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Pandémie : le Saint-Siège demande de revoir la dette des pays en difficulté (traduction complète)

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Mettre l’homme au centre du système financier international

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La pandémie a « exacerbé les vulnérabilités existantes en matière de dette » dans les pays en développement et les pays les moins avancés, avertit Mgr Ivan Jurkovic. C’est pourquoi, le Saint-Siège plaide pour « la réduction substantielle » voire « l’annulation de la dette des pays moins développés, en signe de solidarité, de coresponsabilité et de coopération véritables entre tous les acteurs de la lutte contre la pandémie mondiale de coronavirus ».

Mgr Ivan Jurkovic, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, est intervenu lors de la 46e session du Conseil des droits de l’homme, sur le point 3 de l’ordre du jour, intitulé : Dialogue interactif avec l’expert indépendant sur la dette extérieure, à Genève, le 3 mars 2021.

Le représentant du Saint-Siège demande « des réformes constructives capables de transformer les pays en développement qui contribuent à la crise de la dette, en des pays qui préviennent la crise de la dette ; il demande également la mise en place d’une architecture financière internationale plus efficace, centrée sur l’homme ».

Voici notre traduction du texte ne anglais de l’intervention de Mgr Ivan Jurkovic.

HG

Intervention de Mgr Ivan Jurkovic

Madame la Présidente,

La délégation du Saint-Siège prend note du rapport de l’expert indépendant chargé d’examiner les effets de la dette extérieure et des autres obligations financières internationales des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, et tient à la remercier de l’avoir présenté au Conseil.

Les effets négatifs de la pandémie de Covid-19 sur la situation économique mondiale sont alarmants. En particulier, la pandémie a exacerbé les vulnérabilités existantes en matière de dette dans les pays en développement et les pays les moins avancés, où le fardeau de la dette les empêche de garantir à leur population les droits socio-économiques fondamentaux, tels que la sécurité alimentaire et sociale, les services de santé et l’accès aux vaccins.

Ces circonstances « constituent des cas d’immoralité immédiate, c’est-à-dire des occasions qui génèrent facilement le type d’abus et de tromperie qui peut nuire aux homologues moins favorisés » et « où l’égoïsme et l’abus de pouvoir ont un potentiel énorme de nuire à la communauté », dû principalement à la domination de l’industrie financière dans l’économie mondiale réelle. La communauté internationale a donc la ferme obligation de promouvoir une compréhension par laquelle des lignes directrices éthiques, culturelles et normatives communes informent un règne systématique des pratiques économiques et financières.

Madame la Présidente,

Compte tenu de ce scénario, il est aujourd’hui plus important que jamais que les États moins développés bénéficient d’une coopération internationale et d’une assistance financière et technique, notamment la réduction, l’allégement ou l’annulation de la dette. Le Saint-Siège demande des réformes constructives capables de transformer les pays en développement qui contribuent à la crise de la dette, en des pays qui préviennent la crise de la dette ; il demande également la mise en place d’une architecture financière internationale plus efficace, centrée sur l’homme.

En effet, les États sont appelés « à se protéger par une gestion appropriée du système public grâce à des réformes structurelles judicieuses, une saine répartition des dépenses et des investissements prudents ». De telles mesures légitimes peuvent contribuer à éviter un fardeau de la dette insoutenable et « des pertes économiques créées par des personnes privées [qui sont] déchargées sur les épaules du système public » tout en favorisant simultanément des systèmes fiscaux nationaux efficaces. Pour ces raisons, nous encourageons vivement les initiatives et les efforts internationaux visant à faciliter la restructuration de la dette souveraine de manière juste et efficace, la mise en œuvre d’un mécanisme de coopération fiscale internationale efficace et un engagement sincère à offrir des « réductions raisonnables et concertées de la dette publique ».[1] Le soutien coordonné et la solidarité de la communauté internationale sont indispensables, non seulement pour les différents États en développement, mais aussi pour assumer la responsabilité de mettre en œuvre des réformes justes du système économico-financier international.

En conclusion, Madame la Présidente, « le principe selon lequel les dettes doivent être payées est certainement juste. Cependant, il n’est pas juste d’exiger ou d’attendre un paiement alors que cela aurait pour effet d’imposer des choix politiques conduisant à la faim et au désespoir de peuples entiers. On ne peut pas s’attendre à ce que les dettes contractées soient payées au prix de sacrifices insupportables ».  Le Saint-Siège considère qu’il est essentiel d’adopter des politiques visant à la réduction substantielle, voire à l’annulation de la dette des pays moins développés, en signe de solidarité, de coresponsabilité et de coopération véritables entre tous les acteurs de la lutte contre la pandémie mondiale de coronavirus.

Je vous remercie, Madame la Présidente.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

NOTE

[1] Oeconomicae et pecuniariae quaestiones, Considérations pour un discernement éthique concernant certains aspects du système économico-financier actuel, par. 32.

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Hélène Ginabat

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