Assemblée plénière de la Commission des Épiscopats de l’Union européenne (COMECE)

Assemblée plénière de la Commission des Épiscopats de l’Union européenne (COMECE)

Pour le pape François, l’Europe a besoin d’une « inspiration forte »

Aux participants à l’Assemblée plénière de la COMECE

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« L’Europe a un avenir si elle est vraiment une union, et non une réduction, de pays avec leurs caractéristiques respectives », a déclaré le pape François devant des représentants des Conférences épiscopales catholiques des pays membres de l’Union européenne. Mais, a-t-il souligné, pour relever le « défi de l’unité dans la diversité », il faut « une inspiration forte ».

 

Le pape François a reçu en audience, ce jeudi 23 mars 2023, les participants à l’Assemblée plénière de la Commission des Épiscopats de l’Union européenne (COMECE) qui se tient à Rome du 22 au 24 mars. Le pape les a encouragés à « garder les yeux fixés sur les valeurs inspirantes du projet européen », à savoir les « “deux grands rêves“ des pères fondateurs de l’Europe : le rêve de l’unité et le rêve de la paix ».

Pour le pontife, la première tâche de l’Église dans ce domaine est de « former des personnes qui, lisant les signes des temps, sachent interpréter le projet européen dans l’histoire d’aujourd’hui ». Ce travail ne sera « fécond », a-t-il ajouté, que s’il « passionne les gens », s’il attire « les nouvelles générations », et s’il « implique » les « forces vives » de la société dans la construction d’un « projet commun ».

Le pape « venu du bout du monde » a également fait observer que le monde a besoin d’hommes et de femmes « animés par le rêve d’une Europe unie au service de la paix » et partageant le principe « éthico-politique » selon lequel « la guerre ne peut et ne doit plus être considérée comme une solution aux conflits ». Évoquant la guerre en Ukraine et la solidarité des pays voisins avec le peuple ukrainien, François a toutefois déploré le manque d’« engagement cohérent en faveur de la paix »

La COMECE est composée des Conférences épiscopales catholiques de tous les États membres de l’Union européenne (UE). Elle a été créée en 1980 avec l’approbation du Saint-Siège pour représenter les Conférences épiscopales de l’UE auprès des institutions européennes. Elle mène un dialogue avec les institutions de l’UE, apportant des contributions qui promeuvent le bien commun et une approche centrée sur l’homme dans les politiques de l’UE.

 

Discours du pape François

Chers frères et sœurs, bonjour, soyez les bienvenus !

Je remercie le nouveau président et lui souhaite beaucoup de succès dans son service. Je remercie de tout cœur le cardinal Hollerich. Il ne s’arrête jamais, il ne s’arrête jamais ! Je vous salue tous et vous remercie pour votre travail, qui est à la fois exigeant et passionnant, à condition de ne pas s’enliser dans la bureaucratie et de garder les yeux fixés sur l’horizon, sur les valeurs inspirantes du projet européen. C’est pourquoi je voudrais aujourd’hui m’arrêter brièvement avec vous sur deux points centraux, qui correspondent aux deux grands « rêves » des pères fondateurs de l’Europe : le rêve de l’unité et le rêve de la paix.

L’unité. Sur ce premier point, il est essentiel de préciser que l’unité européenne ne peut pas être une unité uniforme et homogénéisante, mais au contraire une unité qui respecte et valorise les singularités, les particularités des peuples et des cultures qui la composent. Pensez aux pères fondateurs : ils appartenaient à des cultures et à des pays différents : De Gasperi et Spinelli en Italie, Monnet et Schuman en France, Adenauer en Allemagne, Spaak en Belgique, Beck au Luxembourg, pour ne mentionner que les principaux. La richesse de l’Europe réside dans la convergence de différentes sources de pensée et d’expériences historiques. Comme un fleuve, elle vit de ses affluents. Si les affluents sont affaiblis ou bloqués, c’est tout le fleuve qui souffre et perd de sa force. L’originalité des affluents. Il faut la respecter : l’originalité de chaque pays.

C’est la première idée sur laquelle j’attire votre attention : l’Europe a un avenir si elle est vraiment une union, et non une réduction, de pays avec leurs caractéristiques respectives. Le défi est précisément celui-ci : l’unité dans la diversité. Et c’est possible s’il y a une inspiration forte ; sinon C’est l’appareil qui prévaut, c’est le paradigme technocratique qui prévaut, mais il n’est pas fécond parce qu’il ne passionne pas les gens, il n’attire pas les nouvelles générations, il n’implique pas les forces vives de la société dans la construction d’un projet commun.

Nous nous demandons quel est le rôle de l’inspiration chrétienne dans ce défi. Il ne fait aucun doute que dans la phase initiale, elle a joué un rôle fondamental, car elle était dans le cœur et l’esprit des hommes et des femmes qui se sont lancés dans l’aventure. Aujourd’hui, beaucoup de choses ont changé, bien sûr, mais il est toujours vrai que ce sont les hommes et les femmes qui font la différence. C’est pourquoi la première tâche de l’Église dans ce domaine est de former des personnes qui, lisant les signes des temps, sachent interpréter le projet européen dans l’histoire d’aujourd’hui.

Et c’est là que nous arrivons au deuxième point : la paix. L’histoire d’aujourd’hui a besoin d’hommes et de femmes animés par le rêve d’une Europe unie au service de la paix. Après la Seconde Guerre mondiale, l’Europe a connu la plus longue période de paix de son histoire. Cependant, plusieurs guerres se sont succédé dans le monde. Au cours des dernières décennies, certaines guerres se sont prolongées pendant des années, jusqu’à aujourd’hui, à tel point que l’on peut désormais parler d’une troisième guerre mondiale. La guerre en Ukraine est proche et a ébranlé la paix européenne. Les nations voisines ont tout mis en œuvre pour accueillir les réfugiés ; tous les peuples européens participent à l’effort de solidarité avec le peuple ukrainien. Cette réponse chorale sur le plan de la charité devrait s’accompagner – mais il est clair que ce n’est ni facile ni évident – d’un engagement cohérent en faveur de la paix.

Ce défi est très complexe, car les pays de l’Union européenne sont impliqués dans de multiples alliances, intérêts, stratégies, un ensemble de forces qu’il est difficile de rassembler en un seul projet. Cependant, un principe devrait être partagé par tous avec clarté et détermination : la guerre ne peut et ne doit plus être considérée comme une solution aux conflits (cf. Encyclique Fratelli tutti, 258). Si les pays de l’Europe d’aujourd’hui ne partagent pas ce principe éthico-politique, cela signifie qu’ils se sont éloignés du rêve initial. Si, en revanche, ils le partagent, ils doivent s’engager à le mettre en œuvre, avec tout l’effort et la complexité que la situation historique exige. Car « la guerre est un échec de la politique et de l’humanité » (ibid., 261). Il faut le redire aux hommes politiques.

La COMECE peut et doit également apporter sa valeur et sa contribution professionnelle à ce défi de la paix. Vous êtes par nature un « pont » entre les Églises en Europe et les institutions de l’Union. Vous êtes par votre mission des bâtisseurs de relations, de rencontres et de dialogue, ce qui contribue déjà à la paix. Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi de la prophétie, de la clairvoyance, de la créativité pour faire avancer la cause de la paix. Sur ce chantier, nous avons besoin d’architectes et d’artisans, mais je dirais que le véritable bâtisseur de paix doit être à la fois architecte et artisan. C’est ce que je souhaite également à chacun d’entre vous, sachant bien que chacun a ses charismes personnels, qui contribuent, avec ceux des autres, à l’œuvre commune.

 

Chers amis, je vous exprime à nouveau ma gratitude et je vous assure que je prie pour vous et pour votre service. Je me suis arrêté aujourd’hui sur ces deux points centraux, qui sont particulièrement urgents, mais je vous encourage à poursuivre votre travail du côté de l’Église, comme toujours. Que la Vierge Marie veille sur vous et vous soutienne. Je vous bénis tous de tout cœur et vous demande de prier pour moi. Merci.

 

© Traduction de Zenit

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Hélène Ginabat

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