János Esterházy © Wikimedia Commons

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Il y a 60 ans mourait János Esterházy, promoteur de la fraternité entre les nations

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Il a facilité la fuite de nombreux juifs de la Pologne occupée par les nazis

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Il y a 60 ans, János Esterházy (1901-1957), « promoteur de la fraternité entre les nations », « homme d’une foi catholique profonde », qui a facilité la fuite de la Pologne occupée par les nazis de nombreuses personnalités politiques et de nombreux juifs, est décédé dans la prison-forteresse de Mirov, en Tchécoslovaquie.
L’Osservatore Romano en italien lui rend hommage en publiant l’histoire de sa vie et de ses années de martyre dans les prisons soviétiques et tchécoslovaques.
Accusé d’être collaborateur des nazis, János Esterházy a été réhabilité, en 1993, par la Russie qui avait reconnu qu’il avait été victime d’un procès politique. En 2009, la Pologne lui a conféré la reconnaissance de la « Pologne restituée » pour son aide aux Polonais pendant la guerre. En 2011, l’Anti-Defamation League l’a honoré par le Prix Jan Karski Courage to Care, pour avoir sauvé la vie de nombreux juifs.
Descendant de deux des familles aristocratiques les plus importantes de Hongrie et de Pologne, le comte János Esterhazy est né à Nyitraujlak (aujourd’hui Velké Zaluzie), le 14 mars 1901, sur le territoire de l’actuelle Slovaquie. Dans les années 1930, il entre en politique pour représenter la communauté des Hongrois de Tchécoslovaquie. Président du Parti chrétien social, il est guidé par sa foi chrétienne et par sa conviction sur la nécessité d’une réconciliation entre Tchèques, Slovaques et Hongrois.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il aide de nombreux politiques et de nombreux juifs à fuir la Pologne occupée, puis des politiques tchécoslovaques qui doivent fuir la Slovaquie, et des juifs slovaques.
Aussitôt après la guerre, János Esterhazy veut rencontrer le commissaire pour les affaires intérieures de la Tchécoslovaquie, le communiste Gustav Husak, pour parler de la cause de la communauté hongroise, mais il est arrêté, accusé d’avoir été nazi et est remis aux Soviétiques. Déporté en Union soviétique, il est condamné, après d’indicibles tortures, à dix ans de travaux forcés.
Entre-temps, János Esterhazy est condamné à mort comme criminel de guerre nazi par le tribunal national slovaque de Bratislava. En 1949, il est remis  aux autorités tchécoslovaques pour que la peine capitale soit exécutée. Grâce à l’intervention de différentes personnalités qui connaissaient la vérité, il obtient la « grâce » de la prison à vie.
Soigné pendant quelques semaines dans l’hôpital de Bratislava, János Esterhazy aurait pu fuir, mais il refuse l’aide offerte disant qu’il a la conscience propre et qu’il ne veut pas abandonner sa patrie. « Tu sais, dit-il à sa sœur, j’avais toujours prié pour pouvoir revenir ici où je pouvais au moins assister à la messe, et cela m’a déjà été accordé ».
L’histoire de ses années de souffrances dans les prisons est connue par ses journaux intimes et par ses lettres à sa jeune sœur, Maria. Il reste aussi les témoignages de certains de ses compagnons de prison, en Sibérie comme en Tchécoslovaquie (l’écrivain russe Alexandre Soljenitsyne, Prix Nobel de littérature en 1970, le mentionne dans son roman Le premier cercle).
János Esterhazy affronte la prison avec un abandon entier à la volonté de la divine Providence. « Tout va bien comme le veut le Bon Dieu, écrit-il. S’il a pensé que c’était bien ainsi, alors, cela va bien aussi pour moi. Qui suis-je pour faire objection à la volonté de Dieu ? »
« Sa foi en la grâce divine fut plus forte que toute haine et toute rancœur à l’égard de ceux qui lui avaient causé tant de terribles souffrances », écrivait Dagmar Babcanova, ambassadrice de Slovaquie près le Saint-Siège.
Esterhazy pratique de petites œuvres de charité parmi toutes les privations, poursuit la prière constante et est soutenu par la « nourriture la plus importante », comme il écrit en code dans une lettre à sa sœur, c’est-à-dire par l’Eucharistie. Au début, l’hostie consacrée, cachée entre les biscuits, lui est envoyée par sa sœur. Dans certaines prisons, il a l’occasion d’assister aux messes « clandestines » célébrées par les prêtres-prisonniers.
János Esterhazy est décédé le matin du 8 mars 1957, dans la prison de Mirov, assisté par le père Vasil Hopko, évêque martyr gréco-catholique de Presov, béatifié en 2003.
Après la chute du communisme, sa fille, Alice Esterhazy-Malfatti, sollicite le procès de réhabilitation de son père martyr. C’est seulement en 2007 que l’urne contenant ses cendres a été déposée dans le cimetière de l’ancienne prison de Motol, à Prague, aujourd’hui mémorial des victimes du communisme.
Depuis sa mort, la réputation de sainteté de János Esterhazy est vivante, note le quotidien du Vatican. Quelques mois après sa mort, un prêtre qui ne le connaissait pas confiait : « Je ne sais qui est cette personne, mais, quand je célèbre la messe pour lui, il me vient chaque fois l’inspiration de le commémorer non pas parmi les défunts, mais parmi les saints ».
Avec une traduction de Constance Roques

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Marina Droujinina

Journalisme (Moscou & Bruxelles). Théologie (Bruxelles, IET).

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