Synode d'octobre 2014 : la famille, expérience commune de l'humanité

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Présentation du card. Vingt-Trois

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Le synode « extraordinaire » des évêques d’octobre prochain (5-19 octobre 2014) est un synode « sur la famille » – pas sur le couple seul -, et il concerne « l’Eglise universelle » donc, les cinq continents, et pas seulement les « sociétés occidentales fatiguées », fait observer le cardinal Vingt-Trois. La famille est non seulement une réalité importante pour l’Eglise, mais « l’expérience commune de l’humanité ».

Le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, président délégué du synode – représentant l’Europe – a en effet participé à la présentation de « l’Instrument de travail » du synode « extraordinaire » des évêques sur la famille convoqué par le pape François pour octobre 2014, ce jeudi 26 juin au Vatican.

Le cardinal français souligne l’importance du thème non seulement « parce que la réalité et la vérité de la vie familiale » sont « importantes pour l’Eglise » – celle-ci lui consacre « beaucoup d’énergie, de travail, de réflexion, d’engagement » -, mais aussi parce que la famille constitue « l’expérience commune de l’humanité ».

Il indique que « l’objectif du synode n’est pas d’énoncer une doctrine particulière que l’Eglise voudrait imposer aux sociétés mais de partager avec les sociétés humaines une réflexion éclairée par la foi sur les expériences que beaucoup vivent et qui sont un terrain privilégié pour une évangélisation ».

« On parle, explique-t-il, de quelque chose que tout le monde connaît », qui n’est pas un « modèle particulier à proposer » mais une « réflexion éclairée par la révélation et par la foi sur une expérience commune vécue par beaucoup de monde ».

I – Le message de l’Eglise, fondé sur l’expérience des chrétiens (§§ 59-60)

Le premier message de l’Eglise n’est pas « théorique » mais « exemple vécu par de nombreuses familles », insiste le cardinal Vingt-Trois : il est humainement « possible » de vivre dans une « famille unie », à travers les épreuves, les événements imprévus, les responsabilités qui découlent de la « solidarité interne à une famille ».

Il ajoute immédiatement : « Non seulement c’est possible mais le vivre épanouit les personnes, leur fait connaître la joie et les met en situation de progrès humain. »

Certes, l’Eglise propose des discours sur la famille en s’appuyant sur la Révélation et en essayant de le traduire de façon intelligible, mis ces réflexions prennent un « poids » différent à partir de « l’expérience vécue des chrétiens » dans le monde entier, insiste l’archevêque de Paris.

Coupant l’herbe sous le pied à certaines objections récentes, il ajoute : il ne s’agit pas d’abord d’une « fabrication de clercs célibataires enfermés dans le synode ou la curie » mais de « quelque chose de vécu » et que « tout le monde peut voir en regardant autour de soi ».

Ce que l’Eglise met en place avec cet Instrument de travail est un « travail au deuxième degré, éclairé par la Parole de Dieu et la théologie », explique l’archevêque : il s’agit de comprendre « comment l’engagement des membres des familles les uns envers les autres est éclairé à la lumière de l’alliance entre Dieu et l’humanité » et « comment elle est vécue dans l’engagement, la fidélité et la responsabilité », car cette expérience vécue constitue une « illustration de la fidélité sans reprise de l’amour de Dieu ».

II – L’action pastorale dans les Eglises particulières

Une préparation sérieuse

L’Instrument de travail souligne l’importance d’une « préparation sérieuse au mariage », dans un contexte où l’on se marie peu, indique l’archevêque : « Je vis dans un pays (mais je pense que c’est le cas dans beaucoup de pays dans le monde) où plus de la moitié des mariages ne sont pas des mariages religieux. »

Le cardinal Vingt-Trois en tire deux questions sur « les motivations de qui vient se marier à l’Eglise » : ils évoquent « rarement de façon explicite » une « expérience de foi », mais « souvent » ils expriment leur « conviction » ou « leur sentiment » qu’un mariage religieux et singulièrement catholique est « plus sérieux qu’un autre » et ils espèrent aussi par leur démarche en quelque sorte « gommer la pesanteur ».

La seconde question concerne « ceux qui ne recourent pas au mariage chrétien » : comment les préparer aux réalités du mariage ? Des mouvements, des associations se mettent au service des municipalités pour proposer des thèmes de réflexion sur « le contenu de la vie familiale », sans la dimension religieuse : c’est une forme de « préparation au mariage civil ».

La préparation du mariage catholique découle de la réalité de la vie chrétienne, vécue de façon très diverse, qu’il s’agisse de personnes baptisées, ou ayant une expérience pratique de vie chrétienne, ou de chrétiens fervents : d’où l’intérêt de faire se rencontrer ces personnes.

Elles ont ainsi l’occasion d’entendre « le témoignage de chrétiens fervents » pour mettre en place l’élément « déterminant » de la fidélité et de la fécondité humaine, de la prospérité de la famille, et des moyens mis en oeuvre « pour réaliser la vie familiale ».

Rien de « magique »

Mais le cardinal français avertit que le sacrement du mariage « n’est pas une grâce magique » qui offre une « garantie perpétuelle » : c’est « un moment de la grâce à nourrir, à faire vivre, à développer, en prenant les moyens de la vie chrétienne » à savoir la Parole de Dieu, la prière et la vie sacramentelle.

Il pose donc cette « question importante » : « Comment préparer et comment accompagner les gens mariés pour les aider à parcourir leur chemin dans la foi ? » L’archevêque fait état de « tentatives nombreuses » pour l’accueil de jeunes couples.

De fait, ceux-ci ne sont pas forcément dans la « phase initiale » de leur amour ni « jeunes », mais ce sont des « nouveaux couples » auxquels les mouvements familiaux apportent un « secours important ».

L’éducation des enfants

L’archevêque français insiste sur le fait que le synode d’octobre prochain « n’est pas un synode sur le couple mais sur la famille », et il doit par conséquent prendre en considération « la responsabilité sociale et éducative que représente la prise en charge des enfants », dans les mouvements, la catéchèse, les patronages, les écoles de parents, en somme les « dispositifs par lesquels l’Eglise essaye de contribuer à cette responsabilité éducative ».

III – Accompagnement positif, stimulant, curatif (§§ 45-48)

L’Instrument de travail aborde la question des personnes qui « souffrent des accidents du mariage ».

Les mères célibataires

Le cardinal André Vingt-Trois signale d’abord l’importance des « mères célibataires » qui représentent « statistiquement une catégorie importante de la population », et en même temps « particulièrement éprouvée », dont « peu de monde s’occupe » : elles ne font pas « la une de l’info », ne sont pas « revendicatives », et parfois « préfèrent l’ombre et l’anonymat » aux manifestations de rue.

Pourtant, constate l’archevêque, elles « portent un poids considérable avec courage et dévouement et elles exercent une fonction familiale où il manque un des acteurs ».

« Nous devons être attentifs à cette situation qui se double souvent de la situation d’immigrés et de la privation de la famille restée au pays natal », insiste le président délégué du synode.

< em>Les personnes abandonnées ou divorcées

Les personnes abandonnées et divorcées sont aussi « statistiquement importantes »: le fait de se fixer inconsciemment sur « la situation de divorcés remariés » rejette dans l’ombre « quantité d’hommes et de femmes » que leurs incidents de parcours « mettent dans une situation de rupture » et qui veulent « rester fidèles à leur alliance, à l’engagement pris, même si le conjoint n’est pas fidèle ». Ils se sont « engagés dans une vie où ils assument leurs responsabilités sans les moyens habituels de ce genre de responsabilités ».

Mariées religieusement, divorcées, remariées

Les personnes mariées religieusement puis divorcées et remariées font l’objet d’une « préoccupation très forte » dans les Eglises particulières « principalement en Occident ». Mais, avertit l’archevêque « il ne faudrait pas qu’une question légitime et préoccupante pour les Eglises occidentales vienne occuper tout le champ d’attention du synode, qui n’est pas synode des Eglises occidentales fatiguées, mais un synode de l’Eglise universelle. »

« Ce qu’elles vivent, précise-t-il, n’est pas ce que vit l’Eglise universelle » : il s’agit donc pour la société occidentale « d’accepter que le monde entier ne soit pas suspendu à ses problématiques et ses questionnements ».

Deux types d’union de fait

Autre point sensible : les unions de fait avec deux statuts différents.

« Certains, explique le cardinal Vingt-Trois, cheminent vers une union de droit : ils mènent une vie commune avant le mariage, et le « passage à la décision de se marier » est conditionnée par « la prise de conscience de la responsabilité de parents », par le fait qu’ils ont eu des enfants ou désirent avoir des enfants.

Il existe aussi ce que l’archevêque appelle des « unions de fait au long cours » de personnes qui « pour des raisons diverses refusent l’engagement social du mariage » : elles « ont compris que le mariage est un engagement social, ce qui n’est pas le cas de toutes les personnes mariées ». Elles vivent « un concubinage durable ».

Facteurs de souffrance

Le cardinal Vingt-Trois souligne aussi les situations et les facteurs de souffrance – guerres, violences, misère économique – qui « ont un effet direct sur la famille », « provoquent la désagrégation des familles » comme l’émigration économique (beaucoup abandonnent enfants ou conjoints pour aller au bout du monde pour les faire vivre) ou les invasions et les violences.

Le modèle individualiste

Enfin, l’archevêque signale un phénomène important indiqué dans l’Instrument de travail du synode : certes, « les moeurs et l’expérience des sociétés occidentales ne sont pas universelles », mais la « diffusion d’une culture hédoniste et individualiste se développent à grande vitesse par la transmission des modèles » notamment du fait de l’informatique, d’Internet, diffusant « une sorte de questionnement sur la cherche individuelle de la satisfaction plutôt que l’engagement dans la responsabilité ».

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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