Mgr Gabriele Giordano Caccia, capture vidéo chiesadimilano.it

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ONU : le principe de compétence universelle (traduction complète)

Mgr Gabriele Caccia souhaite «des règles claires»

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« Veiller à ce que les responsables des crimes les plus graves rendent compte de leurs actes » d’une part, et « sauvegarder les principes fondamentaux des relations internationales, tels que l’égalité souveraine entre les États, le principe de non-ingérence et l’immunité des représentants de l’État », d’autre part : telle est « la tâche délicate et difficile » qui incombe aux Nations Unies.

Mgr Gabriele Caccia, nonce apostolique et observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies, est intervenu à la sixième commission de la 75e Session de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le point 87 de l’ordre du jour, intitulé : « La portée et l’application du principe de compétence universelle », à New York, le 3 novembre 2020.

Le représentant du Saint-Siège a invité à définir « des règles claires pour l’exercice de cette juridiction, fondées sur la justice, la subsidiarité et le respect des privilèges juridictionnels des États », et à élaborer une orientation sur la compétence universelle qui soit « conforme aux principes fondamentaux de la justice pénale », à travers « une action unifiée et résolue ».

Voici notre traduction de l’intervention de Mgr Gabriele Caccia prononcée en anglais.

HG

Intervention de Mgr Gabriele Caccia

Monsieur le Président,

La résolution annuelle de l’Assemblée générale des Nations unies sur le principe de compétence universelle s’ouvre sur la désignation des trois fondements sur lesquels nous menons nos discussions : « les buts et principes de la Charte des Nations Unies, … le droit international et … un ordre international fondé sur la primauté du droit » (1).

Le rappel de ces fondements est important pour la portée et l’application complexe du principe de compétence universelle. D’une part, nous partageons tous le devoir de veiller à ce que les responsables des crimes les plus graves rendent compte de leurs actes. D’autre part, nous devons sauvegarder les principes fondamentaux des relations internationales, tels que l’égalité souveraine entre les États, le principe de non-ingérence et l’immunité des représentants de l’État. Cette tension entre les principes doit être examinée avec soin.

Le Saint-Siège estime que la seule façon de progresser consiste à définir des règles claires pour l’exercice de cette juridiction, fondées sur la justice, la subsidiarité et le respect des privilèges juridictionnels des États.

L’application de la compétence universelle devrait être limitée aux crimes les plus graves – génocides, crimes contre l’humanité et crimes de guerre. En tant que norme internationale, l’impunité pour ces crimes devrait être inacceptable, et aucun refuge ne devrait être accordé à ceux qui les commettent.

L’application de la juridiction universelle devrait également reconnaître l’État de droit, car tout comme l’État de droit exige que les auteurs de crimes soient tenus pour responsables, il impose également que cela soit fait en respectant le principe de légalité. Par conséquent, toute orientation que cet organe pourrait élaborer sur la compétence universelle doit être conforme aux principes fondamentaux de la justice pénale (entre autres, nullum crimen, nulla poena sine lege, le droit à un procès équitable et la présomption d’innocence).

La subsidiarité exige qu’un État doté d’une juridiction nationale ou territoriale ait la première possibilité d’enquêter sur ces crimes et, le cas échéant, de les poursuivre. En effet, ce principe atténue la controverse autour de la compétence universelle, qui ne devrait s’appliquer qu’en dernier recours lorsque les États ayant le lien principal avec les crimes ou les auteurs de ces derniers ne veulent pas ou ne peuvent pas poursuivre les crimes les plus graves. En outre, même dans ce cas, les États qui cherchent à exercer une compétence universelle doivent avoir un lien clair avec les faits ou avec les parties concernées par l’affaire, comme la présence sur leur territoire de l’accusé ou des victimes. La compétence universelle ne doit pas justifier les poursuites par défaut, le « forum shopping » ou l’ingérence injustifiée dans les affaires intérieures d’autres États.

Les défenses traditionnelles fondées sur l’immunité fonctionnelle des agents publics ne devraient pas s’appliquer aux crimes les plus graves. Ces crimes impliquent des actes qui ne peuvent jamais être interprétés comme des « actes de l’État » et ne devraient donc pas bénéficier de l’immunité. D’autre part, d’un point de vue politique, nous devons préserver l’immunité ratione personae du plus haut fonctionnaire de l’État pendant son mandat. Le respect de cette immunité est en fait une condition préalable à la bonne conduite des affaires internationales et à tout effort de médiation ou de consolidation de la paix. Il faut reconnaître – peut-être avec un certain regret mais de manière réaliste – qu’à court terme, les efforts pour trouver une solution négociée à une crise doivent souvent passer avant les besoins de la justice.

Ma délégation encourage les efforts du Groupe de travail pour trouver un terrain d’entente sur ces questions en poursuivant son enquête sur les pratiques nationales des États membres en matière de compétence universelle, et remercie le Secrétaire général pour son rapport (A/75/151) et les États membres qui lui ont fourni des informations. Un tel rapport, destiné à aider le Groupe de travail, devrait en particulier identifier : les crimes pour lesquels les lois des États membres leur permettent déjà d’engager des poursuites sur la base de la compétence universelle ; les conditions, le cas échéant, qui doivent être réunies pour rendre la compétence universelle applicable à ces crimes en vertu des lois nationales d’un État membre ; et les cas éventuels dans lesquels la compétence universelle a été utilisée comme base de poursuites pour des crimes dans le pays de chaque État membre.

Il ne peut y avoir d’État de droit lorsque les crimes sont récompensés par l’impunité. Par conséquent, nous devons persévérer dans la tâche délicate et difficile qui consiste à trouver un équilibre entre les préoccupations souveraines et la nécessité de tenir pour responsables les auteurs des crimes les plus odieux. Grâce à une action unifiée et résolue, nous pouvons dissuader les atrocités futures et garantir la justice pour les victimes.

Je vous remercie, Monsieur le Président.

(1) Résolution 74/192 de l’AGNU – La portée et l’application

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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