Marie-Aude Honorat @ FB, Diaconie de la Beauté

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La Diaconie de la Beauté témoigne: Marie-Aude Honorat

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Des « échanges entre artistes de cœur émergents et artistes reconnus »

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Marie-Aude Honorat, une artiste engagée dans la Diaconie de la Beauté, témoigne ici pour les lecteurs de Zenit de la rencontre du pape François et de Philippe Naudin,  et de son « émerveillement » face à la beauté qui suscite « l’apaisement et la confiance ». Elle explique comment son art vise à « faire paraître l’invisible dans le visible ».

AB

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Dans les Eglises chrétiennes, la « diaconie » fait référence à l’institution qui organise les services d’assistance et charité. Son étymologie vient du grec qui signifie littéralement « à travers la poussière ». Quel lien entre les deux ? Sans doute la notion de lien entre l’infiniment grand et l’infiniment petit et de traversée.

Je me souviens d’avoir entendu en Ukraine le père Daniel-Ange énoncer cette splendide vérité :  » Toute diaconie est liturgie ».

Cette phrase ne m’a jamais quittée. Elle a été un piolet dans mon existence. Un piolet pour « monter plus haut » et discerner où poser mes pas. Servir revient donc à célébrer l’eucharistie, servir vaut une messe.

En ce sens, le mouvement de la Diaconie de la Beauté initié par Anne Facérias est liturgie, car elle offre la beauté transpercée et mise au service de la Beauté, c’est-à-dire le nom et l’œuvre de Dieu. Cette diaconie, que je connais depuis quasiment ses premiers pas, a bien vocation à mettre en lien l’infini d’en haut avec l’infini d’en bas, qui est la définition hugolienne de la prière.

Cette diaconie permet les échanges entre artistes de cœur émergents et artistes reconnus. J’y ai ainsi reçu une autre « phrase piolet », cette fois lors d’une édition du Festival Sacré annuel (pendant le Festival International du Film à Cannes) : « Ne perdez jamais une occasion de donner de l’amour ». L’auteur, Michael Lonsdale, est connu pour son talent d’acteur. Il est moins connu pour sa grande spiritualité.

En février 2020, il avait rencontré, au bras d’Anne, le pape François, accompagné également d’un handicapé mental-apprenti acteur, artiste de la diaconie, qui lui avait involontairement volé la vedette. Ce dernier avait étreint le Pape sans se poser de question. La photo avait fait le tour du monde. Voilà toute la beauté du travail de la diaconie portée par Anne. Cette étreinte spontanée, sans façade, sans chichi, empreinte d’une édifiante liberté incarnait la phrase de Michael qui rejoint l’injonction du Christ à nous aimer les uns et les autres comme Il l’a fait. Simplement, en vérité, à tout instant.

Philippe Naudin et le pape François, 19 fév. 2020 © Vatican Media

Philippe Naudin et le pape François, 19 fév. 2020 © Vatican Media

Le Seigneur nous demande de nous aimer les uns les autres comme Il nous aimés. Or, quand il s’agit d’aimer, on pense souvent à l’état amoureux. Cet état délicieux qui nous fait sentir vivant, car c’est alors tout l’être qui sent son cœur battre et ses sens en éveil.

Le cœur éveillé, l’être est ouvert à la vie, à ce qui l’entoure, conscient du présent qu’est le présent. Loin des sirènes de la peur, le cœur amoureux vit la vocation de l’amour. Il recouvre sa faculté naturelle d’émerveillement, propre à l’enfance, qui a tendance à s’amoindrir voire disparaître à l’âge adulte. Pour autant, faut-il attendre d’être amoureux pour s’émerveiller ? Et comment faut-il comprendre l’invitation du Christ à « nous aimer les uns les autres comme Il nous a aimés » ?

Happé par un monde soucieux de contrôle, de rationalité et d’autoprotection, l’adulte a souvent perdu le chemin vers le Tout. L’épisode actuel de crise sanitaire invite pourtant les habitants de la terre à retrouver ce chemin vers le Tout, et pour cela, ne faut-il pas simplement retrouver la voie de l’émerveillement, cette faculté qui donne accès au sens du vivant. Ne faut-il pas simplement retrouver son cœur d’enfant… pour redevenir à leur instar, des poètes reliés à l’infini… pour retrouver la liaison avec le Tout par ce fil ténu mais solide qu’est le lien à la mémoire du sacré… pour s’émerveiller et parvenir à accueillir avec bienveillance et gratitude, donc à aimer, comme Il nous a aimés, l’autre, le monde, le Tout et même son soi…

L’émerveillement consiste à se laisser éblouir par la beauté qui nous entoure. Ce sentiment de gratitude, à commencer envers le don de la vie qui coule en nos veines, et dont les catastrophes se font le rappel, permet je crois à l’être humain de rebondir et de trouver de nouveaux rivages, quand il est parfois conduit comme le bois flotté à dériver un temps vers des rivages inconnus au départ… Ainsi l’amour n’est pas seulement l’état amoureux. Il est avant tout accueil et gratitude. C’est sans doute pour cela que le Seigneur nous a invités à nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés. En effet, il n’est pas question d’être amoureux les uns des autres mais de nous accueillir avec nos limites, nos différences, nos particularités, et tout ce qui fait que nous sommes chacun.e unique, et pourtant, souvent, potentiellement complémentaires. Sartre pensait que « l’enfer c’est l’autre ». Jésus au contraire, nous invite à comprendre que nous sommes des solutions potentielles les uns pour les autres.

J’ai toujours eu une âme d’artiste depuis mon plus jeune âge. Dédiée intérieurement à l’écriture, la danse, au dessin et au théâtre, que j’ai pratiqué depuis petite, j’ai toujours voulu faire rire et évoquer l’invisible dans le visible, pour transmettre le goût du beau mystérieux, pour replonger l’humain dans la joie de vivre « malgré tout ». Après des années d’études doctorales en Angleterre consacrées aux dissidents soviétiques et au drame de la confrontation du Soi face à la loi écrite et non écrite, j’ai vécu un « accident-grâce » d’une immense violence, suivi d’un coma et au cours duquel mon cervelet droit fut déplacé. Peu après, un moine en Ukraine me dit au fin fond de la campagne que j’étais artiste. Je ne pouvais l’entendre, et puis je me suis résolue à oser prendre mes premiers pinceaux, pour témoigner de la vie rendue, de la générosité de Dieu, de la victoire de la Vie. Et la peinture a jailli comme un geyser (marieaude.us), et l’écriture a repris (en cours d’édition), et la photographie n’a cessé de croître (honoratpost.com), et le jeu attend de reprendre… Regarder, observer, méditer, transmettre, inviter.

La foi m’ayant permis de traverser de grands feux, j’aspire dans mon travail d’artiste à réveiller la mémoire du sacré et la faculté d’émerveillement chez l’autre, car ces deux éléments nous permettent de développer notre résilience, c’est-à-dire notre faculté à naviguer dans les courants selon son spécialiste, Boris Cyrulnik. Les croyants sont invités à se souvenir que quelle que soit la barque, et quelle que soit la mer, Dieu est avec nous. Les non croyants sont invités à ressentir le mystère, sinon le sacré, qui les habite, les a conçus, et leur accorde le souffle de vie.

A travers différents supports j’invite donc toute personne à retrouver la liaison avec le Tout, à retrouver cette part de sacré qui préexiste à la conscience et permet à cette dernière de surmonter ce qui la dépasse dans ce qu’il nous est donné d’affronter.

Convaincue des bienfaits de la de la méditation (au sens de recueillement) et de la prière, je propose notamment des supports visuels pour favoriser au quotidien les « power pauses », ces petits moments de bien-être où se déconnecter offre un espace vidé de stress mais plein de la joie que nous communique les êtres aimés (marieaude.com). Je peins également à la demande des œuvres pour des particuliers et des cabinets d’avocats, médecins et kinésithérapeutes afin de créer une ambiance propice à l’apaisement et la confiance.

Faire paraître l’invisible dans le visible est pour moi le meilleur moyen d’inviter à rester magicien au fond de nous, à nous enraciner au plus profond de la vérité qui nous habite tout en irriguant les veinures de nos branches pour monter toujours plus haut, car, comme le disait si justement l’auteur de « L’Archipel du Goulag » Prix Nobel de littérature Alexandre Soljenitsyne : « l’homme n’a d’autre choix que d’aller toujours plus haut ». C’est bien cela ce à quoi le Seigneur nous invite en nous demandant de nous aimer les uns les autres comme Il nous a aimés. Il nous invite simplement à aller vers le sommet de nous-même.

Propos recueillis par Anne Facérias

 

 

 

 

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