Vietnam : L'affaire de la paroisse de Thai Ha prend un tour décisif

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Recours à l’intimidation physique

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ROME, vendredi 11 novembre 2011 (ZENIT.org) – L’agression perpétrée contre la paroisse de Thai Ha, à Hanoi, par une troupe d’hommes de main de la police vietnamienne, le 3 novembre dernier, et surtout la lettre de l’archevêché de Hanoi exprimant son plein accord avec la cause défendue par les catholiques de cette paroisse (1), démontrent que l’affaire est en train de prendre un tour décisif, estime « Eglises d’Asie », l’agence des Missions étrangères de Paris, qui fait le point de la situation dans cette dépêche.

Il est désormais clair que le gouvernement a maintenant recours à l’intimidation physique. L’explication donnée par la presse officielle présentant l’agression du 3 novembre dernier comme la réaction spontanée d’une foule excédée par les revendications de la paroisse rédemptoriste n’a trompé personne. Des photos mises en ligne sur un blog bien connu, montrent l’un des participants de l’agression, photographié dans un autre contexte, avec l’uniforme des officiers de la sécurité (2). Ce type d’intervention par groupes de voyous interposés est d’ailleurs loin d’être nouveau. Des agressions du même type avaient été organisées par les autorités en 2008, lors de l’affaire de la Délégation apostolique et au moment des premières manifestations de prière de cette même paroisse de Thai Ha. Ces hommes de main de la police furent également employés, l’année dernière, pour expulser les moines bouddhistes de leur couvent de Bat Nha (3). Cette volonté de durcir la confrontation s’est confirmée encore dans la matinée du 8 novembre dernier avec l’arrestation d’un paroissien de Thai Ha, Vu Tiên Dung, que la presse officielle avait désigné, les jours précédents, comme l’un de ceux s’étant opposés à l’agression du 3 novembre.

Mais c’est peut-être la lettre de l’archevêché qui donne au mouvement sa dimension la plus nouvelle. Courte mais sans aucune ambiguïté, elle va très certainement contribuer à assurer à la paroisse la solidarité sans faille de nombreux chrétiens. Le même jour que l’archevêque de Hanoi, l’évêque de Kontum, dans une lettre aux responsables de la paroisse, leur faisait part de sa communion totale et de son intention de mener le même combat pour récupérer certains établissements de son diocèse spoliés par l’État, comme par exemple l’école des catéchistes Cuénot. Le soutien du clergé et des fidèles de certaines paroisses de la capitale et de la province de Nam Dinh a été immédiat. Il s’est également manifesté dans le diocèse de Vinh, et des milliers de fidèles sont venus veiller et prier dans l’église Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours à Saigon.

L’actuel mouvement de revendication reprend, d’une manière plus radicale, ce qui était déjà l’objectif des manifestations de prière déclenchées de 2008, à savoir la récupération de la totalité de la propriété du couvent et de la paroisse. À cette époque, le début des travaux de construction sur un terrain appartenant au monastère avait donné le signal des premières manifestations. Cette fois-ci, c’est une décision de l’administration de l’hôpital Dông Da qui a mis de nouveau le feu aux poudres. La direction de l’hôpital, sans en avertir auparavant les rédemptoristes, propriétaires légaux du terrain, a annoncé qu’elle allait construire une station d’épuration des eaux usées (4). La communauté rédemptoriste a aussitôt fait connaître aux autorités son refus de cette décision et sa volonté de récupérer l’ensemble du monastère. N’ayant pas de réponse de l’administration, les religieux ont installé sur la façade du monastère un panneau lumineux où l’on pouvait lire, en lettres fluorescentes : « Nous prions les détenteurs du pouvoir à Hanoi de nous restituer le couvent qu’ils ont emprunté pour en faire l’hôpital de Dong Da. Le terrain de l’étang de Ba Giang doit être rendu à la paroisse ».

Cette revendication publique allait faire grand bruit. Dans l’après-midi du 26 octobre, un groupe de cadres appartenant au service culturel et à la sécurité se présentait au monastère où les religieux, qui suivaient leur retraite mensuelle, ne purent les recevoir. Ils laissèrent sur place un procès-verbal où les rédemptoristes étaient accusés d’avoir commis une infraction administrative en violation de la législation régissant la publicité. Après une réponse du supérieur du monastère affirmant que le panneau lumineux n’avait rien à voir avec la publicité, les autorités changèrent d’avis et accusèrent les religieux d’avoir violé la sécurité et l’ordre public.

Dans un tel contexte, le raid des hommes de main de la police sur la paroisse de Thai Ha le 3 novembre dernier, a semblé lourd de menaces. Au nom de sa communauté religieuse, le P. Joseph Nguyên Van Phuong, en a fait le récit dans une lettre adressée à l’archevêque de Hanoi et à son supérieur provincial. Il y estime à environ cent personnes le nombre des agresseurs dont il avoue ignorer totalement l’identité. Munis de porte-voix, ils ont injurié prêtres et fidèles, n’hésitant pas à les malmener, les prendre au collet, et à proférer contre eux des menaces de mort. Aucun d’entre eux ne s’est présenté comme le responsable ou l’animateur du groupe. Cependant, les religieux ont remarqué qu’ils étaient organisés et avaient préparé leur intervention soigneusement. Bon nombre d’entre eux étaient munis de caméras et d’appareils de photo professionnels. Ils ne se sont dispersés qu’à l’arrivée d’une foule de fidèles de la paroisse et des environs, alertés par la cloche de l’église.

(1) Voir la dépêche EDA du 7 novembre 2011
(2) Voir le blog «Nguoi buôn Gio » (le colporteur de vents) http://nguoibuongio1972.multiply.com/journal/item/433
(3) On trouvera le récit de l’expulsion dans EDA 514
(4) Voir le récit du début de l’affaire dans la dépêche EDA du 25 octobre 2011

© Les dépêches d’Eglises d’Asie peuvent être reproduites, intégralement comme partiellement, à la seule condition de citer la source.

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ZENIT Staff

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