Congrès du Latran, capture CTV

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Une Eglise dans la logique de la compassion pour toute personne fragile

Pour une pastorale familiale capable d’accueillir, accompagner, discerner et intégrer

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« Jésus veut une Eglise qui suive la logique de la compassion pour toute personne fragile » déclare le pape François.
Le pape a en effet ouvert, jeudi, 16 juin, en fin d’après-midi, à Saint-Jean-du-Latran, le congrès du diocèse de Rome, qui a pour thème : «  La joie de l’amour: le cheminement des familles de Rome à la lumière de l’exhortation apostolique ‘Amoris letitia’ du pape François ». La rencontre a été ouverte par le vicaire de Rome, le cardinal Agostino Vallini. Elle se poursuit vendredi soir avec cinq ateliers thématiques, dans les 36 préfectures du diocèse de Rome. Les « conclusions et orientations pastorales » de ce congrès sont attendues le 19 septembre, indique Radio Vatican.
Le pape a résumé ses orientations pastorales en disant: « Renonçons aux enclos », «  entrons en contact avec l’existence concrète des autres » ; «  développons une pastorale familiale  capable d’accueillir, accompagner, discerner et intégrer » ; et « ayons la force de la tendresse » afin que « la vie qui nous a été confiée » puisse se développer selon «  le rêve de Dieu ».
Après son discours, le pape a répondu librement à trois questions.
Pour mieux faire comprendre l’exhortation apostolique “Amoris laetitia », le pape a illustré ses propos avec des images bibliques.
Pas seulement les familles de la paroisse
Première image, celle de Moïse: Dieu, devant le buisson ardent, lui demande d’ôter ses sandales. Cette image, a déclaré le pape, rappelle que les thèmes affrontés lors des deux synodes sont le reflet «  des visages concrets de tant de familles ».
«  Comme cela aide de donner un visage aux thèmes! Et comme cela aide de s’apercevoir que derrière le papier se cache un visage, n’est-ce pas ? Comme cela aide! Ça aide à ne pas se laisser aller à des conclusions hâtives, bien formulées mais manquant trop souvent de vie; ça évite de parler dans l’abstrait, et ainsi de nous rapprocher et de nous occuper de personnes concrètes. Cela évite le risque d’idéologiser la foi à travers des systèmes bien montés mais qui ignorent la grâce », a fait observer le pape.
« La foi  – a-t-il dit – nous pousse à ne pas jamais nous lasser de rechercher la présence de Dieu dans les changements de l’histoire ». Les familles «  dans nos paroisses », avec leurs complexités, ne sont pas «  un problème » mais une «  opportunité ». Une opportunité, a-t-il ajouté qui « nous met au défi de susciter une créativité missionnaire capable d’épouser toutes les situations concrètes, dans notre cas, celle des familles romaines ».
On doit considérer les familles dans leur ensemble, pas seulement celles qui fréquentent la paroisse, il faut arriver à elles jusque dans nos quartiers. Notre défi est de n’oublier personne: « le défi de ne laisser tomber personne, au motif qu’il ne serait à la hauteur de ce qu’on lui demande », a expliqué le pape. Et entrer dans le cœur palpitant des quartiers romains veut dire sortir des déclarations de principe, pour « devenir des artisans », se mettre à façonner « le rêve de Dieu » comme de la glaise, ce que seules les personnes qui ont la foi peuvent faire, soit celles qui n’empêchent pas à l’Esprit de passer. Et qui se salissent les mains ».
En un mot, souligne le pape François, cette réflexion, «  nous demande d’enlever nos chaussures pour découvrir la présence de Dieu ».  Notre identité, a-t-il rappelé, ne se fait pas dans «  la séparation » mais dans «  l’appartenance ». L’appartenance au Seigneur. « Le Seigneur est notre identité ! », a insisté le pape, « on ne saurait donc se détacher des autres comme si on avait peur de se laisser contaminer ».
La logique de la compassion pour les familles
La deuxième image est celle du pharisien qui prie Dieu pour el remercier de ne pas être comme les autres hommes. Le pape met en garde contre la tentation de croire qu’on gagne en identité, en se différenciant des autres. « Non, nous avons tous besoin de conversion », de crier comme le publicain: « Seigneur ai pitié de moi qui suis un pécheur ». Cette conversion, a expliqué le pape, demande une attitude humble, incite à « poser sur les familles le même regard de délicatesse que celui de Dieu ». Rien de mieux que le réalisme évangélique, qui ne s’arrête pas à la description des situations, des problèmes – et encore moins à celle du péché – pour réussir à «  voir au lointain ». A « voir derrière tout visage, toute histoire, toute situation, une nouvelle occasion, une nouvelle possibilité », a souligné le pape. Car «  le réalisme évangélique » se soucie de l’autre, « s’en occupe », ne fait pas des idéaux et du «  devoir être » un obstacle  pour aller à la rencontre de l’autre, dans son environnement ».
Cela ne signifie pas «  ne pas être clairs en doctrine » mais «  éviter de tomber dans les jugements qui ne considèrent pas la complexité de la vie ». Le réalisme évangélique se salie les mains parce qu’il sait que ‘grain et zizanie’ poussent ensemble », a poursuivi le pape. Le Saint-Père comprend «  ceux qui préfèrent une pastorale plus rigide pour avoir moins de confusion », mais il pense sincèrement que l’Eglise que souhaite Jésus est une Eglise qui «  donne un enseignement clair et objectif » sans jamais renoncer «  à faire tout le bien possible », au risque même de se salir avec de la boue en le faisant ». En un mot, a-t-il résumé, Jésus veut «  une Eglise qui suit la logique de la compassion envers toute personne fragile ».
Le pape est alors sorti de son texte pour parler d’un chapiteau ornant la basilique Sainte-Marie-Madeleine à Vélazay, en France, où Judas pendu est porté sur le dos de Jésus, et parler de don Primo Mazzolari qui a compris la complexité de cette logique.
«  Jésus est celui qui s’est le plus sali les mains. Il allait chez les gens, et les prenait pour ce qu’ils étaient, et non comme ils devaient être. Revenons à l’image biblique: ‘Je te remercie Seigneur, car j’appartiens à l’Action Catholique, ou autre association, ou à la Caritas, ou à telle ou telle autre institution, et non comme ces gens dans les quartiers qui sont des voleurs et des voyous’: non, pas ça, cela n’aide pas la pastorale ».
Le témoignage des personnes âgées
La dernière image évoquée est celle du prophète Joël pour illustrer l’importance des personnes âgées. Le pape connaît les difficultés des jeunes – 40% des jeunes de moins de 25 ans sont sans travail – et sait que ces anciens peuvent leur apporter beaucoup d’espérance. Le témoignage des personnes âgées est un thème récurrent chez le pape. Les grands-parents, a-t-il réaffirmé, peuvent en effet témoigner de la joie d’avoir fait un choix d’amour et d’avoir su l’entretenir au fil du temps.  En rejetant les personnes âgées, comme le fait souvent la société, on finit par perdre «  la richesse de leur sagesse », a mis en garde le pape. Et ce manque de modèles ne permet pas aux jeunes générations de faire des projets car l’avenir leur fait peur. Le pape, sortant encore une fois de son texte, a évoqué son expérience lors d’une de ses messes à la chapelle Sainte-Marthe le matin, à laquelle étaient venus assister tant de couples ayant à leur actif entre 50 et 60 ans de mariage. « Cet amour est un bon exemple à montrer aux jeunes ». Le témoignage de personnes qui ont lutté pour quelque chose qui en valait la peine, « aide à lever les yeux, c’est précieux », a exhorté le pape.
Or tant de personnes âgées «  se sentent rejetées, voire méprisées ». Dans les programmes pastoraux, c’est bien de dire dire «  l’heure est au courage, l’heure des laïcs a sonné, l’heure de ça ou ça … c’est bien tout ça. Mais pourquoi ne pas dire aussi l’heure des personnes âgées est venue! ‘Vous me diriez, mais père, vous reculez, on revient à avant le concile’! Eh: l’heure des grands-parents a sonné, que les grands-parents rêvent, et que les jeunes apprennent à prophétiser, c’est-à-dire à construire la réalité avec leur force, leur imagination, leur travail, les rêves des grands-parents ».

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Océane Le Gall

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