« Dans le travail œcuménique, ce que vous recevez est plus grand que ce que vous pouvez donner. Je suis conscient qu’après tout il n’y a qu’un seul ministre œcuménique, qui est l’Esprit Saint ; nous, les soi-disant œcuménistes, ne sommes que ses instruments, plus ou moins faibles. »
C’est ce qu’a dit le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, dans une interview accordée aux médias du Vatican ce vendredi 5 juin 2020, pour le soixantième anniversaire du début du chemin œcuménique.
Il annonce la publication par son dicastère d’un Vademecum œcuménique pour les évêques et la publication de la revue Acta Œcumenica.
Le Secrétariat pour la promotion de l’unité des chrétiens, créé le 5 juin 1960, est devenu ensuite un Conseil pontifical en 1988, est la source d’un engagement constant sur un chemin œcuménique pour le président de ce dicastère.
Le cardinal Koch souligne surtout l’aspect spirituel du mouvement œcuménique : « L’œcuménisme spirituel, doit être mentionné comme un aspect fondamental, c’est-à-dire l’adhésion profonde et concordante de tous les fidèles à la prière sacerdotale de Jésus, «que tous soient un». Cette prière maintient éveillée en nous la conscience que l’unité de l’Église correspond à la volonté du Seigneur. »
« L’un des plus grands défis » de l’œcuménisme « à l’heure actuelle », affirme-t-il, consiste « en l’absence d’un consensus vraiment solide sur l’objectif de l’œcuménisme ». Il existe « une entente sur la nécessité de l’unité, il n’y en a pas encore sur la forme qu’elle devrait recouvrir ». « Nous avons besoin d’une vision commune, c’est essentiel pour l’unité de l’Église, déclare le cardinal. Les prochaines étapes ne peuvent être franchies que si nous avons un objectif clair à l’esprit. »
« Un don spécial » de l’Église catholique
Le cardinal Koch exprime une certitude que chaque Église chrétienne « peut apporter une contribution spécifique à la restauration de l’unité ».
Des Églises protestantes, explique-t-il, « l’Église catholique a surtout appris la centralité de la Parole de Dieu dans la vie de l’Église, dans les célébrations liturgiques et dans la pensée théologique ».
Des Églises orthodoxes, poursuit-il, « nous pouvons apprendre beaucoup sur la synodalité dans la vie de l’Église et la collégialité des évêques ».
Quant à l’Église catholique, elle « peut offrir un don spécial à la discussion œcuménique : l’accent mis sur l’universalité de l’Église ». « Parce que l’Église catholique vit dans l’interrelation entre l’unité de l’Église universelle et la multiplicité des Églises locales, explique le cardinal, elle peut montrer par l’exemple que l’unité et la multiplicité ne sont pas opposées même dans l’œcuménisme, mais se soutiennent mutuellement. »
Le cardinal Koch affirme que « tous les papes qui se sont succédé depuis le Concile ont montré un cœur ouvert à la cause œcuménique et il y a eu une grande continuité et cohérence entre eux ».
En parlant de la contribution spécifique de chacun des papes dans le mouvement œcuménique, le cardinal suisse fait observer que le pape Jean XXIII « était bien conscient que la restauration de l’unité des chrétiens est fondamentale pour le renouveau de l’Église catholique ». Le pape Paul VI a « contribué de manière significative à l’adoption par le Concile du décret sur l’œcuménisme Unitatis redintegratio ». Il a été « un pape aux grands gestes œcuméniques, notamment envers l’orthodoxie et la communion anglicane, et a été le premier pape à visiter le Conseil œcuménique des Églises ».
Saint Jean-Paul II, rappelle le cardinal, « était convaincu que le troisième millénaire serait amené à faire face à la grande tâche de restaurer l’unité qui avait été perdue, et il voyait dans le témoignage des martyrs qui appartenaient à différentes Églises une aide essentielle ».
Pour le pape Benoît XVI, « l’œcuménisme, à un niveau profond, est une question de foi et, par conséquent, un devoir primordial du successeur de Pierre ».
Pour le pape François, explique le cardinal, « il est fondamental que les différentes communautés ecclésiales marchent ensemble sur le chemin de l’unité, car l’unité grandit au fur et à mesure qu’elles marchent. Il insiste également sur l’importance de l’œcuménisme du sang ».
L’encyclique de saint Jean-Paul II Ut Unum Sint
Évoquant le 25e anniversaire de l’encyclique du pape Jean-Paul II Ut Unum Sint, publiée le 25 mai 1995, le cardinal Koch souligne que « son importance réside principalement dans le fait que, pour la première fois dans l’histoire, un pape a écrit une encyclique sur l’œcuménisme ».
Trente ans après la fin du Concile Vatican II, le pape polonais « a rappelé que l’Église catholique est ‘irréversiblement engagée’ dans la voie œcuménique ».
Le cardinal parle aussi d’une « autre initiative surprenante du pape » Jean-Paul II : « Conscient, d’une part, que le ministère pétrinien représente l’un des plus grands obstacles à la restauration de l’unité et convaincu, d’autre part, que le ministère de l’évêque de Rome est d’une importance constitutive pour l’unité de l’Église, Jean-Paul II a invité toute la communauté œcuménique à s’engager dans un ‘dialogue fraternel, patient’ sur la primauté de l’évêque de Rome, dans le but de trouver une forme d’exercice de la primauté «ouverte à une situation nouvelle, mais sans renoncement aucun à l’essentiel de sa mission’.»
Le cardinal Koch affirme qu’il s’agit d’une « initiative très prometteuse, qui a également été reprise à différentes occasions par le pape Benoît XVI et le pape François ».
Un Vademecum œcuménique pour les évêques
Pour marquer ce double anniversaire (de l’encyclique et du dicastère), le Conseil pontifical publiera cette année un nouveau document : un Vademecum œcuménique pour les évêques.
Le document, explique le président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, « a pour but d’aider les évêques à comprendre plus en profondeur et à mettre en pratique leur responsabilité œcuménique ».
Le ministère pastoral de l’évêque « doit être compris », selon les paroles du cardinal, « d’une façon plus large que l’unité de son Église, puisqu’il inclut également les baptisés non catholiques ». « Dans les différentes églises locales, les évêques diocésains sont donc les premiers responsables de l’unité des chrétiens. »
Le Vademecum est aussi « spécialement conçu pour présenter aux évêques nouvellement nommés leurs tâches, qui consistent à offrir un accompagnement à tous les membres de l’Église afin qu’ils puissent remplir leur devoir qui consiste à participer au mouvement œcuménique ».
Une autre initiative du Conseil Pontifical pour cet anniversaire est la publication de la revue Acta Œcumenica, présentée par le cardinal : « Aujourd’hui, explique-t-il, nombreux sont les fidèles qui ont l’impression que l’œcuménisme est dans une impasse. Cette impression est largement due à une information insuffisante concernant les développements et les progrès de l’œcuménisme. Il est donc important de s’assurer que les résultats œcuméniques les plus importants soient bien reçus. … La revue Acta Œcumenica vise ainsi à faciliter cet accueil, principalement en fournissant des informations sur l’engagement œcuménique du pape François et les activités œcuméniques du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. »
Le magazine « veut être un support à la formation œcuménique, un aspect d’une importance fondamentale pour l’avenir », ajoute le cardinal Koch.