Messe du 1er janvier 2022, Saint-Pierre © Vatican Media

Messe du 1er janvier 2022, Saint-Pierre © Vatican Media

« L’étonnement de Dieu, la rencontre, te donnent la paix »

Homélie du pape François lors de la messe en la solennité de Marie, Mère de Dieu, à l’occasion de la Journée mondiale de la paix

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Basilique Saint-Pierre
Dimanche 1er janvier 2023 

Sainte Mère de Dieu ! C’est la joyeuse acclamation que le peuple saint de Dieu fit résonner dans les rues d’Éphèse en l’an quatre cent trente et un, lorsque les Pères du Concile proclamèrent Marie Mère de Dieu. Il s’agit d’un élément essentiel de la foi, mais surtout, d’une très belle nouvelle : Dieu a une Mère. Il s’est donc lié pour toujours à notre humanité, comme un enfant avec sa maman, si bien que notre humanité est aussi son humanité. Cette vérité est bouleversante et consolante à tel point que le dernier Concile, célébré ici, a affirmé : « Par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. Il a travaillé avec des mains d’homme, Il a pensé avec une intelligence d’homme, Il a agi avec une volonté d’homme, Il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, Il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché » (Const. past. Gaudium et spes, n. 22). Voilà ce que Dieu a fait en naissant de Marie : Il a montré son amour concret pour notre humanité, en l’étreignant vraiment et pleinement. Frères et sœurs, Dieu ne nous aime pas en paroles, mais par des actes ; non pas “d’en haut”, de loin, mais “de près”, du dedans de notre chair, parce que, en Marie, le Verbe s’est fait chair, parce que, dans la poitrine du Christ, un cœur de chair continue de battre, palpitant pour chacun de nous !

Sainte Mère de Dieu ! De nombreux livres et de grands traités ont été écrits sur ce titre. Mais ces mots sont surtout entrés dans le cœur du saint peuple de Dieu, dans la prière la plus familière et la plus intime qui accompagne le rythme des journées, les moments les plus fatigants et les espérances les plus audacieuses : le Je vous salue Marie. Après quelques phrases tirées de la Parole de Dieu, la deuxième partie de la prière s’ouvre ainsi : “Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs”. Cette invocation rythme souvent nos journées et permet à Dieu de s’approcher, à travers Marie, de nos vies et de notre histoire. Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs : récitée dans les langues les plus diverses, sur les grains du chapelet et dans les moments de nécessité, devant une image sacrée ou dans la rue, la Mère de Dieu répond toujours à cette invocation, elle écoute nos demandes, nous bénit avec son Fils dans les bras, nous apporte la tendresse de Dieu fait chair. En un mot, elle nous donne de l’espérance. Et nous, en ce début d’année, nous avons besoin d’espérance comme la terre a besoin de pluie. L’année qui s’ouvre sous le signe de la Mère de Dieu, qui est la nôtre, nous dit que la clé de l’espérance c’est Marie, et l’antienne de l’espérance c’est l’invocation Sainte Mère de Dieu. Et aujourd’hui, confions à la Mère Très Sainte le bien aimé Pape émérite Benoît XVI afin qu’elle l’accompagne dans son passage de ce monde à Dieu.

Prions la Mère de façon particulière pour les enfants qui souffrent et qui n’ont plus la force de prier, pour tant de frères et sœurs touchés par la guerre dans de nombreuses parties du monde, et qui vivent ces jours de fête dans l’obscurité et le froid, dans la misère et la peur, plongés dans la violence et l’indifférence ! Pour ceux qui n’ont pas la paix, acclamons Marie, la femme qui a mis au monde le Prince de la Paix (cf. Is 9, 5; Gal 4, 4). En elle, Reine de la Paix, se réalisera la bénédiction que nous avons entendue dans la première Lecture : « Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix ! » (Nb 6, 26). Par les mains d’une Mère, la paix de Dieu veut entrer dans nos maisons, dans nos cœurs, dans notre monde. Mais comment faire pour l’accueillir ?

Laissons-nous conseiller par les acteurs de l’Évangile d’aujourd’hui, les premiers à avoir vu la Mère avec l’Enfant : les bergers de Bethléem. C’étaient des gens pauvres et peut-être même plutôt rudes. Ils travaillaient cette nuit-là. Ce sont précisément eux, pas les sages ni les puissants, qui ont reconnu les premiers le Dieu proche, le Dieu qui est venu pauvre et qui aime être avec les pauvres. L’Évangile souligne avant tout deux gestes très simples des bergers, mais qui ne sont pas toujours faciles à faire. Ils sont allés et ils ont vu. Deux gestes : aller et voir.

Tout d’abord, aller. Le texte dit que les bergers « se hâtèrent d’y aller » (Lc 2, 16). Ils ne sont pas restés immobiles. Il faisait nuit, ils avaient leurs troupeaux à garder et ils étaient certainement fatigués. Ils auraient pu attendre l’aube, attendre que le soleil se lève pour aller voir un Enfant couché dans une mangeoire. Au contraire, ils se hâtèrent d’y aller parce que, devant les choses importantes, il faut réagir rapidement, sans remettre à demain ; parce que « la grâce de l’Esprit ne souffre pas de lenteur » (S. Ambrose, Commentaire de saint Luc, 2). Et c’est ainsi qu’ils ont trouvé le Messie, celui qui était attendu depuis des siècles et que tant de personnes cherchaient.

Frères et sœurs, pour accueillir Dieu et sa paix, on ne peut pas rester immobile, on ne peut pas rester à son aise, en attendant que les choses s’améliorent. Il convient de se lever, saisir les occasions de grâce, aller, prendre des risques. Il faut prendre des risques. Aujourd’hui, en ce début d’année, au lieu de rester assis à penser et à espérer que les choses changent, il serait bon de se demander : “Moi, où est-ce que je veux aller cette année ? Vers qui vais-je aller faire du bien ?”. Tant de personnes, dans l’Église et dans la société, attendent le bien que toi, et toi seul, peux donner, ton service. Et face à la paresse qui anesthésie, et à l’indifférence qui paralyse, face au risque de nous limiter à rester assis devant un écran, les mains sur un clavier, les pasteurs nous provoquent aujourd’hui à aller, à nous émouvoir de ce qui se passe dans le monde, à nous salir les mains pour faire du bien, à renoncer à nombre d’habitudes et de conforts pour nous ouvrir aux nouveautés de Dieu qui se trouvent dans l’humilité du service, dans le courage du soin. Frères et sœurs, imitons les bergers : allons !

Une fois arrivés, dit l’Évangile, les bergers « découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire » (v. 16). Puis il souligne que c’est seulement « après l’avoir vu » (v. 17) qu’ils se mirent, pleins d’étonnement, à parler de Jésus aux autres et à glorifier et louer Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu (cf. v. 17-18, 20). Le changement s’est produit dans le fait de l’avoir vu. Il est important de voir, d’embrasser du regard, de se tenir, comme les bergers, devant l’Enfant dans les bras de sa Mère. Sans rien dire, sans rien demander, sans rien faire. Regarder en silence, adorer, accueillir avec les yeux la tendresse consolante du Dieu fait homme et de sa Mère qui est la nôtre. En ce début d’année, parmi les nombreuses nouveautés dont nous voudrions faire l’expérience et les nombreuses choses qu’il faudrait faire, prenons le temps de voir, c’est-à-dire d’ouvrir les yeux et de les garder ouverts sur ce qui compte : Dieu et les autres. Ayons le courage de ressentir l’étonnement de la rencontre, qui est le style de Dieu, chose bien différente de la séduction du monde qui nous tranquillise. L’étonnement de Dieu, la rencontre, te donnent la paix ; l’autre ne fait que t’anesthésier et te donner de la tranquillité.

Combien de fois, pris par la hâte, nous n’avons même pas le temps de nous arrêter une minute en compagnie du Seigneur pour écouter sa Parole, pour prier, adorer, louer… La même chose se produit à l’égard des autres : pris par la hâte et par les tâches, il n’y a plus de temps pour écouter la femme, le mari, pour parler aux enfants, leur demander comment ils se sentent en eux-mêmes, et pas seulement comment vont les études et la santé. Et comme il est bon de se mettre à l’écoute des personnes âgées, du grand-père et de la grand-mère, pour regarder la profondeur de la vie et redécouvrir les racines. Demandons-nous donc si nous sommes capables de voir celui qui vit à côté de nous, celui qui vit dans notre immeuble, celui que nous rencontrons tous les jours dans la rue. Frères et sœurs, imitons les bergers : apprenons à voir ! À comprendre avec le cœur en voyant. Apprenons à voir.

Aller et voir. Aujourd’hui, le Seigneur est venu parmi nous et la Sainte Mère de Dieu le met devant nos yeux. Retrouvons, dans l’élan d’aller et dans l’émerveillement de voir, les secrets pour rendre cette année vraiment nouvelle et vaincre la sècheresse de rester immobile ou la fausse paix de la séduction.

Et maintenant frères et sœurs, je vous invite tous à regarder la Vierge. Acclamons-la trois fois : Sainte Mère de Dieu, comme le faisait le peuple d’Éphèse.

Sainte Mère de Dieu ! Sainte Mère de Dieu ! Sainte Mère de Dieu !


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Pape François

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