Le pape demande de reconnaître les « capacités apostoliques et missionnaires » des personnes handicapées et avant tout « la valeur de leur « présence » ».
Le pape a en effet reçu en audience les participants d’un congrès de la Conférence épiscopale italienne sur le handicap, avec pour thème: « Et tu mangeras toujours à ma table » (2e livre de Samuel 9, 1-11), samedi 11 juin, au Vatican, dans la salle Paul VI, à midi. Le congrès était promu par le secteur pour la Catéchèse des personnes handicapées du Bureau national italien de catéchèse qui célébrait son 25e anniversaire (11-12 juin 2016).
Le pape François a mis de côté le texte prévu (ci-dessous) pour répondre librement aux questions de deux jeunes filles et d’un prêtre sur la peur de la diversité et l’exclusion. Il a remis aux participants son discours préparé.
Le pape a souligné entre autres que les personnes handicapées ont leur propre force apostolique: « Ces frères et sœurs – comme le montre aussi ce congrès – ne sont pas seulement capables de vivre une authentique expérience de rencontre avec le Christ, mais ils sont aussi capables d’en témoigner aux autres. Il a été fait beaucoup de choses dans le soin pastoral des personnes handicapées ; il faut aller de l’avant, par exemple en reconnaissant mieux leurs capacités apostoliques et missionnaires, et avant cela la valeur de leur « présence » en tant que personnes, en tant que membres vivants du Corps ecclésial. Dans la faiblesse et dans la fragilité se cachent des trésors capables de renouveler nos communautés chrétiennes. »
Voici notre traduction complète, de l’italien, du discours prévu par le pape François.
A.B.
Discours préparé par le pape François
Chers frères et sœurs,
Je vous accueille à l’occasion du 25ème anniversaire de l’institution du Secteur pour la catéchèse des personnes handicapées du Bureau Catéchétique National italien. Un événement qui stimule le renouvellement de l’engagement afin que les personnes handicapées soient pleinement accueillies dans les paroisses, dans les associations et dans les mouvements ecclésiaux. Je vous remercie pour les questions que vous m’avez adressées, qui montrent votre passion pour cet aspect de la pastorale. Elle réclame une double attention : la conscience de l’ « éducabilité » à la foi de la personne qui porte un handicap, même grave ou très grave ; et la volonté de la considérer comme un sujet actif de la communauté dans laquelle elle vit.
Ces frères et sœurs – comme le montre aussi ce congrès – ne sont pas seulement capables de vivre une authentique expérience de rencontre avec le Christ, mais ils sont aussi capables d’en témoigner aux autres. Il a été fait beaucoup de choses dans le soin pastoral des personnes handicapées ; il faut aller de l’avant, par exemple en reconnaissant mieux leurs capacités apostoliques et missionnaires, et avant cela la valeur de leur « présence » en tant que personnes, en tant que membres vivants du Corps ecclésial. Dans la faiblesse et dans la fragilité se cachent des trésors capables de renouveler nos communautés chrétiennes.
Grâce à Dieu, dans l’Église on observe une attention diffuse au handicap dans ses formes physiques, mentales et sensorielles, et une attitude générale d’accueil. Cependant nos communautés ont encore des difficultés à pratiquer une vraie inclusion, une participation pleine qui devienne finalement ordinaire, normale. Ceci demande non seulement des techniques et des programmes spécifiques, mais avant tout une reconnaissance et un accueil des visages, une certitude tenace et patiente que chaque personne est unique et singulière, et que chaque visage exclu est un appauvrissement de la communauté.
Même dans ce domaine l’engagement des familles est décisif, elles qui demandent non seulement d’être accueillies mais aussi stimulées et encouragées. Que nos communautés chrétiennes soient des « maisons » où chaque souffrance trouve compassion, où chaque famille avec son fardeau de douleurs et de fatigue puisse se sentir comprise et respectée dans sa dignité. Comme je l’ai observé dans l’Exhortation apostolique Amoris laetitia, « l’attention dédiée aussi bien aux migrants qu’aux personnes handicapées est un signe de l’Esprit. En fait les deux situations sont des paradigmes : elles mettent en jeux spécialement le mode dans lequel on vit aujourd’hui, la logique de l’accueil miséricordieux et de l’intégration des personnes fragiles » (n. 47).
L’admission aux sacrements des personnes handicapées occupe naturellement une place décisive sur le chemin de leur inclusion. Si nous reconnaissons la particularité et la beauté de leur expérience du Christ et de l’Église, en conséquence nous devons affirmer clairement qu’elles sont appelées à la plénitude de la vie sacramentelle, même en présence de graves dysfonctionnements psychiques. Il est triste de constater qu’en certains cas, demeurent des doutes, des résistances et même des refus. Souvent on justifie les refus en disant : « de toute façon, il ne comprend pas », ou bien : « il n’en a pas besoin ». En réalité, une telle attitude montre qu’on n’a pas compris vraiment le sens même des sacrements, en fait on nie aux personnes handicapées l’exercice de leur filiation divine et la pleine participation à la communauté ecclésiale.
Le sacrement est un don et la liturgie est vie : bien avant d’être comprise rationnellement, elle demande d’être vécue dans la spécificité de l’expérience personnelle et ecclésiale. En ce sens, la communauté chrétienne est appelée à agir afin que chaque baptisé puisse faire l’expérience du Christ dans les Sacrements. C’est pourquoi, que soit vive la préoccupation de la communauté pour faire en sorte que les personnes handicapées puissent expérimenter que Dieu est notre Père et qu’il nous aime, qu’il privilégie les pauvres et les petits à travers les gestes d’amour simples et quotidiens dont ils sont les destinataires. Ainsi que l’affirme le Directoire général pour les Catéchistes : « L’amour du Père pour ces fils les plus faibles et la présence continuelle de Jésus avec l’Esprit Saint donnent confiance que chaque personne, avec ses limites, est capable de grandir en sainteté » (n. 189).
Il est important de faire attention aussi à la place et à l’implication des personnes handicapées dans les assemblées liturgiques : être dans l’assemblée et donner son apport personnel à l’action liturgique par le chant et par des gestes significatifs, contribue à soutenir le sens d’appartenance de chacun. Il s’agit de faire grandir une mentalité et un style qui mettent à l’abri des préjugés, des exclusions et des marginalisations, en favorisant une fraternité effective dans le respect de la diversité appréciée en tant que valeur.
Chers frères et sœurs, je vous remercie pour ce que vous avez fait pendant ces vingt-cinq années de travail au service d’une communauté toujours plus accueillante et attentive aux derniers. Allez de l’avant avec persévérance et avec l’aide de la très Sainte Vierge Marie, notre Mère. Je prie pour vous et je vous bénis de tout cœur ; et vous aussi priez pour moi, s’il vous plaît.
© Traduction de Zenit, Hugues de Warren
Congrès de la CEI, 11 juin 2016, L'Osservatore Romano
Reconnaître les "capacités apostoliques et missionnaires" des personnes handicapées
25e anniversaire du Bureau italien de la catéchèse (traduction complète)