Mgr Gabriele Caccia © Vatican Media

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ONU : le Saint-Siège mitigé sur la réponse à la pandémie (traduction complète)

« Un manque de consensus et des lacunes »

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L’Observateur permanent du Saint-Siège aux Nations Unies, à New York, a présenté sept remarques et émis une réserve après l’adoption du projet de résolution intitulé « Réponse globale et coordonnée à la pandémie de Covid-19 ». Il déplore que la résolution omnibus ait été « adoptée sans consensus » et estime « très regrettable » le fait qu’elle « comporte la référence profondément inquiétante et source de division à la “santé sexuelle et reproductive et aux droits génésiques“ ».

Mgr Gabriele Giordano Caccia, nonce apostolique et observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies, a fait une déclaration lors de la 64e réunion plénière de l’Assemblée générale (74e session), après l’adoption du projet de résolution, le 11 septembre 2020 à New York. Il a demandé, entre autres, des vaccins « “exempts de préoccupations éthiques“ et accessibles à tous », « la réduction, voire l’annulation, de la dette » des pays pauvres et a rappelé que la crise climatique « reste l’une des urgences mondiales les plus graves ».

Mgr Caccia regrette « l’exclusion des organisations confessionnelles de la liste de celles qui jouent un rôle important dans la réponse à la pandémie » et un « manque de précision dans la terminologie et dans son ancrage dans le droit international des droits de l’homme » ; il souligne également des lacunes risquant de fragiliser d’une part la garantie des libertés de religion, de conviction et d’expression et, d’autre part le respect du droit à la vie des personnes âgées.

Voici notre traduction de la déclaration de Mgr Gabriele Giordano Caccia prononcée en anglais.

HG

Déclaration de Mgr Gabriele Giordano Caccia

Monsieur le Président,

Je tiens tout d’abord à remercier les coordinateurs, la représentante permanente de l’Afghanistan, S. E. Madame l’Ambassadrice Adela Raz, et le représentant permanent de la Croatie, S. E. Monsieur l’Ambassadeur Ivan Šimonović, pour leur travail.

Le pape François a récemment souligné que « la pandémie actuelle a mis en évidence notre interdépendance : nous sommes tous liés les uns aux autres, pour le meilleur et pour le pire. Par conséquent, pour sortir de cette crise meilleurs qu’auparavant, nous devons le faire ensemble » (1). Parce que la communauté internationale doit être solidaire face à la pandémie, le Saint-Siège a soutenu dès le début l’idée de cette « résolution omnibus » et a souligné, au cours des négociations, la nécessité d’une approche commune et consensuelle.

Il est regrettable que cette « résolution omnibus », lancée comme un moyen de montrer au monde que l’Assemblée générale est unie et de rassembler de nombreuses initiatives liées à la Covid, soit adoptée sans consensus. Comme de nombreuses autres délégations, le Saint-Siège aurait préféré que l’on consacre beaucoup plus de temps aux discussions sur les questions difficiles.

En ce qui concerne le contenu spécifique de la résolution, ma délégation souhaiterait faire les remarques suivantes et émettre une réserve :

– La vaccination extensive pourrait être un bien public mondial, à condition que les vaccins soient non seulement adéquats, sûrs, de qualité, efficaces et performants, mais aussi et surtout « exempts de préoccupations éthiques » et accessibles à tous (2).

– Nous regrettons l’exclusion des organisations confessionnelles de la liste de celles qui jouent un rôle important dans la réponse à la pandémie. Par l’intermédiaire de leurs hôpitaux, cliniques, dispensaires, écoles et organisations caritatives, les organisations confessionnelles soutiennent les personnes sur le terrain, en particulier celles qui sont les plus touchées par la pandémie.

– En outre, les chefs religieux jouent un rôle crucial dans la promotion du dialogue et de la tolérance. Le libellé du cinquième alinéa du préambule et du quatrième alinéa du dispositif aurait toutefois dû suivre le libellé applicable et convenu des résolutions consensuelles de l’Assemblée générale pour garantir la sauvegarde de la liberté de religion et de conviction et de la liberté d’expression dans ce contexte. Des discussions supplémentaires sur le texte relatif aux organisations confessionnelles et aux chefs religieux auraient dû avoir lieu.

– Nous nous félicitons que la résolution accorde une attention aux questions relatives aux droits de l’homme. Malheureusement, cette attention est entravée par un manque de précision dans la terminologie et dans son ancrage dans le droit international des droits de l’homme (PP5, PP21, OP21, OP28).

– L’inclusion de références spécifiques aux personnes âgées dans le texte est cruciale, compte tenu de l’impact que la pandémie a eu sur les personnes âgées dans de nombreux pays (PP21, OP21). Cette préoccupation aurait dû être renforcée en soulignant que les décisions en matière de soins de santé concernant les personnes âgées devraient toujours respecter leur droit à la vie et ne jamais être interprétées autrement.

– Nous sommes heureux de voir que l’architecture de la dette internationale et le système financier international sont pris en considération comme partie intégrante de notre réponse commune à la pandémie (OP31, OP43 et al). Un langage plus fort, cependant, sur la nécessité de renouveler l’architecture financière internationale aurait donné au texte un plus grand impact. La réduction, voire l’annulation, de la dette qui pèse sur les nations les plus pauvres est essentielle pour que tous les pays soient en mesure de répondre aux besoins de leur population pendant la pandémie.

– Nous nous félicitons de l’inclusion d’un texte complet sur le changement climatique et la protection de l’environnement (OP41, 46, 47 et al). À cet égard, il est essentiel de veiller à ce que les stratégies de relance intègrent les trois piliers de l’action climatique : l’atténuation, l’adaptation et la résilience. La pandémie ne doit pas réduire notre attention sur la crise climatique, qui reste l’une des urgences mondiales les plus graves.

Enfin, le Saint-Siège considère qu’il est très regrettable que la résolution adoptée comporte la référence profondément inquiétante et source de division à la « santé sexuelle et reproductive et aux droits génésiques » (OP7). Conformément aux réserves qu’il a exprimées lors des conférences internationales tenues à Pékin et au Caire, le Saint-Siège réitère qu’il considère que l’expression « santé génésique » et les termes connexes s’appliquent à un concept holistique de la santé, qui englobe la personne dans la totalité de sa personnalité, de son esprit et de son corps. En particulier, le Saint-Siège rejette l’interprétation qui considère l’avortement ou l’accès à l’avortement, l’avortement sélectif en fonction du sexe, l’avortement des fœtus diagnostiqués avec des problèmes de santé, la maternité de substitution et la stérilisation comme des dimensions de la « santé reproductive » ou comme faisant partie de la couverture sanitaire universelle.

Je vous remercie.

NOTES

(1) Pape François, Catéchèse à l’audience générale, 6 septembre 2020.

(2) Cf. Pape François, Catéchèse à l’audience générale, 19 août 2020.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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