"Ne cédons pas au pessimisme": texte intégral

Audience du pape François au Collège cardinalice

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« Ne cédons jamais au pessimisme, à cette amertume que le diable nous offre tous les jours », déclare le pape François au collège des cardinaux.

Le pape François a en effet reçu en audience les cardinaux présents à Rome, ce vendredi matin, à 11 h en la salle Clémentine du palais apostolique.

Après le discours d’hommage que le cardinal doyen Angelo Sodano lui a adressé au nom du Collège cardinalice, le pape a prononcé un discours émaillé d’improvisations, d’abandance du coeur. Il a ensuite échangé quelques mots avec chaque cardinal, debout, pendant une bonne heure.

Discours du Pape François

Chers frères cardinaux,

Cette période, dédiée au conclave, a été chargée de signification non seulement pour le Collège cardinalice mais aussi pour tous les fidèles. En ces jours, nous avons senti de manière presque sensible l’affection et la solidarité de l’Église universelle, ainsi que l’attention de nombreuses  personnes qui, bien qu’elles ne partagent pas notre foi, regardent l’Église avec respect et admiration. De tous les coins de la terre, s’est élevée la prière fervente et unanime du peuple chrétien pour le nouveau pape et ma première rencontre avec la foule massée sur la place Saint-Pierre a été riche en émotions. Avec cette image suggestive du peuple priant et joyeux encore gravée dans mon esprit, je désire manifester ma sincère reconnaissance aux évêques, aux prêtres aux personnes consacrées, aux jeunes, aux familles, aux personnes âgées pour leur proximité spirituelle, si touchante et fervente.

Je ressens le besoin de vous exprimer à vous tous, chers et vénérés frères cardinaux,  ma plus vive et profonde gratitude pour votre collaboration diligente dans la conduite de l’Église pendant la vacance du Siège. J’adresse mes salutations cordiales à chacun de vous, à commencer par le doyen du Collège cardinalice, Monsieur le cardinal Angelo Sodano, que je remercie pour les aimables paroles et pour les vœux fervents qu’il m’a adressés en votre nom. Avec lui, je remercie Monsieur le cardinal Tarcisio Bertone, camerlingue de la Sainte Église romaine, pour son travail précieux pendant cette phase délicate de transition, ainsi que le très cher cardinal Giovanni Battista Re, qui a été notre président pendant le conclave : merci beaucoup ! Ma pensée se tourne avec une affection particulière vers les vénérés cardinaux qui, en raison de leur âge ou de la maladie, ont assuré leur participation et manifesté leur amour de l’Église à travers l’offrande de leur souffrance et de leur prière. Et je voudrais vous dire qu’avant-hier, le cardinal Mejia a eu un infarctus : il est à la clinique Pie XI. Mais on pense que sa santé est stabilisée et il nous salue.

Mes remerciements vont aussi à tous ceux qui, dans les différentes maisons, se sont employés activement à la préparation et au bon déroulement du conclave, assurant la sécurité et la tranquillité des cardinaux en cette période si importante pour la vie de l’Église.

J’adresse une pensée pleine d’affection et de profonde gratitude à mon vénéré prédécesseur Benoît XVI qui, dans les années de son pontificat, a enrichi et fortifié l’Église par son magistère et par la manière dont il l’a guidée, par sa bonté, sa foi, son humilité, sa douceur. Ces années resteront pour tous un patrimoine spirituel ! Vécu dans un total don de soi, le ministère pétrinien a eu en lui un interprète sage et humble, le regard toujours fixé sur le Christ, le Christ ressuscité, présent et vivant dans l’Eucharistie. Notre fervente prière, le souvenir impérissable que nous gardons de lui, notre fidèle et affectueuse reconnaissance l’accompagneront toujours. Nous sentons bien que Benoît XVI a allumé une flamme au plus profond des cœurs : elle continuera de brûler parce qu’elle sera alimentée par sa prière, qui soutiendra encore l’Église sur son chemin spirituel et missionnaire.

Chers frères cardinaux, notre rencontre de ce jour veut être une sorte de prolongement de l’intense communion ecclésiale que nous avons expérimentée pendant cette période. Animés d’un profond sens de notre responsabilité et soutenus par un grand amour pour le Christ et pour l’Église, nous avons prié ensemble, partageant fraternellement nos sentiments, nos expériences et nos réflexions. Dans ce climat de grande cordialité, la connaissance réciproque et l’ouverture mutuelle ont grandi et c’est une bonne chose parce que nous sommes frères. Quelqu’un m’a dit : les cardinaux sont les prêtres du Saint-Père. Cette communauté, cette amitié, cette proximité nous fera du bien à tous. Et cette connaissance et cette ouverture mutuelle nous ont aidés à être dociles à l’action de l’Esprit-Saint. C’est lui, le Paraclet, l’acteur principal et suprême de toute initiative et de toute manifestation de foi. C’est curieux : moi, ça me fait réfléchir. Le Paraclet est l’auteur toutes les différences dans les Églises et il semble être un apôtre de Babel. Mais d’autre part, c’est lui qui fait l’unité de ces différences, non dans l’« égalité », mais dans l’harmonie. Je me souviens de ce Père de l’Église qui le définissait ainsi : « Ipse harmonia est ». Le Paraclet, qui donne des charismes différents à chacun de nous, nous unit dans cette communauté d’Église qui adore le Père, le Fils et lui, l’Esprit-Saint.

C’est précisément en partant de cette authentique affection collégiale qui unit le Collège cardinalice que j’exprime ma volonté de servir l’évangile avec un amour renouvelé, en aidant l’Église à devenir de plus en plus dans le Christ et avec le Christ, la vigne féconde du Seigneur. Stimulés aussi par la célébration de l’Année de la foi, tous ensemble, pasteurs et fidèles, nous nous efforcerons de répondre fidèlement à la mission de toujours : apporter Jésus-Christ à l’homme et conduire l’homme à la rencontre avec Jésus Christ, qui est le chemin, la vérité et la vie, réellement présent dans l’Église et contemporain de tout homme. Une telle rencontre fait de nous des hommes nouveaux dans le mystère de la grâce, suscitant dans notre esprit cette joie chrétienne qui constitue le centuple donné par le Christ à celui qui l’accueille dans sa propre existence.

Comme nous l’a rappelé si souvent le pape Benoît XVI dans ses enseignements et, enfin, à travers son geste humble et courageux, c’est le Christ qui guide l’Église  par son Esprit. L’Esprit-Saint est l’âme de l’Église par sa force vivifiante et unifiante : d’une multitude il fait un seul corps, le Corps mystique du Christ. Ne cédons jamais au pessimisme, à cette amertume que le diable nous offre tous les jours ; ne cédons pas au pessimisme et au découragement : nous avons la ferme certitude que l’Esprit-Saint donne à l’Église, par son souffle puissant, le courage de persévérer et aussi de chercher de nouvelles méthodes d’évangélisation, pour porter l’évangile jusqu’aux extrémités de la terre (cf. Ac 1, 8). La vérité chrétienne est attirante et persuasive parce qu’elle répond au besoin profond de l’existence humaine, en annonçant de manière convaincante que le Christ est l’unique Sauveur de tout l’homme et de tous les hommes. Cette annonce demeure valide aujourd’hui, comme elle l’était au début du christianisme, au temps de la première grande expansion missionnaire de l’évangile.

Chers frères, courage ! Pour la moitié d’entre nous, nous sommes déjà d’un âge avancé : j’aime bien dire que la vieillesse est le siège de la sagesse de la vie. Les personnes âges ont la sagesse de ceux qui ont cheminé dans la vie, comme le vieillard Siméon et la vieille Anne au Temple. C’est justement cette vieillesse qui leur a permis de reconnaître Jésus. Donnons cette sagesse aux jeunes : comme le bon vin, qui se b
onifie avec les années, donnons aux jeunes la sagesse de la vie. Il me vient à l’esprit ce qu’un poète allemand disait de la vieillesse : « Es ist ruhig, das Alter, und fromm » : c’est le temps de la tranquillité et de la prière. Et c’est aussi le temps de donner cette sagesse aux jeunes. Vous allez maintenant rentrer dans vos sièges respectifs pour poursuivre votre ministère, enrichis de l’expérience de ces derniers jours, si empreints de foi et de communion ecclésiale. Cette expérience tellement unique et incomparable, nous a permis de saisir en profondeur toute la beauté de la réalité ecclésiale qui est un reflet de la splendeur du Christ ressuscité : un jour, nous regarderons ce visage si beau du Christ ressuscité !

Je confie à la puissante intercession de Marie, notre Mère, Mère de l’Église, mon ministère et le vôtre. Sous son regard maternel, que chacun de nous puisse avancer joyeux et docile à la voix de son divin Fils en renforçant l’unité, en persévérant d’un seul cœur dans la prière et en témoignant de la véritable foi en la présence continuelle du Seigneur. Avec ces sentiments – qui sont véritables ! – avec ces sentiments, je vous donne de tout cœur la bénédiction apostolique.

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Francis NULL

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