« L’idée de la résurrection, l’idée de l’Incarnation, le puissant message de compassion et d’amour… là est la clef », déclare Martin Scorsese dans la « Civiltà Cattolica » dont le premier numéro en français sera publié à la fin du mois, chez Parole et Silence.
Ce premier numéro réserve la surprise du récit de rencontres inédites entre un jésuite – le directeur de la prestigieuse revue des jésuites italiens, le père Antonio Spadaro – et le réalisateur américain Martin Scorsese dont le film « Silence » sur les chrétiens et les jésuites du Japon, martyrs, sort en France le 2 février 2017.
Le pape François avait reçu le réalisateur américain, son épouse Helen Morris – que le père Spadaro a également rencontrée – et deux de leurs enfants, le 30 novembre 2016, au Vatican, dans le cadre de l’avant-première de ce film sur une mission jésuite au Japon au 17e siècle, au temps de la persécution des chrétiens.
Le film s’inspire d’un roman de l’écrivain catholique japonais Shosaku Endo (1923-1996) publié en 1966. Les trois protagonistes sont interprétés par les acteurs Andrew Garfield, Adam Driver et Liam Neeson.
Voici l’une des réponses de M. Scorsese dans cette interview du p. Spadaro SJ, que nous publions en avant-première avec l’aimable autorisation de l’éditeur.
L’entretien, qui sera publié le 31 janvier, est précédé d’un récit lui aussi du père Spadaro, qui évoque les circonstances concrètes de leur rencontre, sous le signe de la simplicité, et d’une certaine complicité… : ne sont-ils pas tous deux originaires de Sicile ? Nous avons publié ce récit de la rencontre dans notre édition du 12 janvier 2017. Et la première question sur le film et la première réposne dans l’édition du 13 janvier.
AB
“SILENCE”
Interview
Antonio Spadaro sj – Pour vous, croire en Dieu et être catholique sont deux choses différentes, si j’ai bien compris. Que voulez-vous dire par là ?
Martin Scorsese – Ce qui m’intéresse, c’est de savoir comment les gens perçoivent Dieu, ou, pour le dire autrement, comment ils perçoivent le monde de l’intangible. Il y a beaucoup de chemins possibles, et je pense que celui que l’on choisit dépend de la culture à laquelle on appartient. Ma voie a été, et elle est, le catholicisme. Après avoir pensé à d’autres choses pendant de nombreuses années — j’ai goûté à des choses et à d’autres —, je me trouve mieux en catholique. Je crois aux principes du catholicisme. Je ne suis pas un docteur de l’Église, je ne suis pas un théologien capable de raisonner à propos de la Trinité. Et certainement, les politiques de l’institution ne m’intéressent pas. Mais l’idée de la résurrection, l’idée de l’Incarnation, le puissant message de compassion et d’amour… là est la clef. Les sacrements, si nous réussissons à les approcher, à en faire l’expérience, nous aident à être proches de Dieu.
Maintenant, je me rends compte que cela fait naître une question : suis-je un catholique pratiquant ? Si on entend par-là : « Êtes-vous quelqu’un qui va régulièrement à l’église ? », la réponse est non. Cependant, dès mon enfance, je me suis convaincu que la pratique n’est pas quelque chose qui se déroule uniquement au sein d’un édifice consacré et au cours de certains rites célébrés à certaines heures de la journée. La pratique est quelque chose qui a lieu dehors, en chaque instant. Pratiquer, vraiment, c’est faire chaque chose que l’on fait, en bien ou en mal, et réfléchir dessus. C’est là le défi. Toutefois, le réconfort et l’impression profonde apportés par le catholicisme quand j’étais très jeune… je dirais que cela a toujours été une référence.
(à suivre)
Le pape reçoit Martin Scorsese, réalisateur de "Silence" © L'Osservatore Romano
"La résurrection, l’Incarnation, le puissant message de compassion et d’amour… là est la clef", affirme Martin Scorsese
Entretien avec le p. Spadaro, dans la Civiltà Cattolica (Parole et Silence) (3)