus intensivement pour trouver la bonne voie et cela a été un événement pour tout le monde chrétien, parce que les autres Eglises ont été très impressionnées du travail qui a été fait à la cérémonie. Pour la Suède, cela signifie que l’Eglise catholique fait désormais partie du paysage religieux. Nous ne sommes pas seulement une petite minorité d’étrangers de seconde classe mais nous appartenons à la société. Et je pense que pour beaucoup de catholiques, et pour beaucoup de chrétiens, c’était un signe très important que le pape soit reçu par les autorités, le roi, le gouvernement… cela a été un signe que nous appartenons à la société, que nous avons le droit d’être là.
En tant que premier cardinal de Suède, comment voyez-vous votre responsabilité, dans un environnement qui pense très différemment des catholiques sur certains thèmes sociaux ?
C’est vrai, nous sommes seulement une petite minorité. Et même si nous avons un cardinal, nous restons une très petite minorité. Mais je pense que la Suède est devenue une société multiculturelle, multireligieuse. Et je pense que les personnes sont plus ouvertes pour écouter d’autres voix. Dans une démocratie, nous devons nous écouter mutuellement, même si nous avons différents points de vue sur de nombreuses questions. D’une certaine façon, cela peut aider de voir que la Suède est une réalité pluraliste… et que les catholiques font partie de cette réalité, que nous ne sommes pas aussi étranges qu’on le pense peut-être, même si nous avons des points de vue qui sont généralement difficilement acceptés.
Pouvez-vous nous parler de la rencontre de l’archevêque luthérienne avec le pape François à l’audience générale du 14 juin ?
C’était une rencontre très symbolique car nous avons présenté au pape François une icône de saint François d’Assise. Et nous savons qu’il met le message de saint François au centre de son pontificat et dans son dialogue avec d’autres Eglises. Et nous savons aussi que saint François est très aimé par d’autres confessions. C’était une rencontre très brève, mais c’était symboliquement très important de montrer que nous devons travailler en commun … saint François est un bon symbole de cette amitié œcuménique qui est évidente dans la situation de la Suède.
Y a-t-iI d’autres rencontres œcuméniques prévues ?
Le Conseil permanent des Eglises de Suède sera présent au consistoire [28 juin, ndlr]. Ce qui montre que toutes les Eglises veulent travailler ensemble.
L’un de vos nouveaux devoirs est de conseiller le pape. Quelle sera votre participation ?
Je ne peux pas répondre à cette question car je ne sais pas vraiment comment et à quelle fréquence je suis sensé être à Rome. Si le Saint-Père souhaite écouter mes conseils, je serais très heureux de lui en faire part, parce que la Suède est considérée comme la partie la plus sécularisée de l’Europe et il est encore possible d’y construire l’Eglise et d’y vivre comme chrétiens… nous pouvons montrer au pape que l’Europe n’est pas la dernière dans le christianisme. Même dans notre coin du monde, il est possible de vivre comme chrétien et de susciter l’intérêt de personnes non-croyantes, de travailler avec d’autres voix chrétiennes en Suède sur de nombreux problèmes, comme les migrations, les réfugiés…
Traduction d’Anne Kurian
Icône de saint François d'Assise offerte par une délégation suédoise © L'Osservatore Romano
Suède: entretien avec le cardinal nommé Arborelius
Une Eglise très petite mais signe pour l’œcuménisme