Samaritanus bonus (c) Zenit / DCL

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Samaritanus Bonus (6/12): « Les soins prénataux et pédiatriques »

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« Les nourrissons et les enfants souffrant de maladies dégénératives chroniques »

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« En ce qui concerne l’accompagnement des nourrissons et des enfants souffrant de maladies dégénératives chroniques incompatibles avec la vie ou en phase terminale de la vie elle-même, il est nécessaire de réaffirmer ce qui suit, en étant conscients de la nécessité de développer une stratégie opérationnelle capable d’assurer la qualité et le bien-être de l’enfant et de sa famille »: le document « Samaritanus Bonus » aborde la question des soins prénataux et pédiatriques dans son ch. 5.

Le nouveau document du Saint-Siège sur « le soin des personnes dans des phases critiques et terminales de la vie » présente un refus net de l’euthanasie et de la logique du « rejet » comme de l’acharnement thérapeutique. Il réfléchit à des questions délicates comme la vie pré-natale et des états de conscience réduite. Il réaffirme le droit à l’objection de conscience du personnel soignant. Ici (ch. 5, §4), le document définit les soins palliatifs.

Cette nouvelle « lettre » de la Congrégation pour la Doctrine de la foi sur la fin de vie a été publiée et présentée à la presse mardi 22 septembre 2020. Elle a été approuvée par le pape François le 25 juin dernier et il en a ordonné la publication. Le dicastère avait adopté le texte le 29 janvier.

« Samaritanus Bonus » est en date du 14 juillet, mémoire liturgique de S. Camille de Lellis (+1614), prêtre italien, saint patron du personnel soignant. Il disait : « La musique que je préfère, c’est celle que font les pauvres malades lorsque l’un demande qu’on lui refasse son lit, l’autre qu’on lui rafraîchisse la langue ou qu’on lui réchauffe les pieds. »

C’est bien l’esprit des soins palliatifs, quand il reste « beaucoup à faire ». Le document réaffirme de fait une « éthique du prendre soin », avec ce principe: « quand guérir est impossible, soigner l’est toujours ».

Après l’interdiction de l’euthanasie et du suicide assisté, et l’affirmation de « l’obligation morale d’exclure l’acharnement thérapeutique », le document en vient au « devoir d’alimentation et d’hydratation« , avant de préciser la nature des « soins palliatifs ». Le document aborde ensuite la place de la famille et l’accompagnement et les soins prénataux et pédiatriques.

AB

6.  L’accompagnement et les soins prénataux et pédiatriques

En ce qui concerne l’accompagnement des nourrissons et des enfants souffrant de maladies dégénératives chroniques incompatibles avec la vie ou en phase terminale de la vie elle-même, il est nécessaire de réaffirmer ce qui suit, en étant conscients de la nécessité de développer une stratégie opérationnelle capable d’assurer la qualité et le bien-être de l’enfant et de sa famille.

Depuis leur conception, les enfants souffrant de malformations ou de pathologies de toutes sortes sont de petits patients que la médecine d’aujourd’hui est toujours en mesure d’aider et d’accompagner en respectant la vie. Leur vie est sacrée, unique, non reproductible et inviolable, exactement comme celle de tout adulte.

Dans le cas de pathologies prénatales dites “incompatibles avec la vie” – c’est-à-dire qui conduiront certainement à la mort dans un court laps de temps – et en l’absence de thérapies fœtales ou néonatales capables d’améliorer l’état de santé de ces enfants, il ne faut en aucun cas les abandonner en termes de soins, mais les accompagner comme tout autre patient jusqu’à ce que survienne la mort naturelle ; le comfort care périnatal favorise en ce sens un parcours de soins intégré qui, à côté du soutien des médecins et des agents pastoraux, associe une présence constante de la famille. L’enfant est un patient spécial et nécessite une préparation particulière de la part de l’accompagnateur, tant en termes de connaissances que de présence. L’accompagnement empathique d’un enfant en phase terminale, qui est l’un des plus délicats, vise à ajouter de la vie aux années de l’enfant et non des années à sa vie.

Les centres de soins palliatifs périnataux, en particulier, apportent un soutien essentiel aux familles qui accueillent la naissance d’un enfant dans des conditions fragiles. Dans de tels contextes, l’accompagnement médical compétent et le soutien d’autres familles-témoins qui ont vécu la même expérience de douleur et de perte constituent une ressource essentielle, parallèlement au nécessaire accompagnement spirituel de ces familles. Il est du devoir pastoral des personnels de santé d’inspiration chrétienne de travailler à promouvoir leur diffusion dans le monde entier.

Tout cela est particulièrement nécessaire pour les enfants qui, dans l’état actuel des connaissances scientifiques, sont destinés à mourir immédiatement après l’accouchement ou dans un court laps de temps. Prendre soin de ces enfants aide les parents à faire face au chagrin et à le concevoir non seulement comme une perte, mais comme une étape d’un voyage d’amour qu’ils ont parcouru avec leur enfant.

Malheureusement, la culture aujourd’hui dominante ne favorise pas cette approche : sur le plan social, le recours parfois obsessionnel au diagnostic prénatal et l’émergence d’une culture hostile au handicap conduisent souvent au choix de l’avortement, ce qui conduit à le faire passer pour une pratique de « prévention ». Consistant à tuer délibérément une vie humaine innocente, il n’est donc jamais licite. L’utilisation des diagnostics prénataux à des fins sélectives est par conséquent contraire à la dignité de la personne et gravement illicite en tant qu’expression d’une mentalité eugénique. Dans d’autres cas, après la naissance, la même culture conduit à suspendre ou à ne pas initier les soins au nouveau-né, en raison de la présence ou même seulement de la possibilité qu’un handicap se développe à l’avenir. Cette approche de type utilitariste ne peut pas non plus être approuvée. Une telle procédure est non seulement inhumaine mais aussi gravement illicite sur le plan moral.

Un principe fondamental de l’assistance pédiatrique est que l’enfant en phase terminale a droit au respect et au soin de sa personne, en évitant aussi bien l’acharnement thérapeutique et l’obstination déraisonnable que toute anticipation intentionnelle de sa mort. D’un point de vue chrétien, le soin pastoral d’un enfant en phase terminale appelle la participation à la vie divine par le Baptême et la Confirmation.

Dans la phase terminale de l’évolution d’une maladie incurable, même si les thérapies pharmacologiques ou autres visant à contrecarrer la pathologie dont souffre l’enfant sont suspendues, dans la mesure où elles ne correspondent plus à son état clinique détérioré et sont considérées par les médecins comme futiles ou excessivement lourdes pour lui en tant que source de nouvelles souffrances, le soin intégral de la personne du petit malade ne doit cependant jamais faire défaut dans ses différentes dimensions physiologiques, psychologiques, affectivo-relationnelles et spirituelles. Soigner ne signifie pas seulement pratiquer une thérapie et guérir ; tout comme interrompre une thérapie, lorsqu’elle ne bénéficie plus à l’enfant incurable, n’implique pas de suspendre les traitements efficaces pour soutenir les fonctions physiologiques essentielles à la vie du petit patient, tant que son corps est capable d’en bénéficier (soutien à l’hydratation, à la nutrition, à la thermorégulation et autres encore, dans la mesure où ces éléments sont nécessaires pour soutenir l’homéostasie corporelle et réduire la souffrance organique et systémique). L’abstention de toute obstination thérapeutique dans l’administration de traitements jugés inefficaces ne doit pas être un désistement curatif, mais doit maintenir ouverte la voie de l’accompagnement de la mort. Il faut plutôt considérer que même les interventions de routine, telle l’assistance respiratoire, doivent être effectuées de manière indolore et proportionnée, en personnalisant pour le patient le type d’aide approprié, pour éviter que le juste souci de la vie n’entre en conflit avec l’imposition injuste d’une douleur évitable.

Dans ce contexte, l’évaluation et la gestion de la douleur physique du nourrisson et de l’enfant sont essentielles pour le respecter et l’accompagner dans les phases les plus stressantes de la maladie. Des soins personnalisés et délicats, aujourd’hui attestés dans l’assistance clinique pédiatrique, accompagnés de la présence des parents, permettent une gestion intégrée et plus efficace de toute intervention d’assistance.

Le maintien du lien affectif entre les parents et l’enfant fait partie intégrante du processus de soin. La relation de suivi et d’accompagnement parents-enfants doit être favorisée avec tous les outils nécessaires et constitue une partie fondamentale du soin, même pour les maladies incurables et les situations en évolution terminale. En plus du contact émotionnel, il ne faut pas oublier le moment spirituel. La prière des personnes proches, à l’intention de l’enfant malade, a une valeur surnaturelle qui dépasse et approfondit la relation affective.

Le concept éthico-juridique de “l’intérêt supérieur de l’enfant” – désormais utilisé pour procéder à l’évaluation des coûts et des avantages du traitement à fournir – ne peut en aucun cas constituer un fondement pour décider d’abréger sa vie afin de lui éviter la souffrance, au moyen d’actions ou d’omissions qui, par leur nature ou leur intention, peuvent revêtir un caractère euthanasique. Comme dit précédemment, la suspension de thérapies disproportionnées ne peut conduire à suspendre les soins de base nécessaires pour accompagner vers une mort naturelle digne, notamment ceux destinés à soulager la douleur, ni non plus l’assistance spirituelle qui doit être offerte à celui qui rencontrera bientôt Dieu.

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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