Visite à l'Institut pontifical oriental © L'Osservatore Romano

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Institut pontifical oriental : recherche scientifique et soutien aux chrétiens d’Orient

Message du pape pour le centenaire de sa fondation (Traduction intégrale)

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Le pape François invite les enseignants de l’Institut pontifical oriental à mettre la recherche scientifique « à la première place » et les exhorte à soutenir les Églises martyres d’Orient par leur « capacité d’écoute de la vie et de réflexion théologique ». « Cet institut, dit-il, grâce à la recherche, à l’enseignement et au témoignage, a la tâche d’aider nos frères et sœurs à renforcer et à consolider leur foi devant les terribles défis qu’ils doivent affronter ».
Le pape François a remis un message au cardinal Leonardo Sandri, grand chancelier de l’Institut pontifical oriental, à l’occasion du centenaire de la fondation de l’Institut pontifical oriental et de la Congrégation pour les Églises orientales.
À l’égard des Églises orientales non catholiques, « l’Institut pontifical oriental a une mission œcuménique à mener, en soignant les relations fraternelles, l’étude approfondie des questions qui semblent encore nous diviser et la collaboration effective sur des thèmes de première importance ». D’autre part, « la tâche de l’Institut est aussi de faire connaître les trésors des riches traditions des Églises orientales au monde occidental », a ajouté le pape.
Voici notre traduction du message du pape François.
HG
Message du pape François
À mon vénéré frère le cardinal Leonardo Sandri, grand chancelier de l’Institut pontifical oriental.
En ce 100anniversaire de la fondation de l’Institut pontifical oriental, quelques mois après ce qui est aussi le 100e anniversaire de l’institution de la Congrégation pour l’Église orientale (cf. Benoît XV, Motu Proprio Dei Providentis, 1er mai 1917), j’ai le plaisir de vous adresser, vénéré frère, ainsi qu’à toute la communauté académique, mes salutations cordiales.
Anticipant de presqu’un demi siècle le Décret conciliaire Orientalium Ecclesiarum, mon vénéré prédécesseur voulut attirer l’attention sur l’extraordinaire richesse des Églises orientales en fondant, précisément ici, à Rome, le 15 octobre 1917, l’Institut pontifical oriental. Bien qu’au cœur de l’agitation du premier conflit mondial, le pontife sut réserver aux Églises d’Orient une attention spéciale.
Pour cette fondation, Benoît XV se référa à cette ouverture à l’Orient qui fut initiée lors du Congrès eucharistique de Jérusalem de 1893, formant le souhait de créer un centre d’études qui devait être – comme il l’a ensuite affirmé dans le document fondateur – « un siège approprié d’études supérieures sur les questions orientales », destiné à former « aussi les prêtres latins qui voudront exercer le ministère sacré auprès des Orientaux ». Dès le début, on voulait que « ce centre d’études [soit] aussi ouvert aux Orientaux, qu’ils soient unis ou qu’il s’agisse de ceux que l’on appelle orthodoxes », de telle sorte que « [progresse] en même temps, et dans une égale mesure, l’exposition de la doctrine catholique et de la doctrine orthodoxe » (Benoît XV, Motu Proprio Orientis catholici, 15 octobre 1917 : AAS9 [1917], 532). Avec cette dernière précision, le fondateur situait la nouvelle institution dans un horizon que nous pouvons dire aujourd’hui éminemment œcuménique.
Pour résoudre les problèmes initiaux de l’Institut, Pie XI, accueillant la suggestion du premier président, le bienheureux Ildefonso Schuster, décida en 1922 de le confier à la Compagnie de Jésus (Lett. Decessor Noster, 14 septembre 1922 : AAS 14 [1922], 545-546), puis il assigna à l’Institut, près de la Basilique Sainte-Marie-Majeure, son propre siège, qui ouvrit ses portes le 14 novembre 1926.
En 1928, avec l’encyclique Rerum Orientalium sur la promotion des études orientales, le pape invitait chaleureusement les évêques à envoyer des étudiants à l’Institut oriental, afin de garantir dans tous les séminaires la présence d’un enseignant capable de transmettre au moins quelques éléments d’études orientales (cf. AAS 20 [1928], 283-284). Cette encyclique fut suivie, moins d’un mois plus tard, du Motu Proprio Quod maxime, par lequel les Instituts biblique et oriental étaient associés à l’Université grégorienne (cf. AAS 20 [1928], 310). L’année suivante, Pie XI procédait à la fondation, à côté de l’Institut oriental, du Collège Russicum, dont la direction était également confiée à la Compagnie de Jésus (cf. Cost. ap. Quam curam, 15 août 1929 : AAS 22 [1930], 146-148).
Depuis lors, la plus grande nouveauté a été, en 1971, la fondation de la Faculté de droit canonique oriental, jusqu’ici la seule existante (cf. Congr. per l’Educ. Catt., Decr. Canonicae Orientalium, 7 juillet 1971 : AAS 63 [1971], 791-792), à côté de celle qui s’identifiait à l’Institut et qui, à partir de ce moment, fut désignée comme Faculté des sciences ecclésiastiques orientales, articulée en trois sections : théologico-patristique, liturgique et historique.
Une autre nouveauté importante fut ensuite le transfert, qui eut lieu en 1993, du titre de Grand Chancelier de l’Institut oriental par le préfet de la Congrégation pour l’éducation catholique au préfet de la Congrégation pour les Églises orientales. Ainsi, la compétence proprement académique sur l’Institut, exercée par la Congrégation pour l’éducation catholique, restant ferme, les deux institutions « orientales », par ailleurs nées la même année, étaient appelées à « promouvoir une plus étroite collaboration et unité d’intentions » dans le service de l’Orient chrétien (Rescrit de la Secrétairerie d’État, 31 mai 1993).
Ce regard sur l’histoire nous conduit à nous interroger sur la mission que devra accomplir cet Institut à l’avenir.
Si, à ses débuts, fut perçu un certain conflit entre l’étude et la pastorale, aujourd’hui nous devons reconnaître que cette antinomie n’existe pas. Il ne s’agit pas de dire « aut… aut », mais « et… et ». J’invite donc les enseignants à mettre à la première place de leurs engagements la recherche scientifique, à l’exemple de leurs prédécesseurs qui se sont distingués dans la production de contributions prestigieuses, de monographies érudites, d’éditions soignées des sources liturgiques, spirituelles, archéologiques et canoniques, et même d’audacieuses œuvres collectives, comme la publication des Actes du Concile de Florence et l’édition critique des Anaphorae Syriacae. Tout le monde connaît aussi la contribution que les enseignants de l’Institut on apportée, d’abord à la rédaction des documents conciliaires Orientalium Ecclesiarum et Unitatis Redintegratio (1964), et ensuite à la préparation du Codex Canonum Ecclesiarum Orientalium (1990).
D’autre part, les temps que nous vivons et les défis que la guerre et la haine lancent aux racines mêmes de la cohabitation pacifique dans les terres martyres d’Orient, voient l’Institut encore une fois exactement comme il y a cent ans, au centre d’un carrefour providentiel.
Tout en maintenant intactes l’attention et l’application à la recherche traditionnelle, je vous invite tous à offrir à ces Églises et à toute la communauté ecclésiale la capacité d’écoute de la vie et de réflexion théologique pour aider à en soutenir l’existence et le chemin. Beaucoup des étudiants et des professeurs ressentent ce moment important de l’histoire. Cet Institut, grâce à la recherche, à l’enseignement et au témoignage, a la tâche d’aider nos frères et sœurs à renforcer et à consolider leur foi devant les terribles défis qu’ils doivent affronter. Il est appelé à être le lieu propice pour favoriser la formation d’hommes et de femmes, de séminaristes, de prêtres et de laïcs, en mesure de rendre compte de l’espérance qui les anime et les soutient (cf. 1 P 3,15) et capable de collaborer avec la mission réconciliatrice du Christ (cf. 2 Cor 5,18).
J’exhorte les enseignants à rester ouverts à toutes les Églises orientales, considérées non seulement dans leur configuration ancienne, mais aussi dans leur actuelle diffusion et parfois dispersion géographique tourmentée. En lien avec les vénérables Églises orientales, avec lesquelles nous sommes encore en chemin vers la pleine communion et qui poursuivent leur chemin de façon autonome, l’Institut pontifical oriental a une mission œcuménique à mener, en soignant les relations fraternelles, l’étude approfondie des questions qui semblent encore nous diviser et la collaboration effective sur des thèmes de première importance, dans l’attente que, quand le voudra le Seigneur et de la manière que lui seul connaît, « tous soient un » (Jn 17,21). À cet égard, la présence croissante d’étudiants appartenant aux Églises orientales non catholiques confirme la confiance que celles-ci mettent dans l’Institut oriental.
D’autre part, la tâche de l’Institut est aussi de faire connaître les trésors des riches traditions des Églises orientales au monde occidental, de sorte que celles-ci soient compréhensibles et puissent être assimilées.
Constatant que de nombreux étudiants des divers collèges orientaux de Rome fréquentent des universités dans lesquelles ils reçoivent une formation qui n’est pas toujours en harmonie avec leurs traditions, j’invite à réfléchir sur ce qui pourrait être fait pour combler cette lacune.
Avec l’écroulement des régimes totalitaires et des diverses dictatures, qui a malheureusement, dans certains pays, créé des conditions favorables à la propagation du terrorisme international, les chrétiens des Églises orientales expérimentent le drame des persécutions et une diaspora toujours plus préoccupante. Sur ces situations, personne ne peut fermer les yeux. En tant que portion de « l’Église en sortie » (cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium, 20-24), l’Institut oriental est appelé à se mettre dans une attitude d’écoute priante, pour recevoir ce que le Seigneur veut en ce moment précis et, en cohérence avec le « magis » ignacien, chercher de nouvelles voies à parcourir. Il s’agira, par exemple, de stimuler les futurs pasteurs et d’insuffler à leurs fidèles orientaux, où qu’ils se trouvent, un amour profond pour leurs traditions et leur rite d’appartenance ; et, en même temps, de sensibiliser les évêques des diocèses latins à prendre en charge les fidèles orientaux géographiquement déplacés et privés de leur hiérarchie, en assurant aux personnes et aux familles une assistance spirituelle et humaine adéquate.
J’adresse à la Compagnie de Jésus une chaleureuse invitation à mettre en œuvre, avec les moyens nécessaires aujourd’hui, ce que Pie XI prescrivait déjà en 1928 à propos du « Consorzio Gregoriano », destiné à favoriser, avec une remarquable économie en hommes et en moyens, une plus grande unité d’intentions. À côté de la mission mise en œuvre, respectivement par l’Université grégorienne et par l’Institut biblique, il existe celle, non moins importante de l’Institut oriental. Il est donc urgent de garantir à cette dernière institution un noyau stable de formateurs jésuites, auxquels d’autres pourront se joindre de manière louable. S’inspirant de la pédagogie ignacienne et s’appuyant sur un fécond discernement communautaire, les membres de la communauté, autant religieuse qu’académique, sauront trouver les formes les plus adaptées pour initier à la discipline austère de la recherche et aux exigences de la pastorale ceux que les Églises voudront leur confier.
En m’unissant à l’action de grâce envers Dieu pour le travail accompli pendant ces 100 années, j’espère que l’Institut pontifical oriental poursuivra sa mission avec un élan renouvelé, en étudiant et diffusant avec amour et honnêteté intellectuelle, avec une rigueur scientifique et une perspective pastorale les traditions des Églises orientales dans leur diversité liturgique, théologique, artistique et canoniste, répondant toujours mieux aux attentes du monde d’aujourd’hui pour créer un avenir de réconciliation et de paix. C’est avec ces vœux que je vous donne, vénéré frère, ainsi qu’à toute la communauté de cet Institut, une bénédiction apostolique particulière.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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