« Nature et histoire des archives de la Congrégation pour les causes des saints »: Simona Durante, archiviste de la Congrégation pour les causes des saints, publie dans L’Osservatore Romano, dans son édition en italien du 5 juin 2020, un long panorama sur l’histoire de ces archives qui recueillent « tous les documents du dicastère depuis son institution ».
Voici l’introduction de cette étude, dans notre traduction de l’italien.
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Nature et histoire des archives de la Congrégation pour les causes des saints
Les Archives de la Congrégation pour les causes des saints rassemble les documents du dicastère depuis l’origine de son institution. Avec la Constitution apostolique Immensa Aeterni Dei, à la fin du seizième siècle, Sixte V donnait une nouvelle ordonnance à la Curie romaine. Dans le but de collaborer à l’activité de gouvernement du pontife, il fonda quinze Congrégations. Parmi celles-ci, la cinquième était la Congrégation « pro sacris ritibus et caeremoniis », à laquelle fut confiée la double tâche de contrôler et réglementer toute la matière inhérente au culte liturgique et de traiter avec une compétence universelle les causes de canonisation des saints dont l’étude et la préparation avaient été jusque là confiées, séparément et par conséquent sans unité de critères, aux Auditeurs de la Rote romaine.
Les documents d’archives, comme on le sait, reflètent l’activité de l’institution qui les produit. C’est pourquoi, pour mieux en comprendre la nature, il semble opportun de signaler brièvement le parcours historique vécu par ce dicastère auquel avaient été attribuées de nombreuses compétences.
l était en particulier chargé de réglementer l’exercice du culte divin et les fonctions des chapelles papales et cardinalices, de soigner les corrections des livres liturgiques, de pourvoir aux nouvelles éditions, de définir toutes les questions relatives à la célébrations des fêtes des saints, d’approuver les calendriers et le propre des diocèses et des ordres ou congrégations religieuses, de décider du culte des reliques et des images des saints, de confirmer ou choisir les saints patrons locaux, nationaux, etc., d’accorder des privilèges sur l’usage des vêtements sacrés et des insignes ecclésiastiques dans les célébrations liturgiques, de résoudre les controverses relatives aux préséances ecclésiastiques, fixer le protocole pour la réception de souverains, princes, ambassadeurs et autres illustres personnages civils ou ecclésiastiques.
Quant à la compétence relative aux cérémonies, elle lui fut très rapidement enlevée (probablement aussi par Sixte V) et confiée au nouveau dicastère du Cérémonial auquel furent demandées des compétences en matière de soin accordé au cérémonial civil et des rites de la Chapelle papale. De sorte que le nom de la Congrégation fut transformé en Congrégation des rites sacrés.
Cette dernière avait donc des pouvoirs à la fois dans le domaine du contentieux et dans celui de l’administration, mais elle avait également de véritables pouvoirs législatifs au sens large, comme le confirmait un décret de 18466. Elle jouissait de la faculté d’émaner des décrets généraux ayant valeur de loi, y compris sans approbation pontificale préalable. Ses attributions et ses pouvoirs restèrent à peu près inaltérés jusqu’à la réforme de Pie X en 1908 même si, avec la fondation de la Congrégation de Propaganda Fide en 1622, toutes les questions liturgiques concernant les Eglises orientales passèrent au nouveau dicastère ; de même lui furent soustraites les compétences relatives aux reliques, avec l’institution de la Congrégation pour les indulgences et les reliques, créée par Clément IX en 1669 ; cette dernière compétence lui sera attribuée de nouveau pendant quelques années par Pie X, en 1904. Mais, comme nous l’avons souligné, c’est en 1908, avec la constitution apostolique Sapienti Consilio, que furent sensiblement réduites les prérogatives attribuées aux Rites.
La Congrégation perdit ainsi la faculté d’instruire certaines causes, tant dans le domaine du contentieux que sur le plan économique et administratif ; elle perdit la compétence à peine restituée en matière d’indulgences et le domaine de la discipline des sacrements se retrouva finalement limité aux prescriptions relatives au culte et aux rites. En 1914, le pape allait ensuite supprimer les trois commissions de prélats (pour la liturgie, l’histoire de la liturgie et pour la musique et le chant sacré) existant à l’intérieur même de la Congrégation.
Le 15 août 1967, Paul VI restructurera complètement le dicastère, en créant deux sections. La première, pour la liturgie, s’occupait des livres liturgiques de toute sorte de l’Eglise latine avec pour tâche de les revoir, de les corriger ou de les approuver, d’examiner et d’approuver les nouveaux offices divins et les calendriers diocésains et des ordres ou congrégations religieuses, de juger et de dissiper les doutes qui pouvaient surgir en matière de rites, favoriser les relations avec les Conférences épiscopales nationales et les instituts liturgiques ; enfin, elle était compétente en matière de culte non liturgique comme les pratiques pieuses du peuple chrétien.
Il existait ensuite une seconde section dite judiciaire qui était plus précisément chargée de la procédure de canonisation. Elle prenait connaissance des requêtes et évaluait l’opportunité de l’introduction des causes, s’occupait de la validité des actes mêmes, évaluait les écrits des serviteurs de Dieu et l’héroïcité des vertus, le martyre et l’ancienneté des cultes qui leur étaient rendus.
Cette section était compétente, en outre, pour juger après le rapport des médecins, les miracles éventuels dûs à l’intercession des serviteurs de Dieu.
En dépit de la complète restructuration à laquelle ce dicastère avait été soumis, avec la réforme de la Curie de 1967, il parut opportun à Paul VI, à moins de deux années de distance, de procéder, en vertu de la constitution apostolique Sacra Rituum Congregatio du 8 mai 1969, d’abolir la Sacrée Congrégation des rites, telle qu’elle était, pour élever au rang de deux dicastères autonomes les deux sections mentionnées. C’est ainsi que furent créées les actuelles Congrégations, l’une pour le culte divin et la discipline des sacrements, l’autre pour les causes des saints. Cette dernière est donc compétente pour traiter les causes des saints avec une exclusivité absolue pour toute l’Eglise.
Mais encore, quatorze ans plus tard, la Congrégation pour les causes des saints fera l’objet d’une réforme nouvelle et radicale de la part de Jean-Paul II, avec la constitution apostolique Divinus perfectionis magister du 25 janvier 1983. « Il nous a semblé très opportun, précisait le pape, de revoir à nouveau la procédure dans l’instruction des causes et de réordonner la Congrégation pour les causes des saints, afin de satisfaire aux exigences des experts et aux désirs de nos frères dans l’épiscopat, qui ont plus d’une fois sollicité une plus grande agilité de procédure tout en conservant cependant la solidité des recherches dans une affaire de cette importance. En outre, nous pensons qu’à la lumière de la doctrine sur la collégialité proposée par le concile Vatican II, il convient grandement que les évêques eux-mêmes soient davantage associés au Siège apostolique pour instruire les causes des saints. »
Les Archives de la Congrégation pour les causes des saints (anciennement Congrégation des rites) apparaissent et se développent dans cet ample contexte historique. Par conséquent, leur histoire s’inscrit dans la dynamique des événements qui ont impliqué la Congrégation au cours des siècles, de sa fondation jusqu’à nos jours. D’où l’exigence de résumer l’évolution historique du dicastère dans ce chapeau introductif, pour mieux comprendre le type de documents qui peuvent être trouvés dans les fonds des archives. Il s’agit donc plus spécifiquement de toutes les archives historiques de la Congrégation des rites, et des archives stockées et courantes, déposées chaque année par les différents services du dicastère.
Copyright – Traduction de Zenit, Hélène Ginabat