« L’autonomisation des jeunes par l’éducation et leur engagement en tant qu’agents du changement offre un grand potentiel pour parvenir à un changement positif dans la société, en particulier compte tenu du rôle fondamental de l’éducation », affirme Mgr Urbanczyk, chef de la délégation du Saint-Siège à la 26èmesession de la Commission sur la prévention du crime et la justice pénale, réunie à Vienne (Autriche) du 22 au 28 mai 2017, dans el cadre de l’OSCE.
Intervenant sur le thème : « Stratégies globales et intégrées de prévention du crime : participation publique, politiques sociales et éducation à l’appui de l’État de droit, Mgr Urbanczyk a demandé que l’on accorde « la priorité à la lutte contre le chômage, la pauvreté, la marginalisation et l’exclusion sociales chez les jeunes » afin de les empêcher de devenir « des victimes ou des délinquants ».
Tout en reconnaissant « l’impact positif » de la coopération avec les organisations non gouvernementales, le secteur privé et les milieux universitaires, il a aussi invité à ce qu’un « engagement similaire » ait lieu « avec les organisations familiales et religieuses » qui éduquent aux valeurs et à l’éthique sociale.
Voici notre traduction intégrale de l’intervention du représentant du Saint-Siège.
CR
Intervention de Mgr Urbanczyk
Monsieur le Président,
Le Saint-Siège est heureux de participer à cette 26ème session de la Commission sur la prévention du crime et la justice pénale et félicite votre Excellence ainsi que le Conseil d’administration de la Commission pour le travail approfondi entrepris dans la préparation et la direction de cette session.
Etat de droit et prévention du crime
L’Etat de droit s’efforce d’intégrer la vertu de la justice dans la société humaine et, par conséquent, il fortifie le bien commun par le respect de la loi et en assurant la souveraineté de la loi, à l’exclusion du droit arbitraire, corrompu ou partiel. (1) Pour réaliser la mise en œuvre de l’Etat de droit dans nos sociétés, il doit être promu non seulement par les forces de l’ordre, ou par le pouvoir judiciaire, mais aussi par la société dans son ensemble, dans des efforts unis et coordonnés. Par conséquent, le Saint-Siège considère qu’il est très approprié que la Commission, au cours de cette session, se concentre sur les « stratégies de prévention du crime globales et intégrées: participation du public, politiques sociales et éducation à l’appui de l’Etat de droit » .2
Permettez-moi donc d’aborder, bien que brièvement, les trois points centraux de nos discussions: la participation du public, les politiques sociales et l’éducation; et, d’une manière particulière, comment ces trois points encouragent une éthique sociale et des valeurs qui servent d’antidote à la criminalité dans nos États et dans la communauté internationale.
Participation du public – y compris les organisations familiales et religieuses
Le Saint-Siège se félicite d’une approche efficace et intégrée qui comprend toutes les institutions et tous les organes concernés afin de rechercher des mesures qui réduisent le risque de crimes et leurs effets potentiellement nocifs sur les individus et la société. La Déclaration de Doha affirme à juste titre que la coopération et les partenariats sont essentiels à l’avancement de la prévention du crime dans la société et souligne l’impact positif que peut avoir un engagement dans ces entreprises avec les organisations non gouvernementales, le secteur privé et les milieux universitaires. Un engagement similaire devrait également avoir lieu avec les organisations familiales et religieuses.
«La famille, la communauté naturelle dans laquelle la nature sociale humaine est vécue, apporte une contribution unique et irremplaçable au bien de la société.» 3 «La famille est le lieu principal dans lequel nous commençons à « respirer » les valeurs et les idéaux, car nous développons notre pleine capacité pour la vertu et la charité » 4. Malheureusement, la vie familiale moderne est mise quotidiennement à l’épreuve par de nombreux problèmes. Les cas de pauvreté ou de consommation excessive, le culte des apparences, la vie frénétique et les pseudo-modèles de vie familiale propagés par les médias contribuent à la rupture des liens familiaux et provoquent ou aggravent les dysfonctionnements associés aux familles et aux parents impliqués dans le crime. Ce sont des facteurs de risque importants qui peuvent conduire les jeunes à devenir des délinquants.
Dans la prévention de la criminalité et la promotion du bien commun, la famille, en tant que première et principale école de justice et de charité, travaille avec les organisations sociales et cherche un soutien dans ces efforts communs. Parmi les organisations sociales, il faut accorder une place particulière aux organisations religieuses qui s’efforcent de promouvoir la paix, la fraternité et les soins aux pauvres et aux faibles. Par leur appartenance à leurs églises locales, temples, synagogues ou mosquées et leurs associations de bienfaisance ou ministères d’éducation, les hommes et les femmes de foi donnent une expression pratique de leurs valeurs religieuses dans la société. Ils atteignent des milliards et ils fournissent une arène importante pour l’enseignement des valeurs et de l’éthique sociale qui non seulement évitent le crime, mais aussi contester activement le crime lui-même.
Les politiques sociales qui donnent aux jeunes de l’espoir
En ce qui concerne les politiques sociales, ma délégation estime qu’il est important de se concentrer sur les efforts visant à lutter contre l’impact de la pauvreté, le manque de possibilités de travail et d’autres formes de marginalisation, car tous ces phénomènes alimentent le crime et les activités criminelles. L’amélioration des conditions socio-économiques et la prévention du crime se renforcent mutuellement et se révèlent mutuellement bénéfiques. L’impact positif de la baisse des taux de criminalité sur la croissance économique et la participation dans une communauté témoigne de cela.
D’une manière particulière, il faudrait accorder la priorité à la lutte contre le chômage, la pauvreté, la marginalisation sociale et l’exclusion chez les jeunes « afin de protéger les enfants et les jeunes contre la marginalisation et l’exclusion sociales et de réduire leur risque de devenir des victimes ou des délinquants » (5) puisqu’ « ils n’ont rien à perdre ». Le pape François a appelé à plusieurs reprises les dirigeants politiques à reconnaître et à activer la grande ressource des jeunes parmi nous, notant cependant que, souvent, nous avons « condamné nos jeunes à ne pas avoir de place dans la société, parce que nous les avons poussés lentement vers les marges de la vie publique » (6), les forçant à entrer dans une existence qui repose trop souvent sur des activités criminelles.
L’éducation pour contribuer au bien commun
Le pape a appelé à une approche plus holistique face aux maux de notre monde moderne, y compris le crime: « Une nouvelle éthique civile n’arrivera que lorsque les dirigeants de la vie publique réorganiseront le lien social […]. Ce n’est pas seulement une question de pain. Nous parlons de travail, nous parlons d’éducation » […] (7, et d’une éducation qui contribue au bien commun.
Par conséquent, le Saint-Siège reconnaît que l’autonomisation des jeunes par l’éducation et leur engagement en tant qu’agents du changement offre un grand potentiel pour parvenir à un changement positif dans la société, en particulier compte tenu du rôle fondamental de l’éducation pour la «formation de la personne à la poursuite de sa fin ultime et du bien de la [société] « (8), la transmission des valeurs, une éthique du travail et un sentiment de solidarité avec toute la famille humaine.
Dans son récent voyage en Egypte, le pape François a déclaré: « une éducation dans l’ouverture respectueuse et dans un dialogue sincère avec les autres […] représente le meilleur moyen de construire l’avenir ensemble […]. Nous devons accompagner les jeunes en les aidant sur la voie de la maturité […] en travaillant patiemment pour la croissance de la bonté « . (9) Grâce à l’éducation scolaire, aux programmes et initiatives parascolaires qui collaborent étroitement avec leurs familles, les enfants et les jeunes peuvent «acquérir progressivement un sens mûr de la responsabilité en s’efforçant sans cesse de former leur propre vie correctement et en poursuivant la vraie liberté» (10), y compris l’absence de crime.
Conclusion
Pour terminer, le Saint-Siège réitère sa gratitude pour les efforts déjà entrepris par les États pour assurer des politiques unifiées, larges et inclusives afin de prévenir les crimes qui favorisent la dignité de la personne humaine. Toutes les délégations peuvent être assurées du soutien continu du Saint-Siège et de sa contribution à ce noble objectif.
Merci, Monsieur le Président.
NOTES
1 Cf. Compendium de la Doctrine sociale de l’Église, 408.
2 CCPCJ Secrétariat, Guide pour la discussion thématique, 1.
3 Compendium, 213.
4 Pape François, Discours aux participants au Colloque international sur la complémentarité de l’homme et de la femme, 17 novembre 2014.
5 CCPCJ Secrétariat, Guide pour la discussion thématique, 27.
6 Pape François, Homélie des vêpres, 31 décembre 2016.
7 Pape François, Audience générale, 3 juin 2015.
8 Concile Vatican II, Déclaration sur l’éducation chrétienne, Gravissimum educationis, 28 octobre 1965, 1.
9 Pape François, Discours aux Participants à la Conférence internationale sur la paix, 28 avril 2017.
10 Concile Vatican II, Déclaration sur l’éducation chrétienne, Gravissimum educationis, 28 octobre 1965, 1.
© Traduction de Zenit, Constance Roques
Mgr Janusz Urbanczyk - Stift Klosterneuburg
Prévention du crime: priorité aux jeunes, par Mgr Urbanczyk (traduction complète)
Commission de l’OSCE à Vienne