Salle Paul VI
Vendredi 24 octobre 2025
Question 1 :
Lors de la phase de mise en œuvre, comment les Églises locales, notamment en Afrique, peuvent-elles à la fois recevoir le soutien de l’Église universelle et l’inspirer, afin que nous marchions ensemble dans un esprit « d’échange des dons », en respectant le principe de subsidiarité dans le discernement local et sans imposer de modèles uniformes ni entraver l’initiative locale ?
Saint-Père :
Merci beaucoup, Père, pour ce que vous avez partagé sur le travail de la synodalité en Afrique. Tout d’abord, je souhaite saluer chacun de vous. Bonsoir. Buenas tardes !
Le premier mot que je voudrais dire – qui ne concerne pas seulement l’Église en Afrique mais nous tous ce soir – est mission et être missionnaire. Le processus synodal, comme nous l’a rappelé à plusieurs reprises le Pape François, a pour but d’aider l’Église à remplir sa vocation première dans le monde : être missionnaire, annoncer l’Évangile et témoigner de la personne de Jésus-Christ dans toutes les parties du monde et jusqu’aux extrémités de la terre. Comme le dit l’Évangile : prêcher, partager et vivre ce que Jésus nous a enseigné.
L’Église en Afrique a, à cet égard, beaucoup à offrir. Ce que vous avez dit sur le processus synodal nous aide à construire des ponts et à comprendre comment l’Église peut être un pont, surtout dans des cultures où les chrétiens ne sont pas majoritaires et vivent souvent aux côtés de membres d’autres religions, qu’il s’agisse de traditions régionales ou de religions mondiales telles que l’islam. Cela nous rappelle que ces contextes posent des défis, mais offrent en même temps de grandes opportunités.
Ce que la plupart d’entre nous avons expérimenté au cours des dernières années en préparation du Synode, et maintenant au début de cette nouvelle phase de mise en œuvre, c’est précisément que la synodalité, pour reprendre vos mots, n’est pas une campagne, c’est une manière d’être et une manière d’être pour l’Église. C’est une façon de promouvoir une attitude qui commence par apprendre à s’écouter les uns les autres.
Le don de l’écoute est quelque chose que nous reconnaissons tous, mais qui a souvent été perdu dans certains secteurs de l’Église. Nous devons continuer à découvrir sa valeur, en commençant par écouter la Parole de Dieu, les uns les autres et la sagesse que nous trouvons chez les hommes et les femmes, chez les membres de l’Église et aussi chez ceux qui cherchent la vérité, même s’ils ne sont pas encore – ou ne deviendront peut-être jamais – membres de l’Église.
Dans le contexte africain, certaines réalités représentent à la fois des défis et des dons, par exemple la jeunesse. Comparativement à l’Europe, un continent vieillit tandis que l’autre est rempli de jeunesse et de vitalité pour l’Église. Il y a aussi le don de la famille, si important. L’Église doit toucher les gens à travers les jeunes et les familles, devenant un instrument de construction de la paix et offrant des modèles, tant en Afrique – entre pays africains – que sur d’autres continents, pour des questions telles que la promotion de la paix et le soin de la création.
Nous devons être très clairs : nous ne recherchons pas un modèle uniforme et nous ne proposerons pas de gabarit imposant « ceci est la manière de faire » à chaque pays. Il s’agit plutôt d’une conversion à l’esprit d’être Église en étant missionnaire et en bâtissant la famille de Dieu. Merci.
Question 2 :
Le rôle des Équipes Synodales Continentales a été souligné tout au long du parcours synodal, notamment lors de la phase de mise en œuvre. Prévoyez-vous que le rôle des groupements d’Églises – telles que les Conférences Épiscopales Continentales, nationales ou régionales, et les Provinces Écclésiastiques – continue de croître dans la vie de l’Église ?
Saint-Père :
Permettez-moi d’abord de saluer Dr Susan. Elle et moi étions à la même table lors de la dernière session du Synode, et il est agréable d’être à nouveau à la même table avec vous. Bienvenue.
La réponse courte est oui. Je m’attends et j’espère que les différents groupements d’Églises continueront de croître comme expressions de communion, tirant parti des dons que nous recevons tous à travers cet exercice – cette « vie de la synodalité ».
Je veux donner un exemple concret. J’étais récemment en réunion avec un évêque de votre région, qui disait que le changement climatique est si urgent que, si les tendances actuelles se poursuivent, son pays disparaîtra en moins de 50 ans. Pendant ce temps, nous nous trouvons souvent dans le confort à réfléchir sur des sujets parfois théoriques. Mais écouter le cri urgent des peuples à travers le monde – pauvreté, injustice, changement climatique, etc. – nous rappelle qu’une réponse urgente est nécessaire.
J’espère donc que par le biais des Conférences Épiscopales, Provinces Écclésiastiques et Conférences Continentales, nous pourrons traiter ces questions spécifiques et faire une différence. L’Église a une voix et nous devons être courageux pour la faire entendre et transformer le monde.
Question 3 :
Que diriez-vous aux évêques et prêtres qui craignent que la synodalité n’affaiblisse leur autorité pastorale ? Comment mieux comprendre et promouvoir la coresponsabilité, la responsabilité et la transparence dans nos diocèses et paroisses ?
Saint-Père :
Merci beaucoup. La question se réfère à ce qui se passe au Canada et aux États-Unis, qui connaissent actuellement de grandes difficultés. Deux pays autrefois alliés peuvent parfois s’éloigner l’un de l’autre. Cela montre pourquoi la synodalité, l’écoute et le dialogue sont essentiels et ont des applications concrètes dans nos vies.
Les résistances viennent souvent de la peur et du manque de connaissance. Chaque rapporteur a identifié la formation comme une priorité. Il faut être clair et sincère sur l’importance de la formation à tous les niveaux. Sans formation adéquate – dans les écoles, séminaires, programmes de formation continue, formation des laïcs – il y aura toujours des résistances et un manque de compréhension.
Il faut aussi comprendre que nous n’avançons pas tous au même rythme. Plutôt que de laisser certains courir devant et d’en laisser beaucoup derrière, nous devons chercher des moyens concrets pour comprendre les réalités locales et encourager l’expérience de communion dans cette Église synodale.
Ainsi, beaucoup de structures existantes ont un grand potentiel pour devenir plus synodales. L’inclusion de tous – hommes et femmes, laïcs et clercs, religieux et religieuses – peut favoriser un véritable sentiment de coresponsabilité et de participation. Merci.
Question 4 [en français] :
Dans nos Églises orientales et dans les diocèses latins, quels changements urgents et conversions fondamentales sont nécessaires pour mettre réellement en pratique la synodalité dans nos organismes de participation au niveau paroissial, diocésain et dans les synodes orientaux, ainsi que dans nos instances de formation (séminaires, noviciats, formation des jeunes et des laïcs, écoles et universités catholiques…) ?
Saint-Père :
Sans exclure aucune autre région, si un endroit a aujourd’hui vraiment besoin de signes d’espérance, c’est le Moyen-Orient. L’un des signes d’espérance, déjà mentionné, est l’enthousiasme. Nous le trouvons dans les Églises du Moyen-Orient et parmi les chrétiens de la diaspora, dont la foi leur donne force, endurance et courage pour aller de l’avant malgré les pertes.
L’Église doit être un signe d’espérance authentique et une expression concrète de charité chrétienne, de fraternité, de soin mutuel, surtout pour ceux qui ont tout perdu à cause de la guerre et de la haine.
Il est essentiel de comprendre les différences entre l’Église latine et les Églises orientales et de les respecter. La formation reste fondamentale : « Conversation dans l’Esprit » permet de comprendre que participer au processus synodal, c’est participer à l’Église et apprendre à écouter l’Esprit Saint à travers la prière individuelle et communautaire.
Nous devons accompagner et soutenir nos communautés pour témoigner de Jésus-Christ, promouvoir le pardon et la réconciliation, et construire l’unité entre tous les peuples.
Question 5 :
Comment le processus synodal peut-il inspirer nos sociétés à être plus inclusives, justes et constructrices de paix ?
Saint-Père :
L’Église doit être reconnaissante pour ce qu’elle apprend de l’Amérique latine : foi, enthousiasme et esprit de communion. Le Jubilé est une invitation à la conversion, à la réconciliation et à la vie nouvelle en Jésus-Christ. Vivre cette spiritualité – écoute de la Parole, discernement de la présence de l’Esprit – inspire à être des constructeurs de paix et de communion.
Question 6 :
Quelles espérances légitimes peuvent nourrir les femmes dans une Église synodale ? La parité entre femmes et hommes pourra-t-elle devenir réalité ?
Saint-Père :
J’ai commencé par deux expériences personnelles : ma mère, très active dans la paroisse, et des religieuses au Pérou travaillant là où il n’y a pas de prêtres. Les obstacles sont surtout culturels et il faut reconnaître que tous les évêques ou prêtres ne permettent pas toujours aux femmes d’exercer pleinement leur rôle. La conversion des cultures, selon les valeurs de l’Évangile, est essentielle pour éliminer les discriminations et valoriser les dons de chacun.
Question 7 :
Quel message souhaitez-vous partager avec les Églises d’Asie pour encourager la conversion synodale ?
Saint-Père :
Je remercie l’Église en Asie pour son engagement malgré les défis : langues, cultures, distances géographiques, pauvreté. Le dialogue interreligieux est précieux et peut inspirer toute l’Église. La synodalité doit encourager le partage des ressources, la justice et l’égalité, tout en offrant un signe d’espérance pour l’Église en Asie.
























