Coup de jeune sur le droit du Vatican et du Saint-Siège

Réforme du pape François

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Le Vatican abolit la peine à perpétuité et introduit dans son droit des délits et des crimes jusqu’ici désignés de façon générale: un ajustement d’une part interne, entre le droit du Saint-Siège et celui de l’Etat de la Cité du Vatican, et d’autre part une harmonisation avec le droit international, conséquence des conventions ratifiées, concernant notamment les droits de l’enfant, les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre.

Le pape François publie en effet ce 11 juillet un motu proprio sur la réforme du droit du Vatican, qui a été présenté en la salle de presse du Saint-Siège par le prof. Giuseppe Dalla Torre, président du Tribunal de l’Etat de la Cité du Vatican.

Les nouvelles normes entrent en vigueur au 1er septembre, et ne sont pas rétroactives: c’est la norme au pénal, et au civil, moyennant des exceptions.

Au fur et à mesure, tous les Etats adaptent leur droit aux délits et crimes de chaque époque, a-t-il expliqué.

Le droit du Vatican, réformé également au fil du temps par les papes pour les adapter aux  nouvelles exigences de chaque époque, remonte à 1889, puisque lors de la Constitution de l’Etat du Vatican, en 1929 (Pactes du Latran), le Vatican a adopté le droit du Royaume d’Italie, antérieur aux lois fascistes, a expliqué le juriste. 

Il rappelle en outre que dans ce petit Etat de 44 ha qu’est le Vatican passent chaque année quelque 20 millions de personnes: une situation unique au monde que la réforme prend en compte.

La réforme du pape François s’inscrit dans la suite de la réforme de Benoît XVI en 2010, mais n’est pas achevée. Le Père Federico Lombardi a aussi annoncé des mesures à venir pour adapter les normes du Vatican aux exigences de Moneyval, comité européen d’experts sur l’évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. 

Le pape explique la nécessité de cette réforme: « A notre époque, le bien commun est toujours plus menacé par la criminalité internationale et organisée, par l’utilisation impropre du marché et de l’économie, par le terrorisme. Il est donc nécessaire que la communauté internationale adopte des instruments juridiques qui permettent de prévenir et de lutter contre la criminalité, en favorisant la coopération judiciaire internationale en matière pénale ».

Par exemple, au niveau international, la réforme introduit la possibilité de l’extradition d’accusés ou de condamnés pour des délits liés au terrorisme à l’étranger, qui se seraient réfugiés dans l’Etat de la Cité du Vatican. Elle introduit en outre les délits de torture, des crimes contre l’humanité comme le génocide ou l’apartheid.

Elle offre aussi un filtre plus fin pour l’identification des délits et des crimes. Par exemple les violences contre les enfants relevaient auparavant des articles concernant les « violences » en général: le nouveaux articles les déclinent maintenant en commerce, prostitution, enrôlement, violence sexuelle, pédopornographie et détention de matériel pédopornographique.

Le vol se décline en vol de documents et délit de divulgation d’informations confidentielles,  après l’affaire Vatileaks.

Le motu proprio entérine une avancée de la réflexion juridique : les lois du Vatican abolissent la possibilité d’une peine à perpétuité remplacée par des peines de réclusion de 30 ou 35 ans.

Pourquoi ? Le prof. Dalla Torre souligne deux raisons reconnues par la réflexion actuelle des juristes internationaux: une telle peine est considérée aujourd’hui comme à la fois « inhumaine » et « inutile »: le but des peines est la réforme des personnes, or la réforme est rendue quasi impossible par la perspective de la perpétuité.

<p>Enfin, outre les « personnes physiques » – citoyens de l’Etat de la Cité du Vatican, employés, y compris à la curie, personnel du Saint-Siège, y compris les diplomates – le juge du Vatican pourra poursuivre, juger, sanctionner des « personnes juridiques »: des institutions dépendant du Vatican ou leurs employés qui seraient impliquées dans les activités criminelles.

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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