Académie pour la vie : les dénonciations du pape, point par point

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« L’alliance de l’homme et de la femme … n’est pas un handicap »

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Le « culte du moi », « l’utopie du neutre » qui nie la différence sexuelle, « l’avilissement de l’humanisme », des « villes toujours plus hostiles aux enfants et des communautés toujours plus inhospitalières pour les personnes âgées » : ce sont les dénonciations du pape François devant les participants à la XXIIIe Assemblée générale de l’Académie pontificale pour la vie, qu’il a reçus au Vatican, le 5 octobre 2017. Il a appelé à « recomposer la fracture entre les générations » et à une « vraie compassion ».
Evoquant le thème de la rencontre – « Accompagner la vie. Nouvelles responsabilités à l’ère technologique » – le pape a souligné que « la puissance des biotechnologies, qui aujourd’hui déjà permet des manipulations de la vie impensables jusqu’à hier, pose des questions redoutables ». « Il est par conséquent urgent, a-t-il estimé, d’intensifier l’étude et la confrontation sur les effets de cette évolution de la société dans le sens technologique pour articuler une synthèse anthropologique qui soit à la hauteur de ce défi majeur. »
Le culte du moi
Dans une culture « centrée obsessionnellement sur la souveraineté de l’homme », avec une « egolâtrie », un « culte du moi, sur l’autel duquel on sacrifie tout », l’homme court le risque de devenir « incapable de tourner les yeux vers les autres et le monde », a noté le pape François dans son long discours : la diffusion de cette attitude a « de très graves conséquences pour toutes les affections et les liens de la vie ».
Il ne s’agit pas, a-t-il précisé, « de nier et de réduire la légitimité de l’aspiration individuelle à la qualité de la vie et l’importance des ressources économiques et des moyens techniques qui peuvent la favoriser ». Mais l’attitude qui tend à traiter la vie comme « une ressource à exploiter ou à éliminer en fonction du pouvoir et du profit, ne peut être passée sous silence ».
« Des hommes, des femmes et des enfants de tous les coins du monde expérimentent avec amertume et douleur les promesses illusoires de ce matérialisme technocratique » tandis que grandissent « les territoires de la pauvreté et du conflit, du rejet et de l’abandon, du ressentiment et du désespoir », a encore constaté le pape : « Un progrès scientifique authentique et technologique devrait au contraire inspirer des politiques plus humaines. »
L’utopie du neutre
Evoquant la « révolution culturelle » actuelle, il a appelé à « reconnaître honnêtement les retards et les manques », comme les « formes de subordination qui ont tristement marqué l’histoire des femmes ».
Le pape François s’est aussi arrêté sur « l’hypothèse récemment avancée de rouvrir la voie de la dignité de la personne en neutralisant radicalement la différence sexuelle et, donc, l’entente de l’homme et de la femme » : une hypothèse qui « n’est pas juste » car « au lieu de s’opposer aux interprétations négatives de la différence sexuelle, qui mortifient sa valeur irréductible pour la dignité humaine, on veut supprimer de fait cette différence, en proposant des techniques et des pratiques qui la rendent insignifiante pour le développement de la personne et pour les relations humaines ».
Pour le pape, « l’utopie du “neutre” enlève à la fois la dignité humaine de la constitution sexuellement différente et la qualité personnelle de la transmission générative de la vie. La manipulation biologique et psychique de la différence sexuelle, que la technologie biomédicale laisse entrevoir comme complétement disponible au choix de la liberté – alors qu’elle ne l’est pas ! –, risque ainsi de démanteler la source d’énergie qui alimente l’alliance de l’homme et de la femme et la rend créative et féconde. »
« En tant qu’elle est reçue comme un don, la vie s’exalte dans le don : la générer nous régénère, la dépenser nous enrichit », a-t-il affirmé en appelant à « relever le défi posé par l’intimidation exercée à l’égard de la génération de la vie humaine, comme si c’était une mortification de la femme et une menace pour le bien-être collectif. L’alliance générative de l’homme et de la femme … n’est pas un handicap ».
Des murs sans portes ni fenêtres
« Le monde a besoin de croyants… qui soient résolument déterminés à recomposer la fracture entre les générations », a insisté le pape François, car « cette fracture interrompt la transmission de la vie » : les jeunes n’ont plus de guide et les personnes âgées sont rejetées. La vie de ces dernières doit être « honorée pour ce qu’elle a donné généreusement, pas être écartée pour ce qu’elle n’a plus ».
« La passion pour l’accompagnement et le soin de la vie… demande la réhabilitation d’un ethos de la compassion ou de la tendresse » : il s’agit de « retrouver la sensibilité pour les différents âges de la vie, en particulier pour ceux des enfants et des personnes âgées. Tout ce qui en eux est délicat et fragile, vulnérable et corruptible, n’est pas une affaire qui doit concerner exclusivement la médecine et le bien-être. »
« Une société dans laquelle tout peut être seulement acheté et vendu, bureaucratiquement régulé et techniquement établi, a dénoncé le pape, est une société qui a déjà perdu le sens de la vie. Elle ne le transmettra pas aux petits enfants, elle ne le reconnaîtra pas dans les parents âgés. C’est pourquoi, presque sans s’en rendre compte, nous édifions désormais des villes toujours plus hostiles aux enfants et des communautés toujours plus inhospitalières pour les personnes âgées, avec des murs sans portes ni fenêtres : ils devraient protéger, en réalité ils étouffent. »
L’avilissement de l’humanisme
La source d’inspiration doit être « la Parole de Dieu, qui éclaire l’origine de la vie et son destin », a souligné le pape François en souhaitant « une théologie de la Création et de la Rédemption qui sache se traduire dans les paroles et dans les gestes de l’amour pour toute vie et pour toute la vie » ; en effet « les hommes, les femmes, les enfants de la terre … sont la vie du monde que Dieu aime et veut sauver, sans exclure personne ».
« Le témoignage de la foi dans la miséricorde de Dieu… est une condition essentielle pour la circulation de la vraie compassion entre les diverses générations. Sans elle, la culture de la ville séculière n’a aucune possibilité de résister à l’anesthésie et à l’avilissement de l’humanisme », a affirmé le pape.
Il a conclu en encourageant : « L’accompagnement responsable de la vie humaine, de sa conception et pour toute sa durée jusqu’à sa fin naturelle, est un travail de discernement et d’intelligence d’amour par des hommes et des femmes libres et passionnés, et par des pasteurs non mercenaires. »

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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