Vietnam : Opération de police à Huê contre le P. Nguyên Van Ly

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Et contre des membres d’un parti politique non autorisé

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ROME, Mercredi 21 février 2007 (ZENIT.org) –Une opération de la police vietnamienne a eu lieu à Huê contre le P. Nguyên Van Ly et un certain nombre de membres d’un parti politique non autorisé, annonce aujourd’hui « Eglises d’Asie », l’agence de missions étrangères de Paris (EDA 458, eglasie.mepasie.org).

Selon une dépêche de l’Agence France-Presse (1), citant des sources policières vietnamiennes, le P. Nguyên Van Ly a été arrêté à la suite d’un « contrôle administratif à la résidence » du prêtre catholique à Huê, la police soupçonnant des « actes de violation de la loi ». Aucun détail sur les motifs ni la durée de détention du prêtre n’ont été donnés.

Selon des sources proches du P. Ly, dimanche 19 février, le deuxième jour du Têt, à 19 heures (heure locale), un grand nombre de véhicules de police se sont garés à proximité du bâtiment appelé Nha Chung, appartenant au complexe de l’archevêché – sis rue Nguyên Truong Tô –, où résident l’archevêque et un certain nombre de prêtres, dont le P. Nguyên Van Ly. Aux alentours de 20 heures, le bâtiment a été cerné par une soixantaine de policiers et les communications téléphoniques neutralisées. Un groupe de policiers, conduit par un colonel spécialiste des affaires religieuses, s’est introduit alors dans la chambre du P. Ly et en a entrepris la fouille. Une armoire dont le P. Ly a refusé de donner la clé a été forcée devant le prêtre secrétaire de l’archevêché, appelé comme témoin. Six ordinateurs portables, six téléphones mobiles appartenant au P. Ly et à ses collaborateurs ainsi que de nombreux documents ont été confisqués. Le P. Ly, après avoir proclamé qu’il entamait une grève de la faim, a cependant répondu par écrit aux questions qui lui ont été posées par la police, faisant suivre sa réponse de sa signature et de celle du témoin.

Dans la nuit qui a précédé le jour de l’an (nuit du 16 au 17 février), des fouilles avaient déjà été accomplies chez des collaborateurs proches du P. Ly, membres du parti Dang Vietnam Thang Tiân (Parti pour le progrès du Vietnam), Nguyên Phong et Nguyên Binh Thanh. Par la suite, les deux militants ont été amenés par la police et l’on était sans nouvelles d’eux, le 20 février.

On a appris également que, dans la journée du lundi 19 février, la police avait fait irruption chez la secrétaire du parti Dang Vietnam Thang Tiên, Hoang Thi Anh Dao, à Huê. Après avoir fouillé l’appartement, confisqué l’ordinateur, des documents et un agenda, les policiers ont conduit la secrétaire au siège la Sécurité locale pour interrogatoire. Elle était encore gardée par la police, lundi 19 février. D’autres membres du mouvement démocratique ont également été inquiétés. La résidence du P. Pham Van Loi, proche du P. Ly, a été soumise à une surveillance policière pendant les trois premiers jours du Nouvel An.
Le P. Nguyên Van Ly, bien connu pour sa lutte pour la liberté religieuse et les longs séjours en prison que celle-ci lui a valus, est l’un des animateurs du mouvement démocratique appelé « Bloc 8406 », fondé au mois d’août de l’année dernière. Le mouvement a publié un certain nombre de manifestes et fait paraître régulièrement une revue non autorisée dont le titre est Tu do Ngôn Luân (‘Liberté d’expression’). Le même groupe démocratique est à l’origine de la création du parti, lui aussi non autorisé, le Parti pour le Progrès du Vietnam (Dang Vietnam Thang Tiên). Sa création a été annoncée le 8 septembre dernier. Dans sa déclaration, il affirmait suivre les valeurs universelles des droits de l’homme, les valeurs culturelles et morales vietnamiennes et les idéaux énoncés dans les manifestes du Bloc 8406. C’est ce parti qui semble visé dans l’opération policière du premier jour de l’an.

Le P. Nguyên Van Ly, qui a passé dix ans en prison – de 1977 à 1978 et de 1983 à 1992 – pour « opposition à la révolution », avait lancé une campagne pour la liberté religieuse à la fin de l’année 2000. Commencée au mois de novembre 2000 (2), dans le cadre de revendications locales – des terrains paroissiaux confisqués par l’Etat –, la campagne du P. Ly avait vite pris une dimension interreligieuse, nationale et même internationale. Elle a été tout de suite marquée par le ton sans concession adopté par le prêtre et une volonté de non-compromission avec le régime, que symbolisait le calicot qu’il avait accroché au clocher de son église où était inscrit : « La liberté religieuse où la mort ! » Il diffusa sur Internet de nombreuses déclarations où il revendiquait liberté et totale indépendance pour les diverses religions du Vietnam ainsi que des procès-verbaux où il détaillait concrètement les violations de la liberté religieuse commises par les autorités locales et nationales. A la demande de la Commission sur la liberté religieuse dans le monde du Congrès américain, il fit parvenir à celle-ci deux rapports sur la liberté religieuse au Vietnam. Le 27 février 2001, le P. Ly avait été assigné à résidence dans la paroisse de An Truyên. Le 10 mai, les autorités civiles lui interdisaient de dire la messe. Le 17 mai 2001, 600 agents de la Sûreté vinrent arrêter le prêtre dans son presbytère alors qu’il se préparait à célébrer la messe. Le procès n’eut lieu que cinq mois plus tard en octobre 2001, à Huê. Il fut condamné à quinze ans de prison ferme pour n’avoir pas accompli sa peine de mise en résidence surveillée et avoir saboté la politique de l’unité nationale. Il fut ensuite envoyé dans le nord du Vietnam pour y purger sa peine, une peine qui avait été réduite à dix ans en 2003 et à cinq ans en juin 2004. Il avait été libéré au début du mois de février 2005.

(1) AFP, 21 février 2007
(2) On peut suivre le déroulement de cette campagne à travers la description qui en est faite dans EDA 321, 322, 323, 324, 325, 326, 327, 330, 331, 332, 335, 337, 340
© EDA

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ZENIT Staff

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