« Le Saint-Siège souhaite la levée de l’embargo américain sur Cuba, tout en appelant à davantage d’ouverture sur l’île concernant les libertés fondamentales. A deux jours du voyage du pape à Cuba et aux États Unis, deux pays engagés dans une phase de réconciliation historique facilitée par l’entremise du Saint-Siège, le Secrétaire d’État a répondu aux questions du Centre de télévision du Vatican », indique Radio Vatican en français qui publie cette traduction.
Le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’État du Saint-Siège, interrogé par Alessandro Bussolo, revient tout d’abord sur l’embargo imposé à Cuba par les États-Unis en 1962, et sur ce que sa levée pourrait représenter dans l’île.
La position du Saint-Siège est bien connue. Ce dernier est contre l’embargo. Au-delà de ce qui a pu motiver [sa mise en place, ndlr], une vérité demeure : l’embargo, ce type de sanction, provoque des désagréments et des souffrances pour la population qui le subit. C’est à partir de cette perspective que le Saint-Siège aborde la question, et qu’au niveau des Nations unies, lors des assemblées générales, il a toujours appuyé les motions qui demandaient sa révocation. Et ainsi, nous pouvons espérer, comme le disent les évêques, il faut souhaiter qu’une mesure de ce genre, c’est-à-dire une libéralisation au niveau des liens et surtout au niveau économique, puisse conduire aussi à une plus grande ouverture du point de vue de la liberté et des droits humains, un fleurissement de ces aspects fondamentaux pour la vie des personnes et des peuples.
Une étape importante de ce voyage sera la visite du pape au sanctuaire de la Vierge de la Charité del Cobre…
Il me semble normal que le pape visite un sanctuaire marial, de surcroît comme celui de la Charité del Cobre, parce que la dévotion mariale est une des caractéristiques fondamentales de la religiosité et de la foi catholique du peuple latino-américain, et ensuite parce que la Vierge de la Charité del Cobre a toujours accompagné l’histoire des Cubains, à tous moments, de joie, de douleur, de lutte, de souffrance, de progrès. C’est donc un peu le symbole de son histoire, et le symbole de sa population. Aussi, en se rendant dans ce sanctuaire, le pape rencontrera, en quelque sorte, le cœur de cette île et de ce peuple.
Le pape a décidé d’entrer depuis Cuba aux États-Unis « comme un migrant », affirment les évêques américains, « afin de nous rappeler que nous sommes un pays d’immigrés ». L’immigration sera-t-elle un des thèmes principaux du voyage, notamment au regard de ce qu’il se passe en Europe ?
Certainement. J’imagine que le pape fera de l’immigration un des thèmes les plus importants de sa visite. C’est une préoccupation constante du pape, face à l’urgence que nous vivons ces jours-ci. Nous savons combien il intervient sur ce thème, presque quotidiennement. Dans le même temps, il va s’adresser à un pays qui a une longue histoire d’ouverture, d’accueil, d’intégration des différentes vagues migratoires qui sont arrivées sur place.
Il me semble que tout cela constitue une base, un patrimoine social et culturel à partir duquel affronter les défis d’aujourd’hui et résoudre des cas douloureusement encore ouverts. Donc j’espère vraiment que cette venue du pape, qui porte cette problématique dans son cœur, dans un pays qui a connu ce phénomène migratoire dans son passé, puisse offrir des indications pour trouver une solution aux problèmes qui se présentent à nous aujourd’hui.
À Washington, le pape proclamera saint le frère Junipero Serra, un missionnaire franciscain qualifié de « père fondateur des États-Unis ». C’est une manière d’inviter les Américains à retrouver la mémoire hispanique et catholique qui se trouve aux origines de ce grand pays ?
Je crois que concernant la canonisation du père Junipero Serra, il faut se référer au discours que le pape a prononcé le 2 mai dernier au collège nord-américain, lors d’un congrès qui se voulait comme une espèce de préparation à cette canonisation.
Quand il l’a défini comme un des pères fondateurs de l’Amérique, en particulier de la Californie, le pape a ensuite dit qu’il s’agissait d’un saint des catholiques, et du patron de la population hispanique des États-Unis, au regard de ce qu’il a fait pour l’évangélisation. J’aime me souvenir de ce que le pape a affirmé : nous avons l’habitude de passer les mérites de ces grandes figures à la loupe, tout comme leurs limites et leurs faiblesses. Et François se demandait : « Avons-nous cette même générosité qu’ont eue ces personnes, le même élan, le même courage ? » Voilà, je crois que cela constitue la leçon fondamentale de ce que nous offre le père Junipero Serra. Cet enthousiasme, ce courage, cet élan pour porter l’Evangile sur ces terres, et que c’est aujourd’hui un encouragement afin de savoir intégrer au sein de l’Église des États-Unis cette composante hispanique qui devient toujours plus importante, toujours plus signifiante, et qui a beaucoup à offrir à l’Église des États-Unis.
Le pape se rendra au Congrès américain, puis aux Nations unies. Relancera-t-il alors le message de l’encyclique Laudato sí ?
Certainement, en évoquant les changements climatiques et les inquiétudes que cela génère pour le futur de l’humanité, mais aussi en évoquant l’écologie intégrale qui prend en considération l’homme au sein de la Création. En ce sens, il ne manquera pas d’insister sur la nature transcendante de la personne, de laquelle découlent ses droits fondamentaux, en particulier le droit à la vie et à la liberté religieuse, et il nous invitera à changer nos styles de vie pour pouvoir être gardiens de la Création et non pas maîtres ou agresseurs de la Création.
Aux États-Unis, il y a eu des critiques de la part de ceux qui considèrent l’encyclique comme une attaque trop forte à l’encontre du système capitaliste.
Eh bien ! je crois que le pape touche des points fondamentaux. Je sais que ces critiques ont été formulées mais le pape, me semble-t-il, invite chacun à la réflexion. Il faut réaliser que les choses ne sont pas sur la bonne voie et donc, il faut trouver des solutions. Il me semble que le pape nous invite à cela. Chacun peut apporter sa contribution, mais il faut un changement. Il le faut.
A Philadelphie, le pape rencontrera les familles du monde entier. Est-ce que ce sera l’ultime étape, à l’écoute des familles, de son chemin vers le prochain Synode dédié à la famille à Rome ?
En effet. Le pape a vu, voit et vit ce moment en préparation, aussi, au Synode qui se déroulera en octobre, pour mettre en lumière la beauté de la famille et le message que l’Evangile offre aux familles, l’aide qu’il leur apporte. Je crois que cela émergera de la rencontre de Philadelphie. Cet aspect positif sera mis en avant, sans oublier les grands défis que la famille pose au monde d’aujourd’hui. Ce sera vraiment une préparation ultime à l’Assemblée du synode des évêques, mais je crois que le pape nous donnera, qu’il donnera à tous les participants et à l’Église entière ce nouvel enthousiasme et cette envie de proclamer l’Evangile de la famille et d’aider dans le même temps les familles qui se trouvent dans tous types de difficultés pour vivre cet Evangile dans sa plénitude, comme une source de joie, de paix et de bonheur pour tous.
© Traduction de Radio Vatican