Pour Joseph Ratzinger, on peut rapprocher le silence du Samedi Saint du silence de Jésus-Christ qui « dort dans une barque battue par la tempête »: L’Osservatore Romano en italien du 10 avril 2020 publie trois méditations de Joseph Ratzinger sur le Samedi Saint.
Benôît XVI es né, rappelons-le, un Samedi Saint, le 16 avril 1927, et ce sera aussi le jour de son baptême. Il en fait une lecture spirituelle lors de son 85e anniversaire, le 16 avril 2012 et il affirme: « La bonté de Dieu est plus forte que tout mal en ce monde ».
Ces trois méditations ont été publiées en allemand sous le titre Meditationen zur Karwoche (Kyrios-Verlag, Freising 1969) et en français par exemple dans L’angoisse d’une absence, supplément à 30Jours, n. 3, mars 1994: c’est le titre retenu par le quotidien du Vatican, L’angoscia di un’assenza. Le texte a été publié en italien dans le volume intitulé Il sabato della storia (Jaca Book).
Dans la seconde méditation, il évoque le « Dieu caché »: « Le Dieu caché en ce monde constitue le vrai mystère du Samedi saint ».
La troisième méditation s’achève par cette prière: « Accorde-nous de marcher tendus vers l’avenir, à la rencontre du jour de ta venue.
Le futur Benoît XVI fait observer, dans cette troisième méditation, la structure du Triduum pascal: « Dans le bréviaire romain, la liturgie du Triduum sacré est structurée avec un soin particulier: dans sa prière, l’Église veut pour ainsi dire nous transférer dans la réalité de la passion du Seigneur et, au-delà des mots, au centre spirituel de ce qui est arrivé. Si l’on voulait tenter de caractériser par quelques mots de la prière liturgique du Samedi saint, il faudrait surtout parler de l’effet de paix profonde qui émane d’elle. »
« Si le Vendredi saint présente à nos yeux le visage défiguré du Crucifié, la liturgie du Samedi saint, elle, s’inspire plutôt de l’image de la croix chère à l’Église antique: à la croix entourée de rayons lumineux, signe de la mort comme de la résurrection », précise Joseph Ratzinger.
Il souligne le message d’espérance: « Pour le christianisme antique, la croix est donc surtout un signe d’espérance. Elle n’implique pas tant une référence au Seigneur passé qu’au Seigneur qui va venir. Certes, il était impossible de se soustraire à la nécessité intrinsèque que, le temps passant, le regard se tournât aussi vers l’événement advenu: contre toute fuite dans le spirituel, contre toute méconnaissance de l’incarnation de Dieu, il fallait que fût défendue la prodigalité profondément inimaginable de l’amour de Dieu, qui, par amour de la misérable créature humaine, s’est fait lui-même homme, et quel homme! Il fallait défendre la sainte folie de l’amour de Dieu, qui n’a pas choisi de prononcer une parole de puissance, mais de parcourir la voie de l’impuissance pour clouer au pilori notre rêve de puissance et le vaincre de l’intérieur. »
Et d’insister: « N’avons-nous pas un peu trop oublié la relation entre croix et espérance, l’unité entre l’Orient et la direction de la croix, entre passé et avenir, qui existe dans le christianisme? L’esprit de l’espérance qui souffle sur les prières du Samedi saint devrait de nouveau pénétrer toute notre façon d’être chrétien. Le christianisme n’est pas seulement une religion du passé, mais aussi, dans une mesure égale, de l’avenir; sa foi est en même temps espérance, car Jésus-Christ n’est pas seulement le mort et le ressuscité, mais aussi Celui qui va venir. »
Il conclut par cette prière: « O Seigneur, éclaire nos âmes par ce mystère de l’espérance, afin que nous reconnaissions la lumière qui a rayonné de ta croix; accorde-nous, comme chrétiens, de marcher tendus vers l’avenir, à la rencontre du jour de ta venue. Amen. »