Messe de Bakou @ L'Osservatore Romano

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«Dieu change le monde en changeant nos cœurs» (texte complet)

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L’homélie de Bakou (Azerbaïdjan) sur la foi et le service

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« Dieu change le monde en changeant nos cœurs, et cela il ne peut le faire sans nous », explique le pape François dans son homélie sur la foi et le service pour la messe dominicale qu’il a célébrée ce dimanche 2 octobre 2016 à Bakou (Azerbaïdjan), à l’église de l’Immaculée, près du centre salésien où il a ensuite déjeuné.
Le pape a insisté sur la liberté du chrétien: « Le Seigneur désire en effet que nous lui ouvrions la porte de notre cœur, pour pouvoir entrer dans notre vie. Cette ouverture à lui, cette confiance en Lui (…) c’est notre foi. »
Et puis il y a le service : « La foi est un fil d’or qui nous lie au Seigneur, la pure joie de rester avec Lui, d’être unis à Lui ; c’est le don qui est valable pour la vie entière, mais qui porte du fruit si nous faisons notre part. »
Le pape a filé la métaphore du tapis pour expliquer comment la vie chrétienne se tisse, entre création et histoire, entre foi et service : « La vie chrétienne (…) est chaque jour patiemment tissée, entrecroisant (…) la trame de la foi et la chaîne du service. »
Et ce service c’est l’imitation de Dieu lui-même et donc un style de vie à adopter. Il s’agit de « tout mettre en œuvre avec élan pour le bien commun. »
Le pape débusque deux tentations contre ce style de vie du chrétien. La première, c’est la tiédeur, la paresse. La seconde, c’est son contraire, l’activisme, l’hyperactivité. Enfin, le pape exhorte à la communion dans l’Eglise.
Voici le texte complet de l’homélie du pape François et de ses paroles à l’angélus, dans la traduction officielle en français du Vatican.
AB
Homélie du pape François
La Parole de Dieu nous présente aujourd’hui deux aspects essentiels de la vie chrétienne : la foi et le service.
A propos de la foi, deux demandes particulières sont adressées au Seigneur.
La première est celle du prophète Habacuc, qui implore Dieu pour qu’il intervienne et rétablisse la justice et la paix que les hommes ont rompu par la violence, les querelles et les disputes : « Combien de temps, Seigneur, vais-je appeler, sans que tu m’entendes ? » (Ha 1, 2), demande le prophète. Dieu, en répondant, n’intervient pas directement, il ne résout pas la situation d’une manière brusque, il ne se rend pas présent par la force. Au contraire, il invite à attendre avec patience, sans jamais perdre l’espérance ; surtout, il souligne l’importance de la foi. Parce que par sa foi, l’homme vivra (cf. Ha 2, 4). Ainsi Dieu fait de même avec nous : il ne cède pas à nos désirs qui voudraient changer le monde et les autres immédiatement et continuellement, mais il vise surtout à guérir le cœur, le mien, le tien, le cœur de chacun ; Dieu change le monde en changeant nos cœurs, et cela il ne peut le faire sans nous. Le Seigneur désire en effet que nous lui ouvrions la porte de notre cœur, pour pouvoir entrer dans notre vie. Cette ouverture à lui, cette confiance en Lui est vraiment « la victoire remportée sur le monde : c’est notre foi (cf. 1 Jn 5, 4). Parce que lorsque Dieu trouve un cœur ouvert et confiant, là il peut accomplir des merveilles
Mais avoir la foi, une foi vive, n’est pas facile ; et voici alors la seconde demande, celle que dans l’Évangile les Apôtres adressent au Seigneur : «Augmente en nous la foi : » (Lc 17, 6). C’est une belle demande, une prière que nous aussi nous pourrions adresser à Dieu chaque jour. Mais la réponse divine est surprenante et aussi dans ce cas renverse la demande : « Si vous aviez de la foi… ». C’est Lui qui nous demande d’avoir de la foi. Parce que la foi, qui est un don de Dieu et est toujours demandée, est aussi cultivée de notre part. Ce n’est pas une force magique qui descend du ciel, ce n’est pas une “ dot ” qui se reçoit une fois pour toutes, et non plus un superpouvoir qui sert à résoudre les problèmes de la vie. Parce qu’une foi utile pour satisfaire nos besoins serait une foi égoïste, toute centrée sur nous. La foi n’est pas confondue avec le bien-être ou avec le fait de se sentir bien, avec le fait d’être consolé dans l’âme parce que nous avons un peu de paix dans le cœur. La foi est un fil d’or qui nous lie au Seigneur, la pure joie de rester avec Lui, d’être unis à Lui ; c’est le don qui est valable pour la vie entière, mais qui porte du fruit si nous faisons notre part.
Et quelle est notre part ? Jésus nous fait comprendre que c’est le service. Dans l’Évangile en effet, le Seigneur fait tout de suite suivre aux paroles sur la puissance de la foi, celles sur le service. Foi et service ne peuvent se séparer, elles sont même étroitement liées, nouées entre elles. Pour m’expliquer, je voudrais utiliser une image qui vous est très familière, celle d’un beau tapis : vos tapis sont de véritables œuvres d’art et proviennent d’une histoire très ancienne. La vie chrétienne de chacun vient aussi de loin, c’est un don que nous avons reçu dans l’Église et qui provient du cœur de Dieu, notre Père, qui désire faire de chacun de nous un chef d’œuvre de la création et de l’histoire. Chaque tapis, vous le savez bien, est tissé selon la trame et la chaîne ; seulement avec cette structure l’ensemble se trouve bien composé et harmonieux. C’est ainsi pour la vie chrétienne : elle est chaque jour patiemment tissée, entrecroisant entre elles une trame et une chaîne bien définies : la trame de la foi et la chaîne du service. Quand à la foi se noue le service, le cœur se maintient ouvert et jeune, et il se dilate en faisant le bien. Alors la foi, comme dit Jésus dans l’Évangile, devient puissante et elle fait des merveilles. Si elle marche sur cette route, alors elle mûrit et devient forte, à condition qu’elle reste toujours unie au service.
Mais qu’est-ce que le service ? Nous pouvons penser qu’il consiste seulement à être fidèle aux propres devoirs ou à accomplir quelque œuvre bonne. Pour Jésus, c’est beaucoup plus. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, il nous demande, avec des paroles très fortes, radicales, une disponibilité totale, une vie mise pleinement à disposition, sans calculs et sans bénéfices. Pourquoi est-il si exigeant ? Parce que Lui nous a aimés ainsi, se faisant notre serviteur « jusqu’au bout » (Jn 13, 1), venant « pour servir et donner sa vie » (Mc 10, 45). Et cela a lieu encore chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie : le Seigneur vient au milieu de nous et pour autant que nous puissions proposer de le servir et de l’aimer, c’est toujours Lui qui nous précède, nous servant et nous aimant plus que tout ce que nous imaginons ou méritons. Il nous donne sa vie-même. Et il nous invite à l’imiter, en nous disant : « Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive » (cf. Jn 12, 26).
Donc, nous ne sommes pas appelés à servir seulement pour avoir une récompense, mais pour imiter Dieu, qui s’est fait serviteur pour notre amour. Et nous ne sommes pas appelés à servir de temps et temps mais à vivre en servant. Le service est alors un style de vie, il résume même en lui tout le style de vie chrétien: servir Dieu dans l’adoration et dans la prière ; être ouverts et disponibles ; aimer concrètement le prochain : tout mettre en œuvre avec élan pour le bien commun.
Les tentations qui éloignent du style du service et finissent par rendre la vie inutile – là où il n’y a pas de service, la vie est inutile – ne manquent pas aussi pour les croyants. Ici nous pouvons aussi en mettre deux en évidence. L’une est celle de laisser le cœur s’attiédir. Un cœur tiède se ferme dans une vie paresseuse et étouffe le feu de l’amour. Celui qui est tiède vit pour satisfaire ses propres aises, qui ne suffisent jamais, et ainsi il n’est jamais content ; peu à peu il finit par se contenter d’une vie médiocre. Le tiède réserve à Dieu et aux autres des “pourcentages” de son temps et de son cœur, sans jamais exagérer, et même en cherchant toujours à économiser. Ainsi la vie perd du goût : elle devient comme un thé qui était vraiment bon, mais qui lorsqu’il se refroidit ne peut plus se boire. Mais je suis certain que vous, regardant les exemples de ceux qui vous ont précédés dans la foi, ne laisserez pas votre cœur s’attiédir. L’Église entière, qui nourrit pour vous une sympathie spéciale, vous regarde et vous encourage : vous êtes un petit troupeau si précieux aux yeux de Dieu !
Il y a une seconde tentation, dans laquelle on peut tomber non pas parce qu’on est passifs, mais parce qu’on est “trop actifs” : celle de penser comme des propriétaires, de se donner du mal seulement pour gagner du crédit et pour devenir quelqu’un. Le service devient alors un moyen et non une fin, parce que la fin est devenue le prestige ; ensuite vient le pouvoir, la volonté d’être grands. « Parmi vous, – rappelle Jésus à nous tous – il ne devra pas en être ainsi : Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur » (Mt 20, 26). Ainsi s’édifie et s’embellit l’Église. Reprenant l’image du tapis, en l’appliquant à votre belle communauté : chacun de vous est comme un splendide fil de soie, mais les fils différents créent une belle composition seulement s’ils sont bien tissés entre eux ; tout seuls, ils ne servent pas. Restez toujours unis, en vivant humblement dans la charité et dans la joie ; le Seigneur, qui crée l’harmonie dans les différences, vous gardera.
Que nous aide l’intercession de la Vierge Immaculée et des Saints, en particulier de sainte Teresa de Calcutta, dont les fruits de foi et de service sont au milieu de vous. Accueillons quelques unes de ses paroles splendides, qui résument le message d’aujourd’hui : « Le fruit de la foi est l’amour. Le fruit de l’amour est le service. Le fruit du service est la paix » (Le chemin simple, Introduction).
© Librairie éditrice du Vatican
Paroles du pape François avant et après l’angélus
Chers frères et sœurs,
Au cours de cette célébration eucharistique j’ai rendu grâce à Dieu avec vous, mais aussi pour vous : ici, la foi, après les années de la persécution, a accompli des merveilles. Je voudrais rappeler les nombreux chrétiens courageux qui ont fait confiance au Seigneur et qui ont été fidèles dans l’adversité. Comme le fit saint Jean-Paul II, je vous adresse à tous les paroles de l’Apôtre Pierre : « Honneur à vous qui croyez ! » (1P 2, 7 ; Homélie, Baku, 23 mai 2002 : Enseignements XXV, 1 [2002], 852).
Notre pensée va maintenant à la Vierge Marie, qui est vénérée dans ce pays, pas seulement par les chrétiens. Nous nous adressons à elle avec les paroles par lesquelles l’Ange Gabriel lui porta la joyeuse annonce du salut préparé par Dieu pour l’humanité.
Dans la lumière qui resplendit du visage maternel de Marie, je vous adresse un salut cordial, chers frères de l’Azerbaïdjan, encourageant chacun à témoigner avec joie de la foi, de l’espérance et de la charité, unis entre vous et à vos pasteurs. Je salue et je remercie en particulier la famille salésienne, qui prend beaucoup soin de vous et qui promeut diverses bonnes œuvres, ainsi que les Sœurs Missionnaires de la Charité : continuez avec enthousiasme votre travail au service de tous !
Confions ces vœux à l’intercession de la Très Sainte Mère de Dieu et invoquons sa protection pour vos familles, pour les malades et les personnes âgées, pour tous ceux qui souffrent dans leur corps ou dans leur esprit.
[Angelus] [Bénédiction] On peut penser que le Pape prend beaucoup de temps : faire tant de kilomètres de voyage pour visiter une petite communauté de 700 personnes, sur des millions… Cependant c’est une communauté non uniforme parce que parmi vous on parle l’azéri, l’italien, l’anglais, l’espagnol… : tant de langues… C’est une communauté de « périphérie ». Mais le Pape, en cela, imite l’Esprit Saint : Lui aussi est descendu du ciel dans une petite communauté de périphérie enfermée au Cénacle.
Et à cette communauté qui avait peur, se sentait pauvre et peut-être persécutée, ou laissée de côté, il donne le courage, la force, l’assurance pour aller de l’avant et proclamer le nom de Jésus ! Et les portes de cette communauté de Jérusalem, qui étaient fermées par la peur ou la honte, s’ouvrent tout grand et en sort la force de l’Esprit. Le Pape perd du temps comme l’a perdu l’Esprit Saint à ce moment-là !
Deux choses seulement sont nécessaires : dans cette communauté, il y avait la Mère – n’oubliez pas la Mère !- ; et dans cette communauté, il y avait la charité, l’amour fraternel que l’Esprit Saint a reversé sur eux. Courage ! En avant ! Go ahead ! Sans peur, en avant !
© Librairie éditrice du Vatican

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