Card. Ladaria, Samaritanus bonus (c) Zenit / DCL

Card. Ladaria, Samaritanus bonus (c) Zenit / DCL

« Aucun geste pouvant sembler une approbation de l’euthanasie », par le card. Ladaria

Présentation de « Samaritanus bonus »

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« Aucun geste extérieur qui puisse être interprété comme une approbation, même implicite, de l’action d’euthanasie, comme par exemple le fait de rester présent au moment de la mise en œuvre de celle-ci n’est admissible, de la part de ceux qui assistent spirituellement ces personnes malades », déclare le cardinal Ladaria.

Le cardinal Luis Ladaria Ferrer SJ a en effet présenté la Lettre Samaritanus bonus sur la prise en charge des personnes « en phase critique et terminale de la vie », publié par la Congrégation pour la doctrine de la foi, dont il est le préfet, ce mardi 22 septembre 2020, au Vatican.

AB

Voici notre traduction de l’intervention du card. Ladaria

1) Lors de la session plénière de la Congrégation pour la doctrine de la foi, en 2018, concernant les questions relatives à l’accompagnement des malades dans les phases critiques et terminales de la vie, les pères du dicastère ont suggéré l’opportunité d’un document qui traiterait le sujet, non seulement de manière correcte doctrinalement, mais également en soulignant la dimension profondément pastorale et dans un langage compréhensible, en accord avec les progrès des sciences médicales. Il était nécessaire d’approfondir, en particulier, les thèmes de l’accompagnement et des soins aux malades du point de vue théologique, anthropologique et médico-hospitalier, tout en se concentrant sur certaines questions éthiques pertinentes, liées à la proportionnalité des thérapies et concernant l’objection de conscience et l’accompagnement pastoral des malades en phase terminale.

2) A la lumière de ces considérations, après diverses phases d’étude préliminaires au cours desquelles plusieurs experts ont apporté leur contribution éditoriale qualifiée, un premier projet de document a finalement pris forme. A côté de la figure du Bon Samaritain, le texte fait brièvement référence à celle du Christ souffrant, témoin partageant la douleur physique, l’expérience de la précarité et même de la désolation humaine qui, chez lui, deviennent abandon confiant à l’amour du Père. Une telle remise de soi confiante au Père, à l’horizon de la Résurrection, donne une valeur rédemptrice à la souffrance elle-même et ouvre, au-delà de l’obscurité de la mort, à la lumière du ciel. Du point de vue de ceux qui s’occupent des personnes dans les phases critiques et terminales de la vie, une perspective d’espérance pour la souffrance vécue par ceux qui sont confiés aux soins affectueux des professionnels de la santé a donc été opportunément associée dans le texte.

3) En effet, toute personne malade « a besoin non seulement d’être écoutée, mais de comprendre que son interlocuteur “sait“ ce que signifie se sentir seul, abandonné, angoissé face à la perspective de la mort, à la douleur de la chair, à la souffrance qui surgit quand le regard de la société mesure sa valeur en termes de qualité de vie et la fait sentir comme un fardeau pour les projets des autres » (p. 9). C’est pourquoi, « aussi importants et précieux soient-ils, les soins palliatifs ne suffisent pas s’il n’y a personne qui “se tienne“ aux côtés du malade attestant sa valeur unique et irremplaçable. […] Et il est important, à une époque historique où l’on exalte l’autonomie et où l’on célèbre le faste de l’individu, de se rappeler que s’il est vrai que chacun vit sa propre souffrance, sa propre douleur et sa propre mort, ces expériences sont toujours chargées du regard et de la présence des autres. Autour de la Croix, il y a aussi les fonctionnaires de l’État romain, il y a les curieux, les distraits, les indifférents et les rancuniers ; ils sont sous la Croix, mais ils ne “se tiennent“ pas avec le Crucifié. Dans les services de soins intensifs, dans les maisons de repos pour malades chroniques, on peut être présent en tant que fonctionnaire ou en tant que personne qui “se tient“ avec les malades » (p. 11).

4) Le document, présenté au Saint-Père et approuvé par lui le 25 juin 2020, porte le titre de Samaritanus bonus (Le Bon Samaritain). Il a été choisi le genre littéraire de la Lettre et la date du 14 juillet 2020, mémoire liturgique de Saint Camille de Lellis (1550-1614). Au XVIe siècle – l’époque où vivait notre Saint – les incurables étaient pour la plupart confiés à des mercenaires ; certains parmi ceux-ci, des criminels, étaient contraints par la force à ce travail ; d’autres s’y résignaient, car ils n’avaient aucune autre chance de gagner leur vie. Camille voulait « des hommes nouveaux pour une aide nouvelle ». Et une idée fixe l’avait saisi : remplacer les mercenaires par des gens prêts à rester avec les malades uniquement par amour. Il voulait avoir avec lui des personnes qui « non pour un salaire, mais volontairement et par amour de Dieu, les serviraient avec l’amour que les mères portent à leurs enfants malades ».

5) Bien que l’enseignement de l’Église sur le sujet soit clair et contenu dans des documents magistériels bien connus – en particulier l’encyclique Evangelium vitae de saint Jean-Paul II (25 mars 1995), la Déclaration Iura et bona de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (5 mai 1980), la Nouvelle Charte des professionnels de la santé (2016) de ce qui s’appelait alors le Conseil pontifical pour les professionnels de la santé, outre les nombreux discours et interventions des derniers souverains pontifes, une nouvelle déclaration organique du Saint-Siège sur la prise en charge des personnes dans les phases critiques et terminales de la vie a semblé opportune et nécessaire par rapport à la situation actuelle, caractérisée par un contexte de droit civil international de plus en plus permissif en ce qui concerne l’euthanasie, le suicide assisté et les dispositions relatives à la fin de vie.

6) À cet égard, un cas très particulier dans lequel il est nécessaire de réaffirmer l’enseignement de l’Église est l’accompagnement pastoral de la personne qui a expressément demandé l’euthanasie ou le suicide assisté. Pour qu’elle puisse recevoir l’absolution dans le sacrement de pénitence, ainsi que l’onction des malades et le viatique, il est nécessaire que la personne, éventuellement inscrite auprès d’une association désignée pour garantir son euthanasie ou son suicide assisté, manifeste l’intention de rejeter cette décision et d’annuler son inscription auprès de cet organisme. Aucun geste extérieur qui puisse être interprété comme une approbation, même implicite, de l’action d’euthanasie, comme par exemple le fait de rester présent au moment de la mise en œuvre de celle-ci, n’est admissible, de la part de ceux qui assistent spirituellement ces personnes malades.  Ceci va de pair avec l’offre d’une aide et d’une écoute toujours possibles, toujours accordées, toujours à poursuivre, ainsi que d’une explication approfondie du contenu du sacrement, afin de donner à la personne, jusqu’au dernier moment, les outils pour pouvoir l’accueillir en toute liberté (cf. point V,11, pp. 41-42).

7) Comme c’est clairement énoncé dans le premier paragraphe du document, intitulé « Prendre soin de son prochain », « prendre soin de la vie est la première responsabilité dont le médecin fait l’expérience dans sa rencontre avec la personne malade. Cela ne se réduit pas à la capacité de guérir le malade, car son horizon anthropologique et moral est plus large : même lorsque la guérison est impossible ou improbable, les soins médicaux et infirmiers… psychologiques et spirituels, sont un devoir inéluctable, car le contraire constituerait un abandon inhumain du malade. En effet, la médecine, qui fait appel à de nombreuses sciences, possède également une dimension importante d’ “art thérapeutique“ qui implique une relation étroite entre le patient, les professionnels de la santé, les membres de la famille et ceux des différentes communautés auxquelles le patient appartient : l’art thérapeutique, les actes cliniques et le traitement sont indissociables dans la pratique médicale, en particulier dans les phases critiques et terminales de la vie » (p. 6).

8) Le témoignage chrétien montre que l’espérance est toujours possible, même lorsque la vie est enveloppée et alourdie par la “culture du déchet“. Et nous sommes tous appelés à apporter notre contribution spécifique, car – comme l’a dit le pape François (s’adressant aux dirigeants de l’ordre des médecins en Espagne et en Amérique latine, le 9 juin 2016) – la dignité de la vie humaine et la dignité de la vocation médicale sont en jeu. Je vous remercie.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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