« Berceau des civilisations et lieu de naissance du judaïsme, du christianisme et de l’islam, le Moyen-Orient est devenu le théâtre d’une brutalité incroyable. Le mépris total du droit international humanitaire a atteint des niveaux alarmants d’inhumanité ». C’est la dénonciation de Mgr Bernardito Auza, observateur permanent du Saint-Siège aux Nations unies à New York, au Conseil de sécurité, le 19 octobre 2016.
Intervenant lors d’un débat ouvert sur « la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne », Mgr Auza a souhaité une reprise des négociations sérieuses, soutenant une nouvelle fois la solution à deux États, qui « détient la meilleure promesse » : « Si Israël et la Palestine ne sont pas d’accord pour exister côte à côte, réconciliés et souverains dans les frontières définies d’un commun accord et internationalement reconnues, la paix restera un rêve lointain et la sécurité une illusion ».
Mais, a poursuivi l’archevêque, la question palestinienne est à inclure dans le contexte de la crise au Moyen-Orient, où « les cadavres sous les ruines et les réfugiés errants » témoignent d’un « mépris cynique et du piétinement du droit international humanitaire ». Mgr Auza a dénoncé une « persécution barbare » contre les chrétiens et d’autres groupes minoritaires qui « sont au bord de l’anéantissement total » dans la région.
Le représentant du Saint-Siège a demandé au Conseil de sécurité d' »arrêter l’effusion de sang et la destruction » : « Les États soutenant des groupes de clients doivent arrêter le flux d’armes et de munitions dans la région. (…) Les hommes fous prêchant la haine et l’incitation à la violence au nom de Dieu doivent être arrêtés. Tous sont appelés (…) à une plus grande solidarité, de sorte que l’aide humanitaire et des programmes spécifiques pour les plus vulnérables puissent être assurés ».
« Les différences géopolitiques et le bruit des armes, a ajouté Mgr Auza, ne doivent pas arrêter le dialogue et les négociations ». Le dialogue « est encore possible et doit être poursuivi d’urgence, pour le bien du peuple de la Syrie et de tous les habitants de la région ».
AK
Déclaration de Mgr Auza
Monsieur le Président,
Ma délégation remercie la présidence de la Fédération de Russie de porter ce sujet du Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, à l’étage de cette Chambre et à l’attention de toute la communauté internationale.
Le mouvement progressif de la solution de deux États, proposée en 1947 par l’Organisation des Nations Unies pour ce qui était alors la Palestine sous le mandat britannique, est une cause de très grave préoccupation. L’effondrement en Avril 2014 des négociations de paix entre les deux parties a conduit à des actions négatives unilatérales et à des actes de violence, alimentés par la rhétorique inflammatoire des deux parties.
L’éloignement du processus de paix de Madrid et des Accords d’Oslo des années 1990 a servi à augmenter le niveau de frustration et de désespoir parmi le corps politique palestinien. Un gouvernement d’unité en Cisjordanie et à Gaza est essentiel pour faire avancer les négociations et apporter la paix et la prospérité à ce peuple, si lourdement dépendant de l’aide internationale pour les besoins élémentaires. Des briefings réguliers dans cette Chambre nous renseignent sur les difficultés financières de l’UNRWA (l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine), alors qu’il fait face à des besoins humanitaires toujours croissants.
Ma délégation tient à souligner encore une fois que, pour le Saint-Siège, la solution de deux États détient la meilleure promesse. Si Israël et la Palestine ne sont pas d’accord pour exister côte à côte, réconciliés et souverains dans les frontières définies d’un commun accord et internationalement reconnues, la paix restera un rêve lointain et la sécurité une illusion.
Monsieur le Président,
Bien que le centre du débat d’aujourd’hui soit de savoir comment inciter Israël et la Palestine à cesser de prendre des décisions unilatérales et des mesures indépendantes afin d’engendrer la reprise des négociations sérieuses, la question palestinienne ne peut qu’être considérée comme faisant partie de la crise au Moyen-Orient qui impacte toute la région et au-delà.
Berceau des civilisations et lieu de naissance du judaïsme, du christianisme et de l’islam, le Moyen-Orient est devenu le théâtre d’une brutalité incroyable. Le mépris total du droit international humanitaire a atteint des niveaux alarmants d’inhumanité. Les écoles, les hôpitaux, les convois humanitaires, les travailleurs humanitaires et les journalistes, et des villages et des villes entières ne sont plus des «dommages collatéraux»: Ils sont eux-mêmes devenus des cibles d’attaques aveugles. Les cadavres sous les ruines et les réfugiés errants sont un témoignage clair de ce mépris cynique et du piétinement du droit international humanitaire.
Le pape François a réitéré son appel à un cessez-le-feu à Alep et dans d’autres parties de la Syrie, en disant: «Avec un sentiment d’urgence, je renouvelle mon appel, plaidant de toute ma force auprès de ceux qui sont responsables pour un cessez-le-feu immédiat, qui soit imposé et respecté au moins pendant le temps nécessaire pour permettre l’évacuation des civils, en particulier les enfants, qui sont encore piégés sous les bombardements intenses « . [1]
Monsieur le Président,
Nous continuons à débattre dans cette Chambre et dans d’autres instances des Nations Unies, tandis que les chrétiens et les membres d’autres groupes ethniques et religieux minoritaires au Moyen-Orient sont au bord de l’anéantissement total. Les intentions des groupes terroristes et extrémistes de les bannir de la région sont incontestablement manifestes depuis le début de cette persécution barbare. Les témoignages et les traces de l’enracinement historique dans la région d’autres groupes ethniques et religieux chrétiens sont également en train d’être effacés, comme les églises, les monastères et monuments culturels et objets anciens ont été réduits à la poussière et aux gravats. Dans cette folie au-delà de toute compréhension ou croyance, beaucoup de membres des groupes majoritaires ont également été des victimes.
Monsieur le Président,
Mandaté pour maintenir la paix et la sécurité internationales, ce Conseil est appelé à diriger l’ensemble de la communauté internationale pour arrêter l’effusion de sang et la destruction. Les États soutenant des groupes de clients doivent arrêter le flux d’armes et de munitions dans la région. Les différences géopolitiques et le bruit des armes ne doivent pas arrêter le dialogue et les négociations. Les hommes fous prêchant la haine et l’incitation à la violence au nom de Dieu doivent être arrêtés. Tous sont appelés à participer à la promotion dans la région du respect des droits fondamentaux de l’homme, y compris la liberté de religion et d’expression. Tous sont appelés à une plus grande solidarité, de sorte que l’aide humanitaire et des programmes spécifiques pour les plus vulnérables puissent être assurés autant que possible dans le contexte de ces situations difficiles.
Ma délégation souhaite conclure par une pensée du pape François sur l’importance fondamentale du dialogue. «Le dialogue», a-t-il dit, « est ce qui crée la paix. Il est impossible pour la paix d’exister sans dialogue. Toutes les guerres, tous les conflits, tous les problèmes non résolus auxquels nous nous heurtons sont dus à un manque de dialogue. Quand il y a un problème, parlez : Cela rend la paix »[2].
Ce dialogue est encore possible et doit être poursuivi d’urgence, pour le bien du peuple de la Syrie et de tous les habitants de la région.
Je vous remercie, Monsieur le Président.
Traduction de Zenit, Constance Roques