Mgr Marco Mellino © capture de Zenit / ASB /Vatican Media

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« Predicate Evangelium » par Mgr Marco Mellino (1/2)

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Présentation de la nouvelle constitution apostolique

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Mgr Marco Mellino, secrétaire du Conseil des cardinaux, est intervenu au cours de la conférence de presse de présentation de la nouvelle Constitution apostolique Prêchez l’Evangile. Sur la Curie romaine et son service rendu à l’Eglise dans le monde (Praedicate Evangelium) qui s’est tenue ce lundi matin 21 mars 2022, dans la salle de presse du Saint-Siège.

Nous avons publié une première présentation du document samedi dernier, 19 mars, jour de sa publication, pour le 9e anniversaire de l’inauguration du pontificat du pape François, en la solennité de S. Joseph (19 mars 2013).

Les 16 dicastères ont désormais le même degré d’autorité, mais il y a une « triade de tête » significative: Evangélisation, Doctrine de la foi, Charité, explique entre autres Mgr Mellino.

Il souligne en outre que désormais les chefs des dicastères peuvent être des laïcs, hommes et femmes, et plus seulement des cardinaux ou des évêques: leur autorité vient du mandat du pape, de l’autorité de la mission canonique reçue, en fonction de leurs compétences, pour servir, et non pas d’un pouvoir d’ordre et hiérarchique. Mais les dicastères qui nécessitent l’ordination ont un responsable ordonné (Tribunal de la Signature apostolique, Congrégation pour le clergé…etc).

C’est « en vertu du mandat et des indications précises que les Congrégations générales, tenues dans les jours précédant le Conclave, avaient spécifiés pour le nouveau Pontife à élire », a rappelé Mgr Mellino, que le pape François, assisté du Conseil des cardinaux, « a discuté et réfléchi longuement sur cet aspect, avec l’intention précise de proposer la révision de la Constitution apostolique Pastor Bonus. »

Voici notre traduction intégrale de l’intervention de Mgr Marco Mellino, faite en italien (Ière partie).

HG/AB

Intervention de Mgr Marco Mellino (Ière partie)

 

  1. Elaboration du texte

 

Dans l’exhortation apostolique Evangelii gaudium, le pape François écrit : « La papauté et les structures centrales de l’Eglise universelle ont également besoin d’écouter l’appel à une conversion pastorale » (1). Dans cet esprit et avec cette intention précise, et aussi en vertu du mandat et des indications précises que les Congrégations générales, tenues dans les jours précédant le Conclave, avaient spécifiés pour le nouveau Pontife à élire, le Saint-Père, ces dernières années, assisté du Conseil des Cardinaux (2), a discuté et réfléchi longuement sur cet aspect, avec l’intention précise de proposer la révision de la Constitution apostolique Pastor Bonus. Il a écouté les observations, avis, suggestions et demandes des chefs des dicastères de la Curie romaine, en les rencontrant personnellement lors des sessions du Conseil des cardinaux, mais aussi en tenant des réunions inter-dicastères et un Consistoire des cardinaux (12 et 13 février 2015). Il a également pris en compte les avis et suggestions des épiscopats locaux et d’autres personnes (3). Ainsi, avec le Conseil des cardinaux, une vision d’ensemble a mûri, qui s’est progressivement concrétisée dans un projet de réforme, dont le texte promulgué est le résultat. Il est le fruit d’un processus d’élaboration qui a vu un certain nombre d’étapes franchies en accord avec le principe selon lequel « une Église synodale est une Église qui écoute » (4).

 

Presque cinq ans après le début des travaux (28 septembre 2013), les différentes considérations mûries à travers les réflexions et les discussions abordées dans les sessions du Conseil des cardinaux ont conduit à la rédaction d’un premier projet (daté de septembre – décembre 2018) qui, dans la rédaction de ses différentes parties, outre le choix d’une parfaite continuité avec la Constitution apostolique Pastor Bonus, contenait les critères et les principes directeurs du nouveau cadre constitutionnel.

 

Ce texte a fait l’objet d’une révision attentive et de discussions lors des sessions de février et d’avril 2019 du Conseil des cardinaux, puis a été soumis pour consultation à tous les supérieurs des dicastères et des instituts de la Curie romaine et des institutions liées au Saint-Siège. Il a également été envoyé à toutes les Conférences épiscopales, aux Patriarcats et aux Églises archiépiscopales majeures, aux Représentations pontificales, à toutes les Universités pontificales présentes à Rome et à certaines de celles présentes sur les différents continents, indiquées personnellement par le Saint-Père, ainsi qu’à certaines Agences d’information choisies pour les zones continentales et linguistiques.

 

Après avoir recueilli toutes les observations et propositions reçues de la consultation mentionnée ci-dessus, le Saint-Père et le Conseil des cardinaux, dans les sessions de juin et septembre 2019, ont examiné, discuté et voté chaque amendement, arrivant ainsi à un texte qui a été à nouveau soumis à la consultation de certains chefs de dicastères de la Curie romaine au mois d’octobre 2019, et a été envoyé aux cardinaux résidant à Rome au mois de janvier 2020 pour qu’ils donnent leur avis accompagné d’éventuelles suggestions.

 

Tous les amendements reçus dans le cadre de cette deuxième consultation ont à nouveau fait l’objet d’un examen, d’une discussion et d’un vote, en partie lors de la réunion du Conseil des Cardinaux qui s’est tenue en février 2020 et ceux qui restaient à examiner, les réunions prévues n’ayant pas pu avoir lieu en raison de la pandémie, l’ont été par voie électronique. Le résultat de leurs travaux a été un projet de texte, daté du 8 juin 2020, remis par les cardinaux du Conseil au Saint-Père.

 

Depuis, tout a été soumis à l’examen du Pape qui, à partir de juillet 2020, a examiné personnellement les modifications, en tenant compte des observations, des indications et des propositions reçues et en faisant ses propres choix, en tant que Législateur suprême.

Le résultat de cette élaboration est le texte qui a été soumis à l’examen de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et du Conseil Pontifical pour les Textes Législatifs, le 16 septembre 2020, en demandant un avis global sur celui-ci, ainsi que les observations spécifiques et circonscrites qui seraient considérées comme appropriées, tant sur les aspects doctrinaux que juridiques.

 

Les institutions curiales susmentionnées ont envoyé les informations demandées et, avec l’aide de leur contribution compétente, le Saint-Père est parvenu à la formulation finale du texte, qui a été promulgué le 19 mars 2022, en la solennité de saint Joseph, époux de la Vierge Marie, et qui entrera en vigueur le dimanche 5 juin 2022, en la solennité de la Pentecôte.

 

  1. Une « pièce » qui complète la réforme de la Curie romaine

 

Ces dernières années, alors que lui-même et le Conseil des cardinaux étudiaient le projet de révision de la Constitution apostolique Pastor Bonus, le pape François a mis en place diverses mesures de réforme (5) ; le texte de la nouvelle Constitution apostolique fait donc partie de ces mesures mises en œuvre jusqu’à présent. Il s’ajoute à celles-ci, démontrant que l’œuvre de réforme est plus large que le seul texte de la Constitution en question, qui en fait partie. D’une part, il s’agit donc d’une pièce dans une mosaïque plus vaste et plus articulée. Mais d’autre part, il est également vrai qu’avec ce texte, la réforme de la Curie romaine trouve sa forme complète.

 

Certaines de ces mesures concernaient la création ou la réorganisation d’organes au sein même de la Curie romaine, que le texte promulgué a intégrés. Il s’agit :

 

– de la section de la Secrétairerie d’Etat pour le personnel diplomatique du Saint-Siège (6)

– de la constitution en deux sections du Dicastère pour la Doctrine de la foi (7)

– de la Commission pontificale pour la protection des mineurs (8)

– du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie (9)

– du Dicastère pour le Service du développement humain intégral (10)

– du Dicastère pour la Communication (11)

– du Conseil pour l’économie

– du Secrétariat à l’économie (12),

– du Bureau du réviseur général (13),

– de la Commission pour les affaires réservées (14)

– du Comité pour les investissements (15),

– de l’insertion de la Chapelle musicale pontificale au sein du Bureau des célébrations liturgiques du souverain pontife (art. 233 $ 2) (16).

En ce qui concerne les institutions reliées au Saint-Siège : l’Autorité de supervision et d’information financière (17).

 

  1. Le titre est révélateur d’une perspective

 

Le titre de la Constitution en question – Praedicate Evangelium (tiré de l’expression de Mc 16,15 : le mandat confié par le Seigneur ressuscité à ses disciples) – fait référence à l’évangélisation « tout court » et indique la perspective dans laquelle le texte a été élaboré : l’activité missionnaire (18). Ce choix s’explique à la lumière de l’exhortation apostolique Evangelii gaudium – à laquelle il est intentionnellement lié – qui reste le document indispensable pour comprendre le processus de réforme que le pape François est en train de mener et qui indique clairement que le cœur de la réforme part de ce qui est la première et la plus importante tâche de l’Église : l’évangélisation. Saint Paul VI a déclaré que « l’évangélisation est la grâce et la vocation propres de l’Église, son identité la plus profonde. Elle existe pour évangéliser » (19). Il s’ensuit que la dimension missionnaire doit être capable de transformer toutes les structures ecclésiales. Le pape François lui-même a affirmé : « La réforme des structures, qui exige une conversion pastorale, ne peut être comprise que dans ce sens : faire en sorte qu’elles deviennent toutes plus missionnaires » (20) ; sinon la réforme ne serait qu’une réorganisation du système fonctionnel ecclésiastique (21).

 

Étant donné que l’activité missionnaire, « l’Église en sortie », est l’axe principal qui structure le texte de la Constitution apostolique en question, ceci explique la création du Dicastère pour l’Évangélisation et l’ordre de position qui lui est assigné au Chapitre V concernant les dicastères.

 

Afin d’éviter des malentendus, il convient de préciser que tous les dicastères jouissent d’une égale dignité juridique (22) et que tous exercent un pouvoir de juridiction, donc l’ordre de leur place dans la liste n’a pas de valeur juridique en soi, mais – au moins pour les trois premiers – il est tout de même significatif. Par conséquent, le choix d’attribuer au Dicastère pour l’Évangélisation l’ordre de préséance rend explicite la perspective missionnaire dans laquelle la vision générale de la réforme curiale a été réalisée.

 

Il ne s’agit en aucun cas de placer l’activité d’évangélisation avant la foi au Christ elle-même (en plaçant le Dicastère pour la doctrine de la foi après le Dicastère pour l’évangélisation). Ce choix se comprend bien à la lumière du changement d’époque qui se produit historiquement et qui demande inévitablement à l’Église d’affronter de nouveaux défis, en se projetant vers de nouvelles frontières aussi bien dans la première mission ad gentes, que dans la nouvelle évangélisation des peuples qui ont déjà reçu l’annonce du Christ (23). Le Saint-Père l’a clairement affirmé dans un passage de son Discours à la Curie romaine en 2019 : « Lorsque [la Congrégation pour la doctrine de la foi et la Congrégation pour l’évangélisation des peuples] ont été instituées, on était à une époque où il était plus simple de distinguer deux versants assez bien définis : un monde chrétien d’une part et un monde encore à évangéliser d’autre part. Maintenant, cette situation n’existe plus… Par conséquent nous avons besoin d’un changement de mentalité pastorale, ce qui ne signifie pas passer à une pastorale relativiste… Tout cela implique nécessairement également des changements et un déplacement d’attention dans les dicastères mentionnés ci-dessus ainsi que dans toute la Curie » (24).

 

Cette priorité et cette centralité de l’évangélisation sont également soulignées par le choix délibéré du pape d’être lui-même le président du Dicastère pour l’évangélisation (25), et que chacune des deux sections qui le composent (la Section pour les questions fondamentales de l’évangélisation dans le monde et la Section pour la première évangélisation et les nouvelles Églises particulières) soit dirigée en son nom et par son autorité par un Pro-préfet.

 

Enfin, il est significatif que, dans l’ordre établi, le Dicastère pour l’évangélisation soit suivi du Dicastère pour la doctrine de la foi et du Dicastère pour le service de la charité, qui non seulement se soutiennent, mais forment, chacun selon sa propre compétence, un tout dans l’action missionnaire à laquelle la Curie romaine est appelée et constituent une triade qui « donne son cachet » à l’ensemble du texte de la Constitution apostolique. À la lumière de cette vision d’ensemble, dans laquelle l’esprit du service de la Curie a été reconsidéré, on comprend pourquoi il a été décidé d’élever l’Aumônerie apostolique au rang de Dicastère (26).

 

(A suivre)

NOTES

(1) Pape François, Exhortation apostolique Evangelii gaudium, 32, in AAS 105 (2013), pp. 1033 – 1034.

(2) Annoncé le 13 avril 2013 et institué par Chirographe le 28 septembre 2013 pour conseiller le Saint-Père dans le gouvernement de l’Eglise universelle (in AAS 105 [2013], pp. 875 – 876).

(3) Cf. Pape François, Discours à la Curie romaine, 22 décembre 2016, in AAS 109 (2017), p. 43, note 30.

(4) Pape François, Discours pour le cinquantième anniversaire de l’institution du Synode des évêques, 17 octobre 2015, in AAS 107 (2015), pp. 1138 – 1144.

(5) Cf. Pape François, Discours à la Curie romaine, 22 décembre 2016, in AAS 109 (2017), pp. 44- 48. La liste sera mise à jour avec les mesures qui seront prises dans les années à venir.

(6) Comuniqué de la Secrétairerie d’Etat du 21 novembre 2017.

(7) Motu proprio Fidem servare, du 11 février 2022.

(8) Chirographe du 22 mars 2014.

(9) Motu Proprio Sedula Mater, du 15 août 2016.

(10) Motu Proprio Humanam progressionem, du 17 août 2016.

(11) Motu Proprio Le contexte actuel de la communication, du 27 juin 2015. Erigé avec la dénomination de Secrétariat pour la Communication, avant d’être renommé Dicastère.

(12) Avec le Motu Proprio Fidelis dispensator et prudens, du 24 février 2014, ont été également érigés le Secrétariat pour l’économie et le Conseil pour l’économie. Avec le Motu Proprio du 8 juillet 2014, la Section ordinaire de l’administration du patrimoine du Siège apostolique a été transférée au Secrétariat pour l’économie. Avec le Motu Proprio Les biens temporels, du 4 juillet 2016, la règle de la séparation des organes de contrôle et des organes contrôlés étant de la plus haute importance, les domaines de compétence respectifs du Secrétariat pour l’économie et de l’Administration du patrimoine du Siège apostolique ont été mieux délimités. Le 28 décembre 2020, avec le Motu proprio Una migliore organizzazione, a été converti en loi ce qui avait déjà été indiqué dans la lettre du 25 août 2020 adressée au Secrétaire d’État concernant le transfert des fonctions économiques et financières de la Secrétairerie d’État à l’Administration du patrimoine du Saint-Siège, pour la gestion, et au Secrétariat à l’Économie, pour le contrôle.

(13) Motu proprio Fidelis dispensator et prudens, du 24 février 2014.

(14) Instituée le 29 septembre 2020.

(15) Communiqué du Saint-Siège, du 15 décembre 2021.

(16) Motu Proprio Circa la Cappella Musicale Pontificia, du 17 janvier 2019.

(17) L’Autorité d’Information financière (A.I.F.), instituée par Benoît XVI par le Motu Proprio du 30 décembre 2010 pour la prévention et la lutte contre les activités illégales dans les domaines financiers et monétaires, a été consolidée avec le Motu Proprio du 15 novembre 2013. Avec le Chirographe du 5 décembre 2020, les nouveaux Statuts, changeant le nom et les compétences de l’A.I.F. en Autorité de Supervision et d’Information financière (ASIF), ont été renommés et approuvés. L’Agence du Saint-Siège pour l’évaluation et la promotion de la qualité des université et facultés ecclésiastiques, érigée par Benoît XVI avec le Chirographe du 19 septembre 2007, a également été incluse, sans faire l’objet de nouvelles révisions.

(18) Le titre avait déjà été implicitement suggéré dans le communiqué de la salle de presse du Saint-Siège du 25 avril 2018, dans lequel il était précisé que, parmi les différents thèmes qui composeraient le nouveau document, il convenait de tenir compte du fait que l’annonce de l’évangile et l’esprit missionnaire seraient la perspective caractérisant l’activité de toute la Curie romaine. Par la suite, le titre a été communiqué, pour la première fois, dans le briefing du 12 septembre 2018. Enfin, dans son discours à la Curie romaine, le 21 décembre 2019, le pape François a déclaré : « Et alors, nous inspirant de ce Magistère des Successeurs de Pierre depuis le Concile Vatican II jusqu’aujourd’hui, on a pensé proposer pour l’instruenda nouvelle Constitution apostolique sur la réforme de la Curie romaine, le titre de Praedicate evangelium. C’est-à-dire l’attitude missionnaire. »

(19) Paul VI, Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), 14, in AAS 68 (1976), p. 13.

(20) Pape François, Exhortation apostolique Evangelii gaudium, 27, in AAS 105 (2013), p. 1031.

(21) Cf. Pape François, Discours aux évêques responsables du Conseil épiscopal latino-américain (C.E.L.A.M.) à l’occasion de la réunion générale de coordination, 28 juillet 2013, in AAS 105 (2013), p. 698, n. 3. Cf. PE, Préambule, nn. 2 e 3.

(22) PE, art. 12 § 1.

(23) Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Redemptoris missio, 30, in AAS 83 (1991), p. 276.

(24) Pape François, Discours à la Curie romaine, 21 décembre 2019.

(25) Cf. PE, art. 54.

(26) Dans la Constitution apostolique Pastor bonus c’était une institution liée au Saint-Siège (cf. PB, art. 193).

 

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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