Encyclique mater et magistra de Jean XXIII

Encyclique mater et magistra de Jean XXIII

Message du Saint-Père aux participants des villages Coldiretti

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Aux agriculteurs et entrepreneurs du secteur agricole

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Chers frères et sœurs,

Je vous salue cordialement, vous qui êtes réunis à Rome pour cette importante rencontre à laquelle participent des agriculteurs et des entrepreneurs du secteur agricole des différentes régions d’Italie.

Dans l’encyclique Mater et Magistra, saint Jean XXIII a voulu souligner la valeur enrichissante du travail agricole pour la promotion intégrale de la personne, tant sur le plan humain, comme moyen éminent d’épanouissement individuel et de développement communautaire, que sur le plan de l’esprit, comme participation à la réalisation du plan providentiel de Dieu dans l’histoire.

« Le travail agricole – a dit le Souverain Pontife – doit être conçu et vécu comme une vocation et comme une mission » [1], dans la mesure où il met en lumière la dimension « responsoriale » de l’appel de l’homme à faire progresser le Royaume des Cieux.

La création, en effet, a été voulue par Dieu comme un don et un héritage confié à l’homme [2]. Faite dans et par le Verbe éternel, elle n’est pas sortie des mains du Créateur déjà « achevée », mais « en devenir », c’est-à-dire ouverte et orientée vers un accomplissement. En la remettant à l’homme, comme un bien à garder, Dieu a voulu qu’il contribue à l’orienter vers la perfection à laquelle elle est destinée et qui sera atteinte à la fin des temps [3]. Répondre à l’invitation originelle et toujours actuelle de Dieu à faire germer et fructifier la terre, à la transformer avec respect et attention, signifie donc coopérer au projet initial de Dieu.

Le livre de la Genèse montre immédiatement comment, dans le travail agricole, l’homme s’est vu offrir la possibilité de se former à reconnaître dans la création le signe de l’alliance que Dieu avait conclue avec lui. Après avoir créé le ciel et la terre, le Seigneur s’est rendu compte que la terre était stérile et dénudée, sans herbe des champs, non seulement parce qu’il n’avait pas fait pleuvoir, mais aussi parce qu’il n’y avait personne pour travailler la terre, ni pour faire monter l’eau de la terre dans les canaux afin d’irriguer le sol (cf. Gn 2, 4-6). Dieu a donc modelé l’homme avec la poussière du sol, l’a animé de son souffle de vie et a planté un jardin merveilleux pour qu’il « le cultive et le garde » (Gn 2,15).

L’homme est appelé par Dieu à exercer intelligemment une activité technique à laquelle est associé un devoir de soin, non seulement matériel, mais aussi moral. Dans le récit de la Genèse, apprendre les lois de l’agriculture, construire des canaux pour modifier le cours des fleuves, sont des travaux à réaliser dans un double but : rendre la terre plus belle et plus féconde, tout en la rendant plus humaine, plus accueillante et plus hospitalière pour la vie de ses habitants. En travaillant, l’homme change le monde, mais il se change aussi lui-même en devenant plus responsable et plus généreux.

Le caractère laborieux et généreux du travail agricole se précise encore à la lumière de la révélation de l’Évangile du Christ : le commandement de Dieu de « dominer la terre » (Gn 1, 26) se décline comme une participation à la royauté du Seigneur crucifié et ressuscité, à la logique de l’amour qui devient service et libère le monde de la corruption et de l’éphémère du péché (cf. Rm 8, 19-20).

Nous assistons aujourd’hui au développement de nouvelles technologies, toujours plus efficaces et performantes, grâce auxquelles l’homme est en mesure d’accroître son pouvoir sur la nature, obligeant souvent la terre à porter des fruits. L’utilisation imprudente et coercitive de la technologie, appliquée à des rythmes de production non durables, soumise à des modèles de consommation homologués, est très coûteuse. La crise climatique que nous traversons actuellement en est la preuve : l’impact environnemental des rythmes intensifs adoptés jusqu’à présent a eu des répercussions négatives sur les cultures, créant des cercles vicieux dont il est de plus en plus difficile de se libérer. Plus nous maltraitons la terre, en polluant l’eau et l’air, plus nous réduisons la biodiversité, en coupant les forêts et en compromettant les écosystèmes, plus il devient difficile de faire face aux événements météorologiques instables. Cultiver la terre alors que les vagues de chaleur, les pluies torrentielles et les gelées froides soudaines se multiplient rend le travail agricole de plus en plus difficile.

Ce n’est pas seulement la nature qui en paie le prix, mais aussi les pauvres. C’est le paradoxe « scandaleux » de la culture du gaspillage : nous produisons suffisamment d’aliments pour nourrir l’ensemble de la population mondiale, mais la plupart d’entre eux vivent sans leur pain quotidien. Il est donc du devoir de tous d’éradiquer cette injustice par des actions concrètes et de bonnes pratiques, par des politiques locales et internationales qui ont le courage de choisir le juste et pas seulement l’utile, le pratique, le rentable [4]. Alors que vous réfléchissez à la manière de renforcer le caractère spécifique et la qualité des produits agroalimentaires italiens, je vous invite à vous souvenir de ceux qui n’ont pas les moyens de se nourrir.

S’il vous plaît, n’oublions pas les pauvres. Rêvons d’un monde où l’eau, le pain, le travail, les médicaments, la terre, le logement, sont des biens accessibles à chacun.

Je prie le Seigneur de vous insuffler tout le courage et l’ardeur nécessaires pour planter des graines de paix qui aideront à construire un monde plus fraternel, et j’implore Dieu, le dispensateur de tous les biens, de vous accorder d’abondantes bénédictions.

Rome, de Saint-Jean-de-Latran, 6 octobre 2023

François

 

[1] Jean XXIII, Lettre encyclique Mater et Magistra, n. 135.

[2] Cf. CEC, n. 299.

[3] Cf. CEC, n. 302.

[4] Cf. François, Message du Saint-Père à l’occasion du pré-sommet sur le « Sommet du système alimentaire 2021 », (Cité du Vatican, 26 juillet 2021).

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Rédaction

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