Image : Wikicommons
par Elizabeth Owens
(ZENIT News / Londres, 09.07.2025). – Pour la première fois depuis la période tumultueuse de la Réforme, un membre de la famille royale britannique sera enterré selon les rites de l’Église catholique sur le sol anglais. Les funérailles de Catherine, duchesse de Kent, seront célébrées à la cathédrale de Westminster le 16 septembre, présidées par le cardinal Vincent Nichols.
Catherine, qui préférait être simplement connue sous le nom de Mme Kent, est décédée au début du mois à l’âge de 92 ans. Sa décision d’embrasser la foi catholique il y a trente ans l’a distinguée dans les cercles royaux et l’a inscrite dans une lignée atypique, remontant au roi Charles II, dont la conversion au catholicisme sur son lit de mort en 1685 fut tenue secrète. Contrairement au monarque qui l’a précédée, la duchesse a choisi de vivre sa conversion ouvertement et avec une détermination discrète.
Son entrée dans l’Église catholique en 1994 coïncida avec une période de turbulences au sein de l’anglicanisme. La décision du Synode général, prise deux ans plus tôt, d’ordonner des femmes prêtres choqua l’Église d’Angleterre et déclencha une vague de conversions à Rome, y compris de hauts dignitaires religieux comme Graham Leonard, ancien évêque anglican de Londres. Catherine, cependant, refusa de présenter sa décision comme une protestation. « En réalité, c’était une question de rencontres », déclara-t-elle à la BBC à l’époque, ajoutant avec sa candeur habituelle : « J’aime savoir ce qu’on attend de moi. L’Église catholique vous dit : “Vous irez à la messe dimanche.” Et j’adore ça. »
Son mariage avec le prince Édouard, duc de Kent – qui lui survit 89 ans – lui a conféré une place de choix dans l’histoire royale britannique. Lorsqu’elle traversa le Tibre, l’Acte d’établissement de 1701 interdisait encore aux héritiers d’épouser des catholiques, une loi qui ne fut assouplie qu’en 2013. Techniquement, la loi ne prévoyait pas la possibilité pour une consort royale de se convertir après son mariage, ce qui signifiait que si son mari avait hérité de la couronne de manière inattendue, la Grande-Bretagne aurait pu connaître sa première reine consort catholique depuis le XVIe siècle.
La décision de Catherine eut également des répercussions sur sa famille. Son plus jeune fils, Lord Nicholas Windsor, et ses petits-enfants, Lord Downpatrick et Lady Marina Windsor, la suivirent dans la foi catholique, soulignant ainsi l’influence de l’acte de conscience privé d’une femme sur la génération royale suivante.
Cependant, la duchesse conserva une réserve marquée, menant une vie loin de la scène publique. Elle enseigna la musique dans une école publique de Hull sous le nom de « Mme Kent » et se consacra à The Passage, un refuge pour les sans-abris de Westminster géré par l’Église catholique. Ce faisant, elle incarna un modèle plus discret de service royal, davantage ancré dans l’accompagnement que dans le cérémonial.
Les funérailles de mardi refléteront ce même esprit de sobriété. Elles ne seront pas télévisées, malgré la présence attendue du roi Charles et de la reine Camilla, du prince et de la princesse de Galles, ainsi que de membres de la famille royale. La cérémonie, enrichie par les voix du chœur de la cathédrale de Westminster, sera un acte de culte intime plutôt qu’un spectacle d’État.
Pour les catholiques britanniques, cependant, cet événement revêt une portée symbolique. C’est la première fois depuis près de cinq siècles que des funérailles royales sont célébrées publiquement dans la tradition catholique. Dans un pays où le culte catholique était autrefois clandestin, l’image du plus haut prélat du pays dirigeant les prières sur un cercueil royal résonnera bien au-delà des murs de briques rouges de la cathédrale de Westminster.
En faisant ses adieux à la duchesse de Kent, la Grande-Bretagne a laissé sa foi silencieuse, vécue avec dignité et conviction, faire partie intégrante de l’histoire religieuse du pays. Ce qui a commencé comme un choix profondément personnel en 1994 s’achèvera comme un moment historique : un rappel sans équivoque que l’histoire du catholicisme en Grande-Bretagne, longtemps marquée par l’exil et la résistance, continue à trouver de nouveaux chapitres dans des lieux inattendus.
