Synthèse de l’encyclique : « Dieu est Amour »

De l’amour « galvaudé » à l’amour concret des saints

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ROME, Mercredi 25 janvier 2006 (ZENIT.org) – La première encyclique de Benoît XVI publiée aujourd’hui à midi, a pour titre « Dieu est Amour », « Deus Caritas est ». Elle est consacrée à la spécificité de l’amour chrétien, et vise à raviver cette « charité » qui vient de Dieu au cœur de l’Eglise. En date de Noël, le 25 décembre 2005, elle compte deux parties, et 42 paragraphes, soit, en français, 78 petites pages.

Nous en proposons cette synthèse, inspirée de la synthèse proposée en italien par la salle de presse du Saint-Siège.

La première partie de l’encyclique a pour titre : « L’unité de l’amour dans la création et dans l’histoire du salut ». Elle propose une réflexion à la fois philosophique et théologique, biblique et spirituelle sur la réalité de l’amour sous ses différentes formes, spécialement celles désignées par les mots grecs « éros » et « agapè » auxquels la révélation biblique a donné un sens nouveau.

La seconde partie de l’encyclique a pour titre : « Caritas – L’exercice de l’amour de la part de l’Eglise en tant que communauté de l’amour », et présente la mise en pratique du commandement de l’amour.

L’éros inscrit dans l’homme par le Créateur
Au début de son encyclique, le pape évoque un « problème de langage ». Il fait remarquer que le terme « amour » est l’un des mots les plus « galvaudés » aujourd’hui et que, parmi les différentes formes d’amour, l’amour entre l’homme et la femme est considéré comme l’amour par excellence. La Grèce antique le désignait par le terme d’« éros ». Dans la Bible, et en particulier dans le Nouveau Testament, le concept d’« amour » est purifié et approfondi comme en témoigne l’emploi du mot « agapè » pour exprimer un amour « oblatif ».

A propos de la nouvelle vision de l’amour introduite par le Christ lui-même, Benoît XVI fait observer un malentendu : on l’a présentée comme un refus de l’éros et de la corporéité. Or, le pape souligne que l’éros a été inscrit dans la nature même de l’homme par son Créateur. Mais il a aussi besoin « de discipline, de purification et de maturation » pour ne pas perdre sa « dignité originelle » et ne pas être réduit à une conception du sexe quasi marchande.

Le don de soi, une « libération »
Mais la foi chrétienne considère l’homme comme un être où sont unis l’esprit et la matière. Ainsi, lorsque le corps et l’âme de l’homme se trouvent en parfaite harmonie, le défi de l’éros est en quelque sorte surmonté. L’amour devient « extase », non pas moment d’ivresse passagère mais « exode permanent du moi fermé sur lui-même vers sa libération dans le don de lui-même » : l’éros peut conduire l’être humain vers le divin.

Ces deux formes de l’amour, « éros » et « agapè » ne peuvent donc être dissociées : plus ils trouvent un juste équilibre, plus la vraie nature de l’amour se réalise. Même si l’éros est au départ essentiellement désir, lorsqu’il se rapproche de l’autre personne, il cherche le bonheur de l’autre, se donne et désire être « pour l’autre ».

Enfin, du point de vue chrétien, l’éros-agapè atteint sa forme sublime dans Jésus Christ, amour de Dieu fait chair. La mort sur la croix de Jésus qui se donne pour relever et sauver l’homme, exprime l’amour dans sa forme la plus élevée. De plus, à la veille de sa Passion, Jésus confère à cette offrande une présence durable dans le monde par l’institution de l’Eucharistie. Sous les espèces du pain et du vin, il se donne et unit les chrétiens à Lui. En participant à l’Eucharistie les chrétiens sont à leur tour entraînés dans la dynamique de ce don et deviennent « un seul corps ».

L’amour pour Dieu et l’amour pour le prochain ne sont plus qu’un et l’amour peut être un « commandement » car il est déjà « donné ».

Reflet de l’amour trinitaire
Dans la seconde partie de son encyclique, le pape montre que l’amour pour le prochain, enraciné dans l’amour de Dieu, est un devoir pour tout fidèle comme pour la communauté ecclésiale, qui, dans son activité caritative doit refléter l’amour trinitaire.

La conscience d’un tel devoir a eu une importance constitutive pour l’Eglise depuis ses débuts et la « diaconie » est apparue au sein de la structure fondamentale de l’Eglise en tant que service de l’amour du prochain exercé en communauté et de manière ordonnée : un service à la fois concret et spirituel.

La nature intime de l’Eglise s’exprime dans un triple devoir: l’annonce de la parole de Dieu (kérygme et martyre), la célébration des sacrements (liturgie) et le service de la charité (diaconie).

L’objection marxiste
Or, à partir du XIX siècle, une objection fondamentale a mis en cause l’activité caritative de l’Eglise : l’Eglise favoriserait le maintien du système injuste et freinerait le changement pour un monde meilleur.

Le marxisme, cité explicitement par le pape, a ainsi vu dans la révolution mondiale la panacée au problème social – un « rêve » qui s’est évanoui avec le temps, remarque Benoît XVI.

Or le magistère pontifical a affronté les problèmes suscités par les changements sociaux du XIXe s. à partir de l’encyclique de Léon XIII Rerum Novarum (1893) , développant une doctrine sociale très articulée qui propose des orientations valables bien au-delà des frontières de l’Eglise. Elle vient d’être exposée dans le « Compendium » publié en 2004.

Toutefois, le pape fait remarquer que la création d’un ordre juste de la société est le principal devoir de la politique, et ne peut constituer une responsabilité « immédiate » de l’Eglise.

L’amour ou la bureaucratie
La doctrine sociale catholique ne veut pas conférer à l’Eglise « un pouvoir sur l’Etat », mais souhaite seulement « purifier et éclairer la raison », en offrant sa contribution à la « formation des consciences », afin que les authentiques exigences de justice soient « perçues, reconnues et réalisées ».

Cependant, aucune institution d’Etat, aussi juste soit-elle, ne peut rendre superflu le service de l’amour, objecte Benoît XVI. Un Etat qui voudrait tout diriger deviendrait une « instance bureaucratique » incapable d’assurer ce dont l’homme qui souffre a besoin: le dévouement personnel. « Celui qui veut s’affranchir de l’amour se prépare à s’affranchir de l’homme en tant qu’homme », avertit le pape.

Mais l’encyclique évoque également la mondialisation, soulignant qu’un de ses effets positifs est la sollicitude envers le prochain, au-delà des frontières nationales. De très nombreuses organisations à but caritatif et philanthropique ont vu le jour.

Et, au sein même de l’Eglise catholique, comme dans d’autres communautés ecclésiales, de nouvelles activités caritatives sont nées. Il est souhaitable, dit le pape, qu’une « collaboration fructueuse » s’instaure entre toutes ces instances.

L’action caritative propre au baptisé
Mais il est important que l’activité caritative de l’Eglise ne perde pas sa propre « identité » et qu’elle conserve toute la « splendeur » de l’essence de la charité chrétienne et ecclésiale.

L’activité caritative chrétienne, en plus de la compétence professionnelle, doit se fonder, recommande le pape, sur « l’expérience d’une rencontre personnelle avec le Christ », dont l’amour a touché le cœur du croyant, suscitant en lui l’amour pour le prochain.

Elle doit en outre être « indépendante de partis et d’idéologies ». Le programme du chrétien – celui du Bon samaritain, le programme de Jésus, le Bon Pasteur – est d’être « un cœur qui voit » où il y a besoin d’amour et qui agit en conséquence.

Enfin, l’activité caritative chrétienne ne doit pas être un « moyen » de « prosélytisme », car « l’amour est gratuit
», et ne peut viser d’autres objectifs. Pourtant, cela ne signifie pas que l’action caritative doive « laisser Dieu et le Christ de côté ». Le chrétien doit reconnaître le moment de parler de Dieu ou de se taire, en laissant parler l’amour.

D’autre part, le pape recommande de considérer l’hymne de saint Paul sur la charité comme la grande charte de tout service ecclésial et bouclier contre sa réduction au pur activisme ».

Celui qui prie ne perd pas son temps
Enfin, le pape réaffirme l’importance de la prière. Le contact vivant avec le Christ évite l’écueil de tomber, devant l’immensité de la tâche et les limites humaines, dans l’idéologie qui prétend de « faire maintenant ce que Dieu n’aurait soi-disant pas réussi à faire » et celui de céder à la tentation de l’inertie et de la résignation.

« Celui qui prie, affirme Benoît XVI, ne perd pas son temps », et il donne l’exemple de la Vierge Marie, à qui il adresse une prière finale, et l’exemple des saints, surtout Mère Teresa de Calcutta, invitant à « puiser en Dieu la lumière et la force de l’amour » capable de vaincre toute obscurité et tout égoïsme dans le monde.

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ZENIT Staff

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