Un synode pour l’Eglise au Moyen-Orient ?

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Proposition de l’archevêque de Kirkuk en Irak

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ROME, Dimanche 15 février 2009 (ZENIT.org) – Donner « une ligne commune » aux chrétiens du Moyen Orient : tel est l’objectif pour lequel Mgr Louis Sako, archevêque de Kirkuk (Irak), propose que soit organisé un Synode pour l’Eglise au Moyen-Orient.

Dans un entretien accordé à la revue Oasis, Mgr Sako explique que sa proposition de Synode vient de ce que les chrétiens du Moyen-Orient sont « écrasés par beaucoup de souffrances et pressés par de nombreux défis » auxquels il faut apporter une réponse.

« Nous sommes une petite communauté et pour affronter tous ces problèmes nous avons besoin d’être aidés », a t-il reconnu, avant de passer en revue une série de difficultés, dont la plus grande, a-t-il précisé « est certainement l’exode chrétien de nos régions ».

« Le risque que dans un futur proche il n’y ait plus de chrétiens au Moyen-Orient est, selon Mgr Sako », un risque réel. « Nous sommes profondément préoccupés du fait que le destin des chrétiens de ces pays puisse devenir le même que celui des chrétiens de Turquie ou d’Iran, où désormais, ils sont très peu nombreux , a-t-il confié.

Un autre problème souligné par l’évêque irakien durant l’entretien est celui de la pastorale : « Aujourd’hui, nous faisons souvent l’expérience de l’absence d’un programme pastoral adéquat à la situation dans laquelle nous vivons et nous nous demandons comme en préparer un qui soit adapté à nos fidèles », a-t-il expliqué.

Par exemple, en pensant aux laïcs, la demande est récurrente : « comment peuvent-ils vivre et témoigner de leur foi dans le contexte socio-culturel dans lequel ils sont immergés ? Comment devons-nous concevoir la présence même des chrétiens dans le domaine social et culturel du Moyen-Orient ? », s’interroge Mgr Sako.

Mais d’autres questions attendent des réponses, souligne-t-il comme : la réforme liturgique, la formation des séminaristes, des moines et des religieux, sans oublier un autre défi : « la rencontre avec les musulmans ».

« Donc, les questions d’actualité intéressantes à affronter ne manquent pas », poursuit Mgr Sako qui estime que si  « le Saint-Siège promeut un Synode pour l’Afrique, un pour l’Asie, pourquoi pas un également pour les chrétiens du Moyen-Orient ? ». Interrogé sur la réaction du pape à cette idée, Mgr Sako a répondu : « Le Saint-Père aussi m’a dit que c’est une bonne idée ».

Selon Mgr Sako, les pays de la région qui devraient être impliqués dans ce synode sont : l’Irak, mais aussi le Liban, la Syrie, la Jordanie, l’Égypte et la Palestine ; et en ce qui concerne les différents rites, tous ceux qui sont pratiqués dans la région : chaldéens, syriaques, arméniens, coptes, maronites et melkites.

Mais, en terme d’organisation, pour bien structurer le travail du Synode, « il faut constituer un comité mixte qui comprenne des exposants des différentes Églises et pays, ainsi que des représentants du Saint-Siège, des experts dans l’organisation de tels évènements », pense Mgr Sako en évaluant qu’« il faudra au moins un an » pour tout mettre en place.

Les objectifs du synode

Interrogé sur les retombées que pourrait avoir une rencontre de ce type, Mgr Sako a mis en avant l’apport d’unité que ce synode pourrait constituer pour les chrétiens de la région, si on leur fournissait des directives uniformes.

Car « ce dont nous avons besoin, c’est d’une ligne commune », a-t-il reconnu . Et d’expliquer : « la vie de l’Eglise un objectif bien clair qui est l’évangélisation. Mais en ce moment, c’est comme si nous n’avions pas une idée commune et partagée sur la façon d’incarner un tel objectif, sur la manière de le traduire concrètement dans la vie de tous les jours ».

Concernant la possibilité de trouver les moyens de freiner l’exode des chrétiens de la région, Mgr Sako a reconnu qu’il fallait aussi agir à ce niveau-là. Mais « la vérité est que nous n’avons pas de stratégie pour aider les chrétiens à ne pas partir et éventuellement à rentrer », dit-il, constatant en effet qu’« ils ne rentrent pas » et que « ceux qui sont restés jusqu’à présent s’en iront bientôt ».  Parce qu’ « il n’y a personne qui s’occupe d’eux, qui cherche une solution ».

Pour l’archevêque de Kirkuk il est impératif d’« étudier et comprendre les causes réelles de cette fuite et seulement dans un deuxième temps penser aux solutions » car, « actuellement, tout est laissé à l’improvisation ».  « On ne peut continuer de la sorte », s’est-il exclamé.

De la même manière, le synode pourrait aider à trouver une nouvelle façon d’entrer en dialogue avec les musulmans, en cherchant « un nouveau langage qui ne soit pas apologétique ou polémique ».

Dans ce domaine, Mgr Sako estime que « l’Église doit prendre des initiatives sinon personne ne fera le premier pas. L’Église doit être protagoniste dans la direction de l’ouverture à la rencontre ».

Signes positifs

Après les élections provinciales du 31 janvier, dans 10 des 14 provinces irakiennes, qui se sont soldées par une défaite des partis religieux extrémistes, Mgr Sako commente que ces résultats sont « source d’espérance » pour les chrétiens et pour tout l’Irak, mais que cette « espérance doit être concrétisée dans la vie quotidienne, et ne peut rester une utopie, un rêve ». 

« Il y a des signaux positifs et il faut en profiter », poursuit-il.  « Il faut aider la communauté chrétienne à rester, à espérer et à témoigner ».

« Les musulmans ne sont pas tous fondamentalistes ou terroristes, il y a beaucoup de braves musulmans et la coexistence avec eux est possible », affirme Mgr Sako qui se dit convaincu que ce qu’il faut c’est seulement « trouver la façon juste pour se positionner par rapport à eux » ; c’est « trouver la manière et le langage. Surtout le langage ». 

La question à se poser continuellement, selon l’archevêque de Kirkuk est : « quelles paroles devons-nous utiliser avec les fidèles de l’Islam ? » 

Enfin, « le sang de cinq cents martyrs chrétiens » tués durant ces dernières années », dont Mgr Sako a dit conserver la mémoire nom par nom, constitue selon lui « un appel mais aussi une espérance ». Leur fidélité, leur prière et leur sang invitent « à ne pas abandonner ce pays, à rester pour témoigner ici et maintenant de l’Évangile ».

Traduction française : Isabelle Cousturié

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ZENIT Staff

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