Face au « témoignage » d’une personne, qui est « un message de la part de Jésus », le pape François met en garde contre un écueil, fréquent « aujourd’hui » : « nous cherchons une autre explication, nous ne voulons pas changer, nous cherchons une issue plus élégante que d’accepter la vérité », dénonce-t-il.
Le pape François s’est présenté à la fenêtre du studio du Palais apostolique du Vatican pour la prière de l’angélus, comme tous les dimanches, le 19 mars, à 12h. Une foule de quelque 25 000 pèlerins et touristes, indique la Gendarmerie vaticane, était rassemblée Place Saint-Pierre pour se joindre à la prière du pontife de 86 ans. Il a expliqué l’évangile du jour, le récit de la guérison par Jésus d’un aveugle de naissance.
Commentant les différentes attitudes des personnages décrits dans le passage de l’évangile de saint Jean, face à une guérison opérée par Jésus, le pape François a invité ses auditeurs à s’imaginer au cœur de la scène et à se positionner : « quelle est notre position, qu’aurions-nous dit alors ? Et surtout, que faisons-nous aujourd’hui ? », a-t-il interrogé. « Savons-nous, comme l’aveugle, voir le bien et être reconnaissants pour les dons que nous recevons ? ».
Et de poursuivre l’examen de conscience : est-ce que « nous témoignons de Jésus » comme l’aveugle guéri ? Est-ce que « nous nous associons » aux « critiques », « soupçons » et « ragots » comme les disciples ? Est-ce que « nous nous laissons enfermer par la peur » des « tièdes de cœur », comme les parents de l’aveugle ? Demandons, a conclu le pape, la grâce de « nous émerveiller » des dons de Dieu et de voir les difficultés de la vie « comme des occasions de faire le bien ».
Paroles du pape François avant l’angélus
Chers frères et sœurs, bonjour !
Aujourd’hui, l’évangile nous montre Jésus qui rend la vie à un homme aveugle de naissance (cf. Jn 9,1-41). Mais ce prodige est mal accueilli par un certain nombre de personnes et de groupes. Regardons dans les détails.
Mais auparavant, je voudrais vous dire ceci : aujourd’hui prenez l’évangile de Jean et lisez vous-mêmes ce miracle de Jésus, la façon dont Jean le raconte est très belle. Chapitre 9, il se lit en deux minutes. Il nous fait voir comment Jésus s’y prend et comment se comporte le cœur humain : le cœur humain bon, le cœur humain tiède, le cœur humain craintif, le cœur humain courageux. Chapitre 9 de l’évangile de Jean. Faites-le aujourd’hui, cela vous aidera beaucoup. Et de quelle manière les personnes accueillent-elles ce signe ?
Il y a tout d’abord les disciples de Jésus qui, devant l’aveugle-né, se mettent à faire des commérages : ils se demandent si c’est la faute de ses parents ou la sienne (cf. v.2). Ils cherchent un coupable ; bien souvent, nous tombons dans cette attitude, qui est tellement commode : chercher un coupable, au lieu de se poser les questions exigeantes de la vie. Et aujourd’hui, nous pouvons dire : que signifie pour nous la présence de cette personne, quelle question suscite-t-elle en nous ? Ensuite, après la guérison, les réactions augmentent. La première est celle des proches, qui sont sceptiques : « Cet homme a toujours été aveugle : ce n’est pas possible qu’il voit maintenant, cela ne peut être lui ! C’est quelqu’un d’autre » : le scepticisme (cf. v. 8-9). Pour eux, c’est inacceptable, mieux vaudrait tout laisser comme c’était avant (cf. v.16) et ne pas se mêler de ce problème. Ils ont peur, ils craignent les autorités religieuses et ne se prononcent pas (cf. v.18-21). Toutes ces réactions révèlent des cœurs fermés devant le signe de Jésus, pour des raisons diverses : parce qu’ils cherchent un coupable, parce qu’ils ne savent pas s’émerveiller, parce qu’ils ne veulent pas changer, parce qu’ils sont bloqués par la peur. Et tant de situations, aujourd’hui, ressemblent à celle-ci ! Face à quelque chose qui est justement le témoignage d’une personne, qui est un message de la part de Jésus, nous tombons dans cet écueil : nous cherchons une autre explication, nous ne voulons pas changer, nous cherchons une issue plus élégante que d’accepter la vérité.
Le seul qui réagisse bien, c’est l’aveugle : heureux de voir, il témoigne le plus simplement possible de ce qui lui est arrivé : « J’étais aveugle et maintenant, j’y vois » (v.25). Il dit la vérité. Auparavant, il était obligé de demander l’aumône pour vivre et il était l’objet des préjugés des gens : « il est pauvre et aveugle de naissance, il doit souffrir, il doit payer pour ses péchés ou pour ceux de ses ancêtres ». Maintenant, libre dans son corps et dans son esprit, il rend témoignage à Jésus : il n’invente rien et ne cache rien. « J’étais aveugle et maintenant, j’y vois ». Il n’a pas peur de ce que diront les autres : il a déjà connu le goût amer de la marginalisation, pendant toute sa vie, il a déjà senti le poids de l’indifférence et du mépris des passants, de ceux qui le considéraient comme un rebut de la société qui, au mieux, servait à susciter la pitié à l’origine de quelque aumône. Maintenant qu’il est guéri, il ne craint plus ces comportements méprisants, parce que Jésus lui a donné toute sa dignité. Et cela, c’est clair, c’est toujours ce qui se produit : lorsque Jésus nous guérit, il nous rend notre dignité, la dignité de la guérison de Jésus, totale, une dignité qui vient du fond du cœur et qui prend toute la vie ; et un samedi, devant tout le monde, Jésus l’a libéré et lui a donné la vue sans rien lui demander, pas même un merci, et lui, il rend témoignage. C’est cela, la dignité d’une personne noble, d’une personne qui se sait guérie et qui se remet, qui renaît ; cette renaissance à la vie dont on parlait aujourd’hui à [l’émission] « A sua immagine » : renaître.
Frères et sœurs, avec tous ces personnages, l’évangile de ce jour nous place nous aussi au cœur de la scène, de telle sorte que nous nous interrogions : quelle est notre position, qu’aurions-nous dit alors ? Et surtout, que faisons-nous aujourd’hui ? Savons-nous, comme l’aveugle, voir le bien et être reconnaissants pour les dons que nous recevons ? Je m’interroge : comment est ma dignité ? Comment est ta dignité ? Est-ce que nous témoignons de Jésus ou bien est-ce que nous répandons des critiques et des soupçons ? Sommes-nous libres face aux préjugés ou est-ce que nous nous associons à ceux qui répandent négativité et ragots ? Sommes-nous heureux de dire que Jésus nous aime et qu’il nous sauve, ou bien, comme les parents de l’aveugle-né, est-ce que nous nous laissons enfermer par la peur de ce que penseront les autres ? Les tièdes de cœur qui n’acceptent pas la vérité et n’ont pas le courage de dire : « Non, c’est ainsi ». Et encore, comment accueillons-nous les difficultés et l’indifférence des autres ? Comment accueillons-nous les personnes qui ont toutes ces limites dans la vie ? Qu’elles soient physiques, comme pour cet aveugle, ou sociales, comme les mendiants que nous rencontrons dans la rue ? Et cela, est-ce que nous l’accueillons comme une malédiction ou comme une occasion de nous faire proches d’eux avec amour ?
Frères et sœurs, demandons aujourd’hui la grâce de nous émerveiller tous les jours des dons de Dieu et de voir les différentes circonstances de notre vie, même les plus difficiles à accepter, comme des occasions de faire le bien, comme l’a fait Jésus à l’égard de l’aveugle. Que la Vierge Marie nous y aide, avec saint Joseph, homme juste et fidèle.
© Traduction de Zenit