Consultation féminine, dicastère de la culture © L'Osservatore Romano

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La présence des femmes au Vatican ne doit pas être "ornementale", entretien avec le card. Ravasi

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Un Conseil féminin au sein du Conseil pontifical pour la culture

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La présence des femmes au Vatican doit être promue, et elle ne doit pas être « ornementale ». C’est ce qu’a affirmé le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical pour la culture, dans un entretien avec ZENIT.
Le cardinal s’est exprimé en marge de la présentation du Conseil féminin institué par son dicastère, le 7 mars 2017. Il a expliqué qu’il avait voulu la création de ce nouvel organisme « en rose » pour donner aux activités du dicastère un « regard féminin », qui offre « des jugements que nous [les hommes], nous ne serions pas en mesure de formuler ».
« La fonction de ces femmes est une fonction réelle, a-t-il insisté, elles sont appelées à exprimer des jugements, elle m’ont déjà critiqué sur certaines propositions et elles en ont fait d’autres ».
Il a précisé que ce conseil ne naissait pas de « revendications » de « quotas roses » : « je ne l’ai pas voulu non plus comme un élément cosmétique, une ‘belle présence’ dans un horizon seulement masculin ». Les trente-sept femmes choisies seront en effet actives et écoutées.
S’adressant aux journalistes, le cardinal Ravasi a ensuite lancé une plaisanterie de l’écrivain d’origine polonaise, Joseph Conrad : « ‘Être femme est extrêmement difficile parce qu’il faut toujours avoir affaire aux hommes’. Et j’ajoute : avoir affaire aux prêtres, ce qui est encore plus grave ! ».
ZENIT – Pourriez-vous expliquer les critères selon lesquels les femmes du Conseil féminin du Conseil pontifical de la culture ont été choisies ?
Cardinal Ravasi – C’est une question importante parce que cela a peut-être été une des tâches les plus difficiles et exigeantes. J’ai pensé avant tout à la question internationale. Par conséquent il y a des femmes venant des États-Unis, d’Irlande, d’Iran, du Chili, de Turquie, etc. Deuxièmement, la question interreligieuse : différents « regards » sont représentés, surtout l’islam, le judaïsme, le christianisme, dans ses différentes formes, y compris le protestantisme. Le troisième critère a été celui des professions, des activités, privilégiant par exemple les femmes qui travaillent dans le milieu de la culture, par conséquent universités, femmes artistes, médecine, science mais de sorte que l’on couvre aussi d’autres univers comme le sport, par exemple Fiona May, pour avoir tout l’horizon des professions. Le quatrième critère est celui de l’expérience familiale. Il y a des femmes non mariées, mais aussi des femmes qui ont une famille, qui expérimentent donc comme toutes les femmes les problèmes de l’éducation des enfants, etc. Le dernier critère est celui de la sensibilité.
Que voulez-vous dire par « sensibilité », Éminence ?
Par exemple, pour la politique – parce que je voulais que soit aussi représentée la politique – j’ai choisi une personne qui s’est intéressée à la question du « déchet », c’est-à-dire du gaspillage de la nourriture, de la récupération de la nourriture qui, sinon, serait gaspillée, et nous parlons pour l’Italie comme pour le monde, d’un tiers de la nourriture produite. Et c’est aussi une personne qui s’intéresse au bénévolat, qui fait partie de la commission parlementaire qui s’occupe des réfugiés et ainsi de suite. D’autre part, je voulais aussi considérer la grande question de la pauvreté, des migrations, dans l’esprit du pape François. Nous pouvons dire que, dans le Conseil, sont aussi représentés ces thèmes, étant donné qu’il y a des femmes qui ont réalisé aussi des activités de type caritatif…
Que pense le pape de ce Conseil ? En avez-vous parlé ensemble ?
Oui, bien sûr, nous en avons parlé. Il partage beaucoup l’idée de ce Conseil, parce que depuis toujours il parle du manque de voix féminines à la Curie romaine. Nous savons qu’il existe des difficultés, les structures sont complexes, l’histoire passée est un peu « pesante » mais il faut commencer par quelque part. Et en effet, je le redis encore, parce que pour moi c’est très important, la présence des femmes du Conseil ne doit pas être une présence uniquement « ornementale », seulement parce qu’il doit y avoir forcément quelques femmes au Vatican, les quotas roses, comme ont dit d’habitude.
Il faut qu’il y ait de la place pour tous, et puis les personnes doivent entrer dans ces espaces avec leur compétence, non parce que ce sont des femmes ou des hommes qui entrent automatiquement comme dans le passé : c’était des hommes, donc ils entraient automatiquement à la Curie romaine, même sans aucune compétence, sans préparation…
C’est pourquoi je dis aussi : la fonction de ces femmes est une fonction réelle, elles sont appelées à exprimer des jugements, elle m’ont déjà critiqué sur certaines propositions et elles en ont fait d’autres ! Par exemple, à propos de la prochaine assemblée plénière du dicastère, sur neurosciences, intelligence artificielle, génétique, robotique, technologie de l’information etc., sur tous ces sujets, ces femmes ont exprimé, en tant que scientifiques et en tant que femmes, des jugements que nous, nous ne serions pas en mesure de formuler.
L’événement de l’ouverture de la prochaine assemblée plénière, qui est le moment le plus important de l’activité du dicastère, est organisé par le Conseil féminin. Il s’agira d’un spectacle télévisé auquel elles ont déjà commencé à travailler.
Ce groupe commence donc à s’activer, au sein du dicastère que vous présidez. Mais diriez-vous que ce Conseil féminin est une sorte d’ « expérimentation », y compris pour comprendre si quelque chose de semblable pourrait être institué par d’autres dicastères ?
Je l’espère, selon le principe de l’imitation… Et puis chacun a ses façons d’agir et de fonctionner. Mais je pense aussi que ce que le pape François disait est possible, à savoir que certaines fonctions dans les dicastères du Vatican soient remplies par des femmes, soient confiées à des femmes : je parle de femmes qui entreraient vraiment dans les dicastères. Je n’ai aucun « official », c’est-à-dire dans le langage de nos bureaux un « responsable », qui soit une femme. Les femmes se trouvent seulement en position de secrétaires, ou dans des positions administratives. Et c’est une erreur ! C’est pourquoi je pense au principe de l’imitation, pour l’avenir.
Traduction de Constance Roques

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Deborah Castellano Lubov

Deborah Castellano Lubov is Senior Vatican Correspondent for Zenit and its English edition. Author of 'The Other Francis,' now published in five languages, she gave a personal, in-depth look at the Holy Father, through interviews with those closest to him and collaborating with him, featuring the preface of Vatican Secretary of State, Cardinal Pietro Parolin. Lubov often covers the Pope's trips abroad, and often from the Papal Flight, where she has also asked him questions on the return-flight press conference on behalf of the English-speaking press present. Deborah Castellano Lubov, who also serves as NBC Vatican Analyst and collaborator, also has done much TV & radio commentary, including for NBC, Sky, EWTN, BBC, Vatican Radio, AP, Reuters and more. She also has written for various Catholic publications.

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