Poster du voyage du pape François en Irak (5-8 mars 2021)

Poster du voyage du pape François en Irak (5-8 mars 2021)

Irak: pour le chiite Jawad al-Khoei, le pape François est « un symbole de paix pour le monde »

« La beauté de cette terre réside dans notre diversité »

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Pour le leader chiite irakien Jawad al-Khoei, le pape François « n’est pas seulement le leader des chrétiens catholiques, mais un symbole de paix pour le monde », rapporte l’agence catholique italienne SIR, ce 1er mars 2021.

Petit-fils de Abou al-Qasim al-Khoei, l’une des plus influentes autorités chiites contemporaines, Jawad al-Khoei est le secrétaire général de l’Institut du même nom, fondé pour relancer la tradition d’enseignement de la ville irakienne de Nadjaf et promouvoir le dialogue interreligieux.

A Nadjaf, ville de l’islam chiite, samedi 6 mars, le pape sera en effet reçu par le grand ayatollah Al-Sistani et par Jawad Al-Khoei , secrétaire général de l’Institut Al-Khoei.

Né en décembre 1980 à Nadjaf, il est co-fondateur du Conseil irakien pour le dialogue interreligieux. L’Institut Al-Khoei qu’il dirige aujourd’hui fait partie du « Hawza » de Nadjaf, un séminaire religieux fondé il y a mille ans pour les savants musulmans chiites qui viennent y approfondir des études islamiques classiques, avec une attention particulière à la jurisprudence. Un séminaire traditionnel associé à une académie interreligieuse qui travaille avec des partenaires locaux, régionaux et internationaux sur le dialogue interreligieux et sur des projets de paix.

Connaissance mutuelle

« Notre objectif principal, explique Jawad Al-Khoei, est de former de futurs savants qui n’aient pas seulement une ample connaissance des principes de l’islam chiite, mais également une compréhension d’autres écoles de pensées et d’autres religions, de sorte que le dialogue interreligieux fasse partie de leur éducation. »

Il souligne le rôle des leaders religieux pour la paix: « Les leaders religieux sont des acteurs influents dans de nombreuses partie du monde et la religion joue encore un rôle important dans la vie quotidienne de nombreuses personnes. Malheureusement, il existe des minorités extrémistes qui justifient leur violence et la haine au nom de la religion et c’est la responsabilité des leaders religieux de s’opposer à cette tendance et d’éduquer à une prise de conscience de la nature pacifique de la religion. Nous ne devons pas permettre aux personnes de détourner notre religion et d’en abuser pour leurs programmes néfastes, personnels et politiques. »

Il souligne le rôle des communautés chrétiennes: « Si le Moyen-Orient était un palmier, son feuillage serait musulman mais ses racines seraient chrétiennes. Les chrétiens dans cette région font partie intégrante et indigène de notre communauté. Ils ont beaucoup contribué à notre économie, notre culture et notre vie intellectuelle. La beauté de cette terre réside dans notre diversité et nous ne pouvons pas imaginer ce lieu sans chrétiens. Il existe un dicton fameux de l’imam Ali, le premier imam chiite, qui nous indique comment vivre : « Les personnes sont de deux sortes : ou elles sont tes frères dans la foi ou tes semblables en humanité ». »

Projets de paix

Il insiste le refus de la haine : « Le Grand ayatollah Sistani insiste constamment sur la fraternité humaine et considère que les chrétiens ont les mêmes droits et les mêmes responsabilités que les musulmans en Irak, où ils sont unis par leur citoyenneté. L’establishment religieux n’a jamais émis une fatwa qui incite à la haine contre les autres et considère comme interdite toute insulte contre les autres leaders religieux ou toute attaque contre leurs lieux de culte. »

Pour le chef chiite, le message du pape François sera particulièrement important pour tous les Irakiens: « Nous ne considérons pas le pape comme seulement le leader des chrétiens catholique, mais comme un symbole de paix et de modération. La visite du pape François en Irak n’est pas uniquement pour les chrétiens, mais elle est pour toutes les personnes qui, partout, travaillent pour la paix.  Il lancera un message puissant sur l’importance du dialogue interreligieux. Les Irakiens appartenant à différentes couches de la société, de différentes origines ethniques et religieuses, sont très heureux de sa prochaine visite et ils sont fiers que le pape ait choisi ce pays, la terre des prophètes et des saints, pour sa première visite à l’étranger pendant la pandémie mondiale. Il montrera à tous qu’il n’y a pas de problèmes entre les religions ou entre les hommes de religion, indépendamment de nos différents contextes et la rencontre fortifiera et encouragera toutes les organisations qui, en Irak ou ailleurs, travaillent pour le dialogue interreligieux et pour des projets de paix. »

La sécurité pour tous

La sécurité aussi doit être pour tous: « L’Irak a été historiquement mis de côté à cause de la situation de la sécurité et des différentes guerres que nous avons dû affronter, mais la visite du pape remettra à nouveau Ur sur la carte de la terre et l’Irak pourra retrouver sa place dans la région et dans le monde. Le dialogue interreligieux est vital pour toutes les sociétés pacifiques parce qu’il nous permet de nous comprendre indépendamment de nos différences et de nous rendre compte que nous sommes tous dans le même bateau, affrontant les mêmes défis. La sécurité des musulmans dépend de la sécurité des chrétiens et la sécurité des chrétiens dépend de la sécurité des musulmans. Il ne peut y avoir de sécurité pour les musulmans s’il n’y a pas de sécurité pour les non-musulmans, et vice versa. Les non-musulmans ne sont pas seulement nos égaux en humanité mais, en tant qu’êtres humains, ils sont nos partenaires sur cette terre. Dans un monde toujours plus globalisé où les distances et les frontières se raccourcissent, nous partageons tous la même planète, les mêmes ressources et les mêmes défis. »

Son refus de la violence est net: « Nous ne pouvons pas permettre qu’une minorité d’individus violents changent la nature pacifique des êtres humains et de toutes les religions divines. Savants et chefs religieux doivent faire davantage pour rappeler la véritable nature de la religion et prévenir les abus et la manipulation de l’identité religieuse au nom de la religion. L’Europe a également souffert pendant des siècles de conflits et de haine religieuse, mais à la fin, elle a dépassé cette page sombre de son histoire pour créer des sociétés pacifiques. Je ne doute pas que l’avenir de cette région sera également pacifique, mais cela demandera du temps et une volonté politique à la fois de la part des chefs religieux et de la communauté internationale pour que cessent les guerres par procuration qui nous utilisent comme chair à canon. »

Traduction d’Hélène Ginabat

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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