Mgr Follo, 28 juin 2020 © Anita Sanchez

Mgr Follo, 28 juin 2020 © Anita Sanchez

« Jésus guérit le corps et sauve l’âme », par Mgr Francesco Follo

Lectures du dimanche 27 juin 2021

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« La foi ne se réduit pas à l’adhésion de l’intelligence et abandon de la volonté. (…) Elle est relation avec Dieu, de personne à personne, mettant en jeu l’intelligence, l’affectivité et la volonté », explique Mgr Francesco Follo dans ce commentaire des lectures de dimanche prochain, 27 juin 2021.

L’Observateur permanent du Saint-Siège à l’UNESCO, à Paris, « la foi est le fil rouge qui unit ces deux miracles, une foi qui non seulement guérit et redonne la vie, mais sauve en donnant à la vie toute sa plénitude ».

Comme lecture patristique, Mgr Follo propose un sermon de S. Pierre Chrysologue « pour Dieu, la mort est un sommeil ».

AB

 

Jésus guérit le corps et sauve l’âme

Prémisse : la foi.

La Parole de Jésus n’a pas seulement le pouvoir de vaincre la tempête de la mer (Évangile de dimanche dernier), mais le mal, la maladie et la mort (Évangile de ce dimanche). La foi en lui nous donne son propre pouvoir de vie : il nous guérit de tout mal, physique et spirituel, et nous donne une nouvelle vie dans l’amour qui plus forte que la mort. La foi « touche » lui, qui est amour et vie, comme l’a fait la femme qui perdait son sang (donc au lieu de donner sa vie, elle perdait la vie), ou d’être touchée par lui comme la petite fille qui a perdu la vie et est ressuscitait par lui, comme nous le rappelle l’Évangile d’aujourd’hui. Ce passage évangélique nous montre que la foi s’exprime dans la prière, qui peut être faite par un geste (la femme touchant le bord du manteau du Chris sans des mots. Le geste de cette femme est comme un cri (prière) exprimé avec humilité et en cachette, est un geste de confiance et d’imploration.

Le geste du chef de la synagogue se manifeste par des mots par lesquelles il demande à Jésus la santé pour sa fille. Ce sont deux manières de dialogue avec le Christ dans la foi qui se fait communion. La foi ne se réduit donc pas à l’adhésion de l’intelligence et abandon de la volonté. La foi n’est pas d’abord l’assentiment, l’adhésion à un ensemble de croyances. Elle est relation avec Dieu, de personne à personne, mettant en jeu l’intelligence, l’affectivité et la volonté : elle est la prière, dans laquelle Dieu parle et l’homme lui répond La foi est l’acte de se confier au Christ et de suivre le chemin salutaire qu’il a tracé.

 

         1) Une foi qui guérit et sauve.

Le long passage de l’Evangile de ce dimanche relate deux miracles encastrés l’un dans l’autre : la guérison d’une femme souffrant de pertes de sang, et la résurrection de la fille du chef de la synagogue, Jaïre. La foi est le fil rouge qui unit ces deux miracles, une foi qui non seulement guérit et redonne la vie, mais sauve en donnant à la vie toute sa plénitude.

Comme dit le pape François: « À l’homme qui souffre, Dieu ne donne pas un raisonnement qui explique tout, mais il offre sa réponse sous la forme d’une présence qui accompagne, d’une histoire de bien qui s’unit à chaque histoire de souffrance pour ouvrir en elle une trouée de lumière » (Lumen Fidei, 57).

En effet, l’épisode évangélique du jour montre que Jésus partage la douleur de Jaïre,  un des chefs de synagogue,  dont la fille de 12 ans est gravement malade, et qu’il partage les souffrances de la femme malade.

Arrêtons-nous un instant sur cette scène. Jaïre, qui a entendu parler des guérisons de Jésus,  sans se préoccuper ni de sa position sociale ni de son rôle influent, se jette aux pieds du Nazaréen et le supplie instamment de venir imposer ses mains sur sa petite fille pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. Jésus accepte et se dirige vers la maison de Jaïre. Mais voilà que dans la foule qui les écrasait de toute part, s’avance une femme, souffrant depuis 12 ans de fortes pertes de sang ; la pauvrette avait dépensé tout ce qu’elle avait chez les médecins sans obtenir la moindre amélioration, au contraire  son état avait plutôt empiré.

Le miracle de la guérison de la femme souffrant de pertes de sang aurait été parfait pour souligner la puissance de Jésus. Il lui avait suffi de toucher son vêtement pour guérir. Mais saint Marc ne s’arrête pas là, il veut attirer l’attention aussi sur la stupeur des disciples : «  Tu vois bien la foule qui t ‘écrase et tu demandes : « Qui m’a touché ? ».

Pourquoi Jésus donne-t-il de l’importance au geste  de cette femme  qui ne veut pas se faire remarquer et touche à peine le manteau que Jésus a sur le dos? Il faut savoir que la loi de Moïse déclarait impure la femme qui avait des pertes de sang, et celui qui la touchait devenait impur. Voilà pourquoi la femme touche le vêtement de Jésus en cachette, profitant de la foule, et pourquoi elle se sent si coupable, est si pleine de crainte et si tremblante, quand on la découvre. Et c’est la seule raison pour laquelle Jésus fait savoir ce qui se passe : pour déclarer publiquement, devant tout le monde, que d’avoir été touché par la femme ne fait pas de lui un homme impur, que la foi va au-delà de ce qui est pur et impur selon la loi. Ainsi, publiquement, le Sauveur dit à la femme qui lui a «  volé » le miracle: « Va en paix, ta foi t’a sauvée ».

La foi est au centre également de la guérison de Jaïre : «  Ne crains pas, crois seulement ». Croire en la puissance de Jésus, une puissance capable de t’atteindre là où tu es, dans ta situation du moment, victorieuse jusque dans la mort. Mais dans ce récit Marc souligne un autre détail: «  La petite fille n’est pas morte, elle dort ». Le grand miracle c’est la victoire sur la mort, comme nous le rappelle le psaume: «  Le Seigneur te guérit de toute maladie, il réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse  » (103,3-4). En effet, le salut ne serait pas entier s’il n’était pas pour toujours.

Jésus, après avoir démenti les paroles des hommes, qui avaient dit que l’enfant était morte, et après les avoir tous envoyés dehors, donne un nouveau nom à la mort. Sa parole est plus importante que celle des hommes. La Parole de Dieu redonne la vie, la donne à jamais.

 

2) LA FOI: une question d’intelligence et de cœur, une manière de vivre et pas seulement de penser.

Comme nous le voyons, ce n’est pas tant sur les deux miracles que porte l’attention mais sur la foi de ceux qui les demandent. La foi est indispensable au miracle. Jésus ne fait pas de miracles pour forcer, à tout prix, le cœur de l’homme. Les miracles sont des signes qui servent la foi, mais ils ne diminuent pas le courage de croire. Les miracles sont un don, une réponse à la sincérité et à la pureté du cœur de l’homme qui cherche le Seigneur et mendie la guérison du corps et de l’âme.

Jésus n’accomplit pas de miracles, là où les hommes prétendent fixer eux-mêmes les façons d’agir de Dieu. Le miracle est la libre réponse de Dieu à la mendicité de la créature humaine.

Hélas, souvent nous sommes aveugles devant tant de signes que Dieu accomplit, nous n’avons pas le cœur ouvert pour les déchiffrer et le courage de nous décider, alors nous nous excusons et en prétendons d’autres. Nous demandons de nouveaux signes, toujours de nouveaux signes, et pendant ce temps-là nous ne voyons pas les nombreux signes que Dieu a déjà semés – de sa propre initiative – le long du chemin de l’histoire et de notre vie.

Nous devons demander mais d’un cœur pur et avec componction. Le mot «  componction » devient très expressif si nous pensons à son étymologie: il signifie en effet brûlure provoquée par une piqure. Cette brûlure qui provoque en nous l’amour de Dieu manifesté en Jésus touche notre cœur de pécheur. La componction ne renvoie ni au sens de la faute ni aux scrupules, mais à l’amour, car elle vient de la considération que Dieu nous aime et que «  le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs » (Rm, 5, 8).

Le contraire de la peur ce n’est pas le courage, c’est la foi. L’important est de persévérer  et de faire grandir cette foi en nous. Même quand le doute nous assaille, même si notre foi n’a rien d’héroïque, laissons la Parole de Dieu habiter notre cœur, laissons le Nom du Christ monter à nos lèvres avec cette même obstination qu’ont les amoureux.

La foi est un acte très humain, vital, qui tend vers la vie et s’oppose à la mort. La foi est un acte de l’intelligence et un abandon de la volonté, qui nous colle à Dieu comme un enfant colle au sein de sa mère, puis comme des enfants au cœur sevré par leur mère nous restons dans les bras de Dieu pleins de confiance.

« La foi est proprement une réponse au dialogue de Dieu et à sa Parole, à sa Révélation.

C’est le  » oui  » qui permet à la pensée divine d’entrer dans la nôtre.

La foi est un acte qui se fonde sur le crédit que nous faisons au Dieu vivant, c’est l’acte d’Abraham qui croyait à Dieu et qui obtint par là son salut.

La foi est un acte et de conviction et de confiance qui envahit toute la personnalité du croyant et engage sa manière de vivre. » (Paul VI, novembre 1966).

Il est donc juste de nous demander, aujourd’hui, jusqu’où va notre foi : s’il s’agit d’une attitude superficielle qui ne donne aucun crédit à Sa toute puissance ou «  une manière de vivre Dieu ».

Les Vierges consacrées dans le monde témoignent que la foi est une manière de vivre Dieu. Leur vie de vierges est un témoignage de l’amour de Dieu et une manifestation de la sagesse du cœur reçue de Jésus Christ. En se donnant totalement à Dieu ces femmes «  prêchent l’Evangile de la Virginité », selon lequel « la foi n’est pas un objet de décor, un ornement ; vivre la foi n’est pas orner la vie d’un peu de religion » (Pape François), mais c’est un critère de base pour vivre vraiment. Avec humilité et une foi amoureuse, les Vierges consacrées dans le monde se sont données  au Christ, dont elles écoutent la Parole avec constance grâce à une lecture assidue de la bible et avancent dans le monde comme évangile de la Virginité «  afin d’aimer le Christ avec ardeur et aider les frères plus librement et avec plus de dévouement » (Préambule du Rituel de la consécration des Vierges). C’est pourquoi l’exhortation apostolique Vie consacrée leur attribue une sorte de « magistère spirituel » qui fait d’elles des sortes «  d’expertes en vie spirituelle » (Vie consacrée, n. 55). Elles nous apprennent à vivre la foi avec le cœur, à écouter sa Parole.

Traduction de Zenit, Océane Le Gall

Lecture Patristique: S. Pierre Chrysologue (+ 450)

Sermon 34, 1.5; CCL 24, 193.197-199 :

pour Dieu, la mort est un sommeil

Jésus regagna en barque l’autre rive, et une grande foule s’assembla autour de lui. Il était au bord du lac. Arrive un chef de synagogue, nommé Jaïre. Voyant Jésus, il tombe à ses pieds et le supplie instamment: « Ma petite fille est à toute extrémité. »

Toute lecture d’évangile nous est d’un grand profit aussi bien pour la vie présente que pour la vie future. Mais plus encore l’évangile de ce jour, car il contient la totalité de notre espérance et bannit tout motif de désespoir.

Mais venons-en au chef de la synagogue qui conduisit le Christ auprès de sa fille, et donna en même temps l’occasion à une femme (qui souffrait d’hémorragie) de venir trouver Jésus. Ainsi commence la lecture de ce jour: Voici qu’un chef s’approcha. Il se prosternait devant Jésus en disant: « Ma fille est morte à l’instant, mais viens lui imposer la main, et elle vivra » (Mt 9,18)2.

Le Christ connaissait l’avenir et n’ignorait pas que cette femme viendrait à sa rencontre. C’est elle qui ferait comprendre au chef des Juifs que Dieu n’a pas besoin de se déplacer, qu’il n’est pas nécessaire de lui montrer le chemin ni de solliciter sa présence physique. Il faut croire, au contraire, que Dieu est présent partout, qu’il y est avec tout son être et pour toujours. Qu’il peut tout faire sans peine en donnant un ordre, qu’il envoie sa puissance sans la transporter; qu’il met la mort en fuite par un commandement sans bouger la main; qu’il rend la vie en le décidant, sans recourir à la médecine.

Ma fille est morte à l’instant, mais viens. Ce qui signifie: « Son corps conserve encore la chaleur de la vie et des traces visibles de son âme; son esprit ne l’a pas encore quittée; la famille garde encore son enfant; le royaume des morts ne la reconnaît pas encore pour sienne. Viens donc vite retenir son âme prête à partir. »

L’insensé! Il ne croyait pas que le Christ pourrait ressusciter une morte, mais seulement la retenir. Aussi, dès que le Christ arriva à la maison et vit que les gens pleuraient la jeune fille comme une morte, il voulut amener à la foi leurs coeurs incrédules. Comme eux pensaient qu’on ne pouvait pas ressusciter d’entre les morts plus facilement que sortir du sommeil, le Christ déclara que la fille du chef (de la synagogue) était endormie et non pas morte. La jeune fille n’est pas morte, dit-il, elle dort (Mt 9,23).

Et vraiment, pour Dieu, la mort est un sommeil. Car Dieu fait revenir un mort à la vie en moins de temps qu’un homme ne tire un dormeur de son sommeil. Et Dieu rend la chaleur aux membres refroidis par la mort plus vite qu’un homme ne peut rendre vigueur aux corps plongés dans le sommeil.

Écoute ce que dit l’Apôtre: Instantanément, en un clin d’oeil, <> les morts ressusciteront (1Co 15,52). Sachant qu’il lui était impossible de signifier par des mots l’immédiateté de la résurrection, le bienheureux Apôtre l’a évoquée par des images. D’ailleurs, comment aurait-il pu condenser dans des mots la rapidité d’un événement dans lequel la puissance divine dépasse la rapidité même? Ou bien, comment le temps pourrait-il intervenir dans le don d’une réalité éternelle, non soumise au temps? Parce qu’il n’y a pas de temps sans flux qui s’écoule, l’éternité exclut le temps.

 

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Mgr Francesco Follo

Mgr Francesco Follo est ordonné prêtre le 28 juin 1970 puis nommé vicaire de San Marco Evangelista à Casirate d’Adda de 1970 à 1976. Il obtient un doctorat en Philosophie à l’Université pontificale grégorienne en 1984. De 1976 à 1984, il travaille comme journaliste au magazine Letture du Centre San Fedele de la Compagnie de Jésus (jésuites) à Milan. Il devient membre de l’Ordre des journalistes en 1978. En 1982, il occupera le poste de directeur-adjoint de l’hebdomadaire La Vita Cattolica. De 1978 à 1983, il est professeur d’Anthropologie culturelle et de Philosophie à l’Université catholique du Sacré Cœur et à l’Institut Supérieur des Assistant Educateurs à Milan. Entre 1984 à 2002, il travaille au sein de la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège, au Vatican. Pendant cette période il sera professeur d’Histoire de la Philosophie grecque à l’Université pontificale Regina Apostolorum à Rome (1988-1989). En 2002, Mgr Francesco Follo est nommé Observateur permanent du Saint Siège auprès de l’UNESCO et de l’Union Latine et Délégué auprès de l’ICOMOS (Conseil international des Monuments et des Sites). Depuis 2004, Mgr Francesco Follo est également membre du Comité scientifique du magazine Oasis (magazine spécialisé dans le dialogue interculturel et interreligieux). Mgr Francesco Follo est Prélat d’Honneur de Sa Sainteté depuis le 27 mai 2000.

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