« Je demande de mettre fin aux trafics d’armes à destination de ces pays, ainsi qu’aux ventes d’armes aux rebelles dits « modérés ». Les rebelles modérés n’existent pas ! Il n’y a aucune action ou réaction « modérée » en état de guerre », déclare le patriarche Twal.
Le patriarche latin de Jérusalem, Fouad Twal, s’est en effet adressé, mardi 8 septembre, à Paris, lors de la Conférence internationale sur les minorités et les chrétiens du Moyen-Orient, au ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, ainsi qu’au ministre des Affaires étrangères de Jordanie, Nasser Judeh.
Le secrétaire du Saint-Siège pour les Rapports avec les États, Mgr James Richard Gallagher y a également participé (cf. Zenit du 8 septembre 2015).
Le patriarche Twal a insisté sur le caractère dramatique de la situation actuelle du Moyen-Orient et il a demandé que des actions concrètes soient mises en place pour porter secours aux réfugiés syriens et irakiens et pour que la paix soit ramenée dans cette région.
Il a aussi rappelé la place importante occupée par l’Église et l’énergie qu’elle déploie dans la prise en charge des personnes réfugiées en Jordanie.
Voici le texte intégral du discours du patriarche à Paris.
A.B.
Discours du patriarche Twal
Monsieur le ministre Laurent Fabius,
Monsieur le ministre Nasser Judeh,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Monsieur le ministre Laurent Fabius, le 27 mars dernier, vous déclariez devant le Conseil de sécurité des Nations unies : « Je vais parler clair : au Moyen-Orient, nous faisons face à une entreprise barbare et systématique d’éradication ethnique et religieuse. » Permettez-moi aujourd’hui, Monsieur le ministre, de faire miennes vos paroles, et de « parler clair » à mon tour.
Le temps des paroles est révolu : celui des actes est venu. Le Moyen-Orient, lacéré par les guerres, submergé par un déferlement de violence inouïe, connaît une des pires crises de son histoire. De ce spectacle tragique, l’Occident ne peut plus être le spectateur indifférent.
Les responsables de ces effroyables guerres doivent faire leur examen de conscience, et en assumer les conséquences ; conséquences dont nous sommes chaque jour les témoins horrifiés et impuissants, voire les victimes.
Une des conséquences directes de ces conflits est l’afflux de réfugiés dans les pays voisins de la Syrie ou de l’Irak. En Jordanie, ils sont 740 000 réfugiés Syriens et 8 000 réfugiés Irakiens chaldéens. Les conditions de vie de ces réfugiés deviennent, de jour en jour, plus précaires. Ils doivent s’intégrer. Ils ont besoin de travailler, et leurs enfants ont besoin d’une solide instruction dans les écoles privées et publiques du pays.
L’Église catholique en Jordanie est en première ligne dans l’aide aux réfugiés, mais elle ne peut plus porter seule le poids de ces conflits. L’Église est fatiguée, la Caritas est fatiguée, les réfugiés sont fatigués. L’avenir est sombre.
Mesdames et Messieurs, disons-le clairement : la nécessité de cette conférence ne se serait pas faite sentir, sans cet afflux de réfugiés auquel l’Europe est à présent confrontée. Ces populations, poussées par le désespoir, cherchent aide, assistance, et vie. Elles ne peuvent échapper à la mort en Irak ou en Syrie pour la retrouver sur les rivages de l’Europe.
Inutile de prétendre les renvoyer chez elles, tant que la paix ne régnera pas sur leurs terres. Une chose s’impose donc : ramener la paix en Irak, et en Syrie.
A la suite du pape François, je demande de mettre fin aux trafics d’armes à destination de ces pays, ainsi qu’aux ventes d’armes aux rebelles dits « modérés ».
Les rebelles modérés n’existent pas ! Il n’y a aucune action ou réaction « modérée » en état de guerre.
Il est nécessaire que les auteurs de crimes puissent être jugés, ainsi que ceux qui les commanditent ou les protègent.
Il est urgent, enfin, de résoudre le conflit israélo-palestinien, depuis trop longtemps source de tension dans la région.
Le Moyen-Orient a besoin de paix. Ses populations ont besoin de paix. Ses minorités ont besoin de paix, et l’Europe a besoin de paix.
Je vous remercie.
(Texte original en français)